Je reproduis ci-dessous l’entretien paru dans l’ouvrage collectif “Contacts et OVNI : l’enquête” dirigé par François Deymier et Mathias Lebœuf (éditions Télémaque, 2025). J’y donne mes sentiments concernant les possibilités de vie extraterrestre – depuis les simples bactéries jusqu’aux plus improbables civilisations avancées, et l’interprétation du phénomène OVNI.
Je l’ai agrémenté de quelques illustrations.
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Vous êtes astrophysicien mais aussi écrivain et poète, la question OVNI et/ou celle d’une vie extraterrestre font-elles partie du champ de vos préoccupations ?
Oui, et à divers titres ! Ces questions m’ont d’abord intéressé bien avant d’être astrophysicien, tout simplement parce que j’étais un grand lecteur de science-fiction quand j’étais adolescent. Vraiment ! J’ai lu des centaines de livres, tous les grands classiques du genre. Alors, forcément, la question de la vie extraterrestre m’intéressait – plus que celle des OVNIS, d’ailleurs, ceux-ci étant un cas très particulier de la vie extraterrestre. J’ai même écrit un roman de jeunesse de science-fiction, que je n’ai pas publié.
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Quand je suis devenu ensuite astrophysicien, la question m’a intéressé dans le cadre de cette nouvelle discipline qui était en train de devenir scientifique : l’astrobiologie – on dit aussi exobiologie. Même si elle est en dehors de mon champ propre de recherche, elle fait désormais partie intégrante des sciences de l’univers. Il est