Suite du billet précédent : De Ponge à Queneau
Apocalypses et voyages cosmiques
Autre thème privilégié de la poésie scientifique, symétrique d’ailleurs de celui des naissances: celui des apocalypses cosmiques. Là encore, la science du XXe siècle a bouleversé notre rapport aux fins du monde. Le sujet mériterait à lui seul une conférence et se décline en plusieurs sous-thèmes. Par exemple, l’ère atomique, la découverte de l’antimatière et le E = mc2 d’Einstein ont fait concevoir aux Terriens ce que peut être la disparition pure et simple. Dans une belle page poétique de Tarendol, datant de 1945, René Barjavel décrit l’été de Hiroshima pour exorciser le cauchemar atomique.
Je me concentrerai sur les modèles d’évolution stellaire, qui se sont développés à partir des années 1930 dès lors que la source d’énergie interne des étoiles – l’énergie nucléaire – était identifiée. Les nouvelles apocalypses célestes, imaginées par les théories astrophysiques et confirmées par l’observation télescopique, engendrent morts et renaissances. À la fin de leur vie de lumière, les étoiles massives expulsent violemment leurs couches externes, tandis que leur cœur s’effondre sur lui-même. C’est le phénomène de la supernova. Les débris gazeux de l’explosion ensemencent en « atomes lourds » les espaces interstellaires, engendrant de proche en proche de nouvelles naissances stellaires qui accueillent en leur sein les ferments d’étoiles disparues. C’est le célèbre « Patience ! Patience dans l’azur, chaque atome de silence est la chance d’un fruit mûr ! » de Paul Valéry, titre repris par un ouvrage de vulgarisation connu de tous. Cette belle image du bûcher fécond est retenue par Charles Dobzynski dans son poème « Supernova » (1963). Continuer la lecture