Mes romans (5) : L’Œil de Galilée

L’Œil de Galilée (Les Bâtisseurs du ciel, tome 3)

 

EDITION ORIGINALE

405 pages, JC Lattès, Paris, 2009 – ISBN 978-2709629027

GalileeOeilLe 21 août 1609, à Venise, Galilée monte les escaliers du campanile de la place Saint-Marc : derrière lui les princes de la ville, de l’église et de la famille Médicis. La première démonstration officielle de sa lunette astronomique va fasciner toute l’Europe. Bientôt il fait appel aux meilleurs verriers de Murano pour ciseler des lentilles et perfectionner l’invention. Les astronomes du monde entier vont découvrir, tantôt émerveillés tantôt consternés, le spectacle des satellites de Jupiter, la surface de la Lune et les profondeurs du cosmos, qui mettent à bas l’enseignement d’Aristote au profit du système de Copernic…
Pendant ce temps, à Prague, le mathématicien impérial de Rodolphe II, Johann Kepler, n’a pas attendu la lunette pour révolutionner l’astronomie. Il a déjà découvert les lois mathématiques des mouvements planétaires et les principes de base de l’optique. Lui seul comprend le fonctionnement de la lunette astronomique et peut attester de la réalité des observations de son confrère italien. L’œil de Galilée, c’est lui, Kepler.
Dans son nouveau roman, Jean-Pierre Luminet conte comment ces deux géants de la science se sont progressivement apprivoisés sans jamais se rencontrer : Kepler, aux prodigieuses capacités mathématiques mais fasciné par les mondes occultes ; Galilée et son génie rationnel de la mécanique, prudent sous le regard menaçant du Saint-Office.
Après Le Secret de Copernic et La discorde céleste, Jean-Pierre Luminet continue à nous faire découvrir l’histoire de ces bâtisseurs du ciel, qui ont définitivement changé notre façon de voir l’univers.

***********************************************************************

EDITION DE POCHE

Livre de poche LGF, Paris, 2010 – ISBN 978-2-253-13315-5

galileepocheLe 21 août 1609, à Venise, Galilée monte les escaliers du campanile de la place Saint-Marc : derrière lui les princes de la ville, de l’église et de la famille Médicis. La première démonstration officielle de sa lunette astronomique va fasciner toute l’Europe.
Pendant ce temps, à Prague, le mathématicien impérial de Rodolphe II, Johann Kepler, n’a pas attendu la lunette pour révolutionner l’astronomie. Lui seul comprend le fonctionnement de la lunette astronomique et peut attester de la réalité des observations de son confrère italien. L’oeil de Galilée, c’est lui, Kepler.
Jean-Pierre Luminet évoque avec talent ces deux géants de la science – Kepler, aux prodigieuses capacités mathématiques, Galilée et son génie rationnel de la mécanique – qui se sont progressivement apprivoisés sans jamais se rencontrer

***********************************************************************

TRADUCTIONS

occhio-galileoL’Occhio di Galileo

La Lepre edizioni, Roma, 2012 – ISBN 978-88-96052-50-1

Ottobre 1601. Ai funerali dell’astronomo e matematico Tycho Brahe, il suo successore Johannes Keplero si appoggia su un bastone ricevuto in eredità dal defunto: il bastone di Euclide. Ciò che il resto del mondo ignora è però che il bastone è cavo e che Keplero vi ha nascosto preziose osservazioni astronomiche sottratte all’avidità degli eredi di Tycho. Keplero, oltre a scoprire le tre leggi destinate a rivoluzionare la nostra visione dell’Universo, si è anche dedicato allo studio dell’ottica ed è il solo uomo in grado di comprendere a fondo il funzionamento del cannocchiale di Galileo. Lo scienziato italiano, geloso delle proprie scoperte, scrive a Keplero senza rivelare quasi nulla delle osservazioni compiute con il cannocchiale, esponendogli i suoi dubbi sotto forma di enigmi. Keplero saprà risolverli? Un romanzo “di uomini e di idee”, che svela aspetti poco noti e sorprendenti del rapporto tra i due scienziati, mettendo in luce la complessa personalità di Keplero.

