Construit en 1845 en Irlande, le Léviathan resta le plus grand télescope du monde (1,83 mètre de diamètre) jusqu’en 1917.
La passion d’un comte :
Il fut un temps au XIXe siècle, où le plus grand télescope du monde se trouvait en Irlande. À deux heures de route de Dublin, près de la ville de Birr, vivait William Parsons, troisième comte de Rosse. Ce riche astronome irlandais avait décidé de construire un télescope de 1,83 mètre de diamètre. Il supplanta alors celui de 1,20 mètre réalisé en 1789 par William Herschel.
En 1839, William Parsons disposait déjà d’un télescope de 92 centimètres de diamètre. Son miroir avait été coulé dans un mélange de cuivre et d’étain. Trois ans plus tard, il décida de réaliser un miroir deux fois plus grand. Le premier miroir se brisa. Par prudence, le comte en fit recouler deux autres. L’instrument, le Léviathan, entra en service en 1845, au moment de la Grande Famine.
L’instrument de la démesure :
Le télescope se composait d’un tube principal de 17 mètres suspendu entre deux murs de 15 mètres de haut. Trois assistants étaient nécessaires pour actionner cordes, chaînes et poulies. L’instrument pouvait pointer de l’horizon au zénith. Mais sa conception limitait fortement les mouvements d’Est en Ouest. On disposait d’une heure au maximum pour suivre des astres situés sur l’équateur céleste. Cette contrainte technique avait été imposée par la masse du télescope, car il était impossible à l’époque de construire une monture capable de soutenir un tel instrument :
En raison de sa composition, le miroir s’oxydait rapidement. Mais comme il y en avait deux, on échangeait le miroir principal tous les six mois. Le miroir enlevé était nettoyé pendant que les observations se poursuivaient.
Les galaxies spirales se dévoilent :
Jusqu’en 1917, date d’entrée en service du télescope du Mont Wilson (2,5 mètres de diamètre), le Léviathan resta le plus grand du monde. Malgré sa monture inadaptée et les caprices de la météorologie irlandaise (une soixantaine de nuits claires par an seulement), l’instrument offrait une vision unique de l’Univers. On pouvait y observer des astres jusqu’à la magnitude 18. De nombreux astronomes furent invités à venir l’utiliser : Thomas Romney Robinson, James South, Robert Ball, John Louis Emil Dreyer, Otto Boeddicker… Ils découvrirent ainsi la structure spiralée de certaines galaxies et précisèrent la forme de plusieurs nébuleuses du New General Catalogue.
En 1867, Lawrence Parsons prit la succession de son père décédé. Le quatrième comte de Rosse se passionnait lui aussi pour l’astronomie. Dix ans plus tard, le télescope confirma l’existence de quatre satellites autour d’Uranus et deux autour de Mars. Les observations se poursuivirent jusqu’en 1908, date de la mort de Lawrence Parsons.
Abandonné puis restauré :
Après 1908, le Léviathan fut abandonné. Il fallut attendre les années 1990 pour qu’un projet de restauration soutenu par Patrick Moore voit le jour. On peut désormais admirer l’instrument dans le parc du château de Birr qui s’est enrichi d’un Historic Science Centre. Même si on ne fait plus de science avec ce télescope, il nous rappelle combien l’ingéniosité du troisième comte de Rosse a changé notre vision de l’Univers.
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