Qui parle ici d’harmonie ? Ignores-tu ce qu’est le monde ? Un combat atroce, monstrueux, dans l’ombre qu’agite la Discorde… Ô chutes, écroulements, hasards, lutte, écume, chocs sans nombre !
Elémir Bourges (La Nef, 1904)
Qui parle ici d’harmonie ? Ignores-tu ce qu’est le monde ? Un combat atroce, monstrueux, dans l’ombre qu’agite la Discorde… Ô chutes, écroulements, hasards, lutte, écume, chocs sans nombre !
Elémir Bourges (La Nef, 1904)
Des flottes de Soleils peut-être à pleines voiles
Viennent en ce moment…
Peut-être allons-nous voir brusquement apparaître
Des astres effarés
Surgissant, clairs flambeaux, feux purs, rouges fournaises
Ou triomphes du Noir le plus noir
Hugo, A la fenêtre pendant la nuit
La plus grande simplicité se trouvera réunie à la plus parfaite harmonie par la seule supposition d’un corps obscur dans le centre.
J.A. Lambert, Lettres cosmologiques sur l’organisation de l’Univers (1761)
Si seulement les théoriciens savaient ce qui est derrière une mesure expérimentale et si les observateurs savaient ce qui est derrière un calcul théorique, ils se prendraient mutuellement beaucoup moins au sérieux.
Fritz Zwicky (1898-1974)
Par sélection naturelle, notre esprit s’est adapté aux conditions du monde extérieur, et il a adopté la géométrie la plus avantageuse à l’espèce ; ou en d’autres termes la plus commode… La géométrie n’est pas vraie, elle est avantageuse.
Henri Poincaré
Si les idées des promoteurs de la science moderne avaient été soumises à des commissions de spécialistes, elles auraient sans nul doute paru extravagantes et auraient été écartées en raison même de leur originalité et de leur profondeur
Louis de Broglie, 1978
Il y a des gens, je le sais, qui, s’employant en vains efforts pour atteindre l’impossible, acquièrent aisément, grâce à leur seul jargon, une sorte de réputation de profondeur parmi leurs complices les pseudo-penseurs, pour qui obscurité et profondeur sont synonymes.
Edgar Poe, Eurêka (1848)
L’esprit se fatigue en errant dans cette immensité du monde où il ne trouve nul repos dans ses calculs, nulle halte, nulle borne pour le retour
Kepler, De Stella Nova (1606)
La lumière fit encore une fois irruption dans les ténèbres, dans un ultime embrasement de l’univers, dans un ultime embrasement de la création, tandis que les ténèbres s’ouvraient encore une fois, lumière et ténèbres unies, dans la plongée et la contre-plongée.
Hermann Broch, La mort de Virgile (1945)
Et, d’heure en heure aussi, vous vous engloutirez / Ô tourbillonnements d’étoiles éperdues / Dans l’incommensurable effroi des étendues, / Dans les gouffres muets et noirs des cieux sacrés !
Et ce sera la Nuit aveugle, la grande Ombre / Informe, dans son vide et sa stérilité, / L’abîme pacifique où gît la vanité / De ce qui fut le temps et l’espace et le nombre.
Leconte de Lisle, Dernière vision (1862)
La culture ce n’est pas avoir le cerveau farci de dates, de noms ou de chiffres, c’est la qualité du jugement, l’exigence logique, l’appétit de la preuve, la notion de la complexité des choses et de l’arduité des problèmes. C’est l’habitude du doute, le discernement dans la méfiance, la modestie d’opinion, la patience d’ignorer, la certitude qu’on n’a jamais tout le vrai en partage; c’est avoir l’esprit ferme sans l’avoir rigide, c’est être armé contre le flou et aussi contre la fausse précision, c’est refuser tous les fanatismes et jusqu’à ceux qui s’autorisent de la raison; c’est suspecter les dogmatismes officiels mais sans profit pour les charlatans, c’est révérer le génie mais sans en faire une idole, c’est toujours préférer ce qui est à ce qu’on préférerait qui fût.
Jean Rostand, Le droit d’être naturaliste (1963).
L’ensemble de la science est lié à la culture humaine en général, et les découvertes scientifiques, même celles qui à un moment donné apparaissent les plus avancées, ésotériques et difficiles à comprendre, sont dénuées de signification en dehors de leur contexte culturel. Une science théorique qui ne serait pas conscience de ce que les concepts qu’elle tient pour pertinents et importants sont destinés à terme à être exprimés en concepts et en mots qui ont un sens pour la communauté instruite, et à s’inscrire dans une image générale du monde, une science théorique où cela serait oublié et où les initiés continueraient à marmonner en des termes compris au mieux par un petit groupe de partenaires, serait coupée du reste de l’humanité culturelle, vouée à l’atrophie et à l’ossification.
Erwin Schrödinger, 1952
Qui a entrevu l’univers, qui a entrevu les ardents desseins de l’univers ne peut plus penser à un homme, à ses banales félicités ou à ses bonheurs médiocres, même si c’est lui, cet homme.
Jorge Luis Borges (L’Aleph, 1949)
Tout l’univers visible n’est qu’un magasin d’images et de signes auxquels l’imagination donnera une place et une valeur relative ; c’est une espèce de pâture que l’imagination doit digérer et transformer.
Charles Baudelaire, Delacroix (1863)
Un jour on demandait à Anaxagore : “Pourquoi vis-tu ? – Pour regarder, dit-il, les astres. Supprime le ciel, je ne suis plus rien”
Chalcidius (IVe siècle)