**************************************************************************

DOSSIER DE PRESSE

 

Historia, 08-2009

“Jean-Pierre Luminet excelle dans le roman picaresque astronomique”- L.V.

Le Figaro littéraire, 01-2009

” L’imagination du romancier alliée à la rigueur du scientifique donne un roman fluide et agréable à lire” -Françoise Dargent

Le Canard enchaîné, 03-2009

“Il retrace avec brio la vie mouvementée, les tâtonnements scientifiques, les rêves et les combats d’un astrologue-astronome, on était les deux en ce temps, dans une Europe de la Renaissance désolée par les luttes religieuses, les guerres et les épidémies.” Alain Dag’Naud

France Info, 02-2009

“(…) Jean-Pierre Luminet nous fait revivre l’histoire bouleversante de deux géants de l’histoire des sciences (…)” – Marie-Odile Monchicourt

Mensuel, 07-2009

“L’auteur précise en introduction que “le roman que vous tenez en main a été écrit pour divertir , mais aussi pour instruire” : missions réussies!” – La rédaction.

Presse région Ouest, 05-2009

Dans ce livre, aussi passionnant qu’agréable à lire, Jean-Pierre Luminet allie remarquablement la rigueur du biographe à l’imagination du romancier, soucieux de replacer l’homme, fût-il d’exception, dans son quotidien qui n’avait rien de céleste.

La Marseillaise, 04-2009

“Autant dire que tous les férus de planètes, comètes, galaxies et lunettes astronomiques (…) et d’espionnage savoureront les délices de ce somptueux roman, écrit, comme nous le signale son auteur, autant pour divertir que pour instruire.” – Anne-Marie Mitchell

Ouest France, 03-2009

“Belle actualité d’un roman passionnant.” Yannick Pelletier

La Marseillaise, 02-2009

“Intelligent, et sans failles historiquement”- Maxime Romain

**************************************************************************

EXTRAIT

En haut de la tourelle, sur la plate-forme, huit chaises avaient été disposées en rond autour d’un haut guéridon sur lequel un tube en carton d’un pouce de diamètre sur un coude de longueur était posé, orienté vers le ciel sur un mince socle pivotant, en cuivre. La lunette de Galilée !

Mon cœur battait très fort dans ma poitrine. Moi qui ne suis pas d’une nature particulièrement mystique, j’étais empli d’une horreur sacrée. Mes compagnons partageaient sans aucun doute ces sentiments confus d’émotion et de peur. Seul Kepler, d’ordinaire si exubérant, gardait un calme surprenant. Tel un général donnant ses ordres à ses officiers avant une bataille décisive, il déclara :

— Voici, madame, messieurs, comment nous allons procéder. Ursinus a placé sur chaque chaise une tablette d’ardoise et une craie. Il orientera sur mon ordre la lunette vers un point du ciel où Galilée affirme avoir découvert une nouveauté. Chacun à votre tour vous examinerez ce lieu à travers la lunette. Puis vous noterez ou dessinerez sur votre tablette ce que vous avez vu. Mais je vous demande le plus grand silence durant toute l’opération. Pas d’exclamation de surprise ni le moindre commentaire. Vous ne devrez pas non plus montrer ce que vous avez écrit aux autres participants. Je ne veux pas que nous risquions de nous influencer les uns les autres. Après chaque observation, vous donnerez tous votre ardoise à Ursinus, qui recopiera votre texte et votre croquis sur ce registre, en les lisant à voix haute. Surtout, ne touchez pas à l’appareil. S’il dévie d’un iota, on perdra du temps à le réajuster sur l’objectif. Je ne vous donnerai pas non plus le nom du lieu que vous observerez, pour que votre jugement ne soit pas faussé par le souvenir de votre lecture du Messager Astral. À l’exception de la Lune, bien sûr, car je suppose que vous la reconnaîtrez facilement.

Personne ne songea à sourire de cette boutade. Il chuchota quelques mots à l’oreille d’Ursinus. Celui-ci posa son œil à l’extrémité la plus étroite du tube, qu’il dressa légèrement vers le ciel, et le bougea délicatement de droite à gauche. Il se redressa :

— J’y suis, maître. Veuillez vérifier.

