Une éclipse a précipité la chute de Constantinople en 1453

Longtemps incomprises, les éclipses ont marqué le cours de l’Histoire. Ce fut le cas à l’occasion du siège de Constantinople en 1453. 

Une ville convoitée :

Constantinople est fondée en l’an 330 par l’empereur Constantin 1er. Il a prévu d’en faire la capitale de l’Empire romain d’Orient, délaissant Rome, en pleine décadence. Construite sur les ruines de l’antique Byzance, Constantinople occupe en effet une position stratégique. La nouvelle capitale, qui commande l’accès à la mer Noire, est également le point de jonction entre deux grandes voies militaires, l’une venant de Rome et l’autre d’Ankara :

Un monastère moldave conserve cette fresque représentant la ville de Constantinople.

Très bien protégée par ses murailles et sa position géographique (elle est en grande partie entourée par la mer), la ville résiste à de nombreux sièges pendant plusieurs siècles. Elle finit par être mise à sac en 1204 par les troupes chrétiennes qui composent la Quatrième croisade. Différents empereurs latins vont ensuite la reconstruire et la diriger, mais la ville intéresse également les Turcs ottomans qui ont peu à peu conquis toute l’Asie Mineure. Ils tentent à plusieurs reprises de s’en emparer.

Signe divin à Constantinople :

Le 2 avril 1453, le jeune sultan Mehmed II est au pied des murailles avec ses soldats. Au cours des semaines qui suivent, il lance plusieurs assauts, tous repoussés avec succès par les Byzantins et leur empereur Constantin XI. Mais tout bascule la nuit du 22 mai, quand la Lune se lève partiellement éclipsée. Dans la ville, c’est la panique. Quatre siècles plus tôt, l’apparition de la supernova SN 1054 (à l’origine de la nébuleuse du Crabe) a fortement marqué les esprits. Au point d’apparaître sur des pièces de monnaie, aux côtés de Constantin IX Monomaque, l’empereur de l’époque. Cette fois, les assiégés  voient dans ce nouveau phénomène céleste un signe divin annonçant leur fin prochaine :

L’éclipse partielle de Lune du 22 mai 1453 fut considérée comme un mauvais présage par les Byzantins assiégés. Une semaine plus tard, Constantinople tombait entre les mains des Turcs. Dessin Christine Sasiad

Présent sur place, un chirurgien vénitien, Nicolò Barbaro, écrira plus tard dans ses carnets : « Ce signe en effet donnait à entendre à cet illustre souverain (ndlr : il s’agit de Constantin XI) que les prophéties allaient s’accomplir et que son empire approchait de sa fin, comme aussi il est arrivé. Ce signe, par contre, parut un signe de victoire aux Turcs, qui fort s’en réjouirent et firent une grande fête dans leur camp. ». Chez les assiégés, le moral n’y était plus. La ville tomba sept jours plus tard aux mains des Turcs, marquant la fin de l’Empire byzantin et le début de l’Empire ottoman.

Des éclipses qui font peur :

On imagine sans peine qu’une éclipse, qu’elle soit de Lune ou de Soleil, est longtemps restée un phénomène prodigieux pour les humains. Un événement surnaturel au cours duquel les deux astres disparaissaient, avalés à tout jamais.  En Asie, le cannibale était un dragon céleste, en Inde un démon décapité. En Amérique et en Afrique, on invoquait de terribles diables. Et dans la Grèce ancienne, on croyait que seuls les dieux étaient capables de provoquer ces sinistres événements :

Il y a éclipse de Lune quand notre satellite naturel passe dans le cône d’ombre terrestre. Un phénomène interprété comme un signe divin dans le passé. © Jean-Baptiste Feldmann

Il semble que le mécanisme des éclipses ait été évoqué pour la première fois par Aristote dans son Traité du ciel vers 350 av. J.-C.. Et il fut clairement exposé trois siècles plus tard par l’astronome grec Geminus de Rhodes dans son Introduction aux Phénomènes. Il n’empêche : plusieurs siècles furent ensuite nécessaires pour enlever aux éclipses leur sulfureuse réputation.

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