Pendant qu’Ursinus griffonnait sur sa tablette, Kepler se pencha à son tour derrière le télescope, mais ne s’y attarda pas.

— Parfait, dit-il d’un ton neutre. Pour éviter tout froissement d’amour-propre protocolaire ou autre, vous passerez par ordre alphabétique. Sir Askew, à vous l’honneur.

— Moi ? Mais… Honneur aux dames…

— Sir Askew, je vous prie de faire ce que je dis.

J’obéis et me levai, les jambes tremblantes, et j’effleurai de mes cils l’oculaire de la lunette. Sur l’instant je fus déçu, car je ne vis rien, ou presque : au milieu d’un cercle très noir, tout au plus un minuscule disque jaune. Certes, ce n’était plus un point, mais son image était floue et tremblotait, comme si elle dansait la gigue. Cependant, au bout de quelques secondes, mon œil s’accommoda. Passés les premiers instants d’émotion, je pus alors distinguer trois petits points brillants situés près de la planète, et disposés selon une ligne exactement droite : Les lunes de Jupiter, forcément ! Bien qu’égales aux autres étoiles en grandeur, elles étaient plus resplendissantes.

Me mordant les lèvres pour ne pas pousser un cri d’admiration devant tant de beauté, je tentai de graver cette vision dans ma mémoire. Je m’arrachai à ma contemplation et revins m’asseoir à ma place, comme un écolier bien sage. Je choisis de dessiner ce que j’avais vu, avec seulement quelques mots concernant la couleur et la grosseur. Ce qui me priva du gracieux spectacle de Cécile Brahé se penchant à son tour, et laissant voir dans l’échancrure de son corsage deux planètes d’albâtre…

Me succédèrent Gans, Guldin, puis Jessenius, qui dit en se redressant :

— À ton tour, Johann.

— Non, répondit Kepler, je suis juge, et non témoin. D’ailleurs, la venue inopinée de notre belle amie m’a privé de mon ardoise.

C’était étrange… L’affectueuse ironie de notre ami se faisait grinçante. Il n’était resté que peu de temps derrière la lunette, comme s’il s’en désintéressait. Pourtant, il n’avait pas eu le temps de s’en servir avant cette nuit, puisque le père Guldin ne la lui avait remise que dans le courant de l’après-midi. Après qu’Ursinus eût comparé nos ardoises, Kepler nous annonça que nous avions tous vu ce que le Messager astral avait annoncé : Jupiter avait bel et bien des lunes.

Nous poursuivîmes jusque très tard dans la nuit. La Lune, Orion, la Voie Lactée nous comblèrent successivement de mille sensations, émotions et pensées nouvelles. Ainsi, l’astre des nuits s’offrait à nous avec des cornes éclatantes. Je remarquai au premier coup d’œil que la limite qui séparait sa partie obscure de sa partie lumineuse ne s’étendait pas uniformément selon une ligne ovale, mais formait une ligne inégale, accidentée et sinueuse. Plusieurs taches brillantes s’étendaient sur la partie obscure, au-delà de la frontière entre la lumière et les ténèbres, tandis qu’à l’opposé, des parties ténébreuses s’avançaient dans la lumière. Bien plus, une grande abondance de petites taches noirâtres criblaient l’étendue inondée de tous côtés par la lumière du Soleil, tout comme la queue d’un paon est diversifiée par des yeux céruléens.

Nous contemplâmes ensuite un ciel d’innombrables étoiles Fixes, restées inconnues des Anciens. Pour ma part, je notai la nette différence d’aspect entre les planètes et les Fixes ; tandis que les planètes présentaient leurs globes exactement ronds et circulaires, semblables à de petites lunes éclairées, les étoiles Fixes avaient une apparence identique à celle qu’on obtient d’elles à l’œil nu, dardant leurs rayons partout alentour et scintillant intensément. Mais elles étaient agrandies dans leur éclat, au point qu’un petite étoile de cinquième grandeur, à peine visible au regard naturel, semblait à la lunette égaler Sirius, la plus brillante de toutes les Fixes.

Nous vîmes enfin que la Voie lactée et les nébuleuses n’étaient en fait que des troupeaux de petites étoiles semées de manière admirable. Tandis que chacune d’elles, à cause de sa petitesse ou de son très grand éloignement, échappait à l’acuité de notre regard, leurs clartés réunies formaient cette blancheur lumineuse, semblable à celle que donne le crépuscule, et que l’on avait prise jusqu’à maintenant pour une partie plus dense du Ciel…

À chaque fois, Kepler se contentait de vérifier d’un coup d’œil si son assistant avait bien orienté le télescope. Nous confirmâmes ainsi toutes les découvertes de Galilée. Puis le ciel commença à pâlir.

— Il est temps d’aller prendre quelque repos, ordonna Kepler. Je vous demanderai de revenir dans deux jours pour signer le procès-verbal de cette séance.

Il toussota pour s’éclaircir la voix. Il était au bord des larmes quand il conclut :

— Nous avons pu voir que tout était réglé en fonction des lois éternelles de la géométrie, qui est une et éternelle, véritable reflet de l’esprit de Dieu. Maintenant que j’ai vu tout cela, me voici en paix.

Puis il descendit le raide escalier de l’observatoire, soutenu par Cécile Brahé. Les autres le suivirent.

— Vous venez, Askew ? me demanda le comte Wackher.

— Non, si vous le permettez, cher ami, je préfère rester un peu et contempler le lever de soleil sur Prague. Je suis bouleversé et je dois me remettre les idées en place.

Il s’en fut lui aussi. J’attendis encore de longues minutes. Enfin je descendis, traversai la cour, pénétrai dans la demeure silencieuse. Je ne connais pas de meilleure façon de connaître un homme que de visiter sa maison hors de sa présence. Au rez-de-chaussée, j’ouvris quelques portes, mais ma curiosité fut déçue : l’habitation de Kepler ne se distinguait en rien de celle d’un brave bourgeois de Prague. Passant devant l’escalier, j’entendis un murmure à l’étage, comme des sanglots. Je montai en prenant bien garde de ne pas faire grincer les marches. C’étaient bien des sanglots. Ceux de Kepler. Je collai mon oreille à la porte de ce qui devait être la chambre à coucher. La voix tendre de Cécile murmurait :

— Mon ami, mon ami, ne vous mettez pas dans un état pareil. Vous recommencerez la nuit prochaine, seul ; et vous y arriverez, je vous le promets.

— Hélas, Cécile, hélas ! répondit la voix brisée du mathématicien impérial. Vous m’avez offert votre corps, votre amour, et peut-être un peu de votre âme. Mais vous ne pourrez jamais me prêter vos yeux. L’astronome impérial Johann Kepler, le myope, le bigleux, n’a rien vu dans la lunette de Galilée !

2 réflexions sur “ Mes romans (5) : L’Œil de Galilée ”

  1. Bonjour M. Luminet,
    j’ai lu avec un grand plaisir votre roman. Plaisir d’histoire, de plume, d’humanité et de science. Mille fois bravo! Je voudrais vous poser une question sur l’un des moments clé, à savoir quand Kepler reçoit enfin la lunette et procède à la vérification des dires de Galilée : s’agît-il de faits attestés ou de l’imagination du romancier? Et encore : Kepler était-il à ce point malvoyant? Il me semble qu’il fit ses observations seul, en disant qu’il voyait des étoiles… carrées!
    Bien cordialement
    Daniel

    1. Merci pour votre intérêt. La très mauvaise vue de Kepler due à sa myopie est historiquement avérée. De même que ses observations astronomiques se faisant avec ses assistants (n’empêchant pas qu’il ait pu voir lui-même des étoiles carrées!). Une scène du merveilleux film “L’oeil de l’astronome” de Stan Neumann, sorti hélas confidentiellement en 2011, illustre parfaitement mon propos. Vous pouvez le voir sur youtube à https://www.youtube.com/watch?v=ZqVhWnISPSY

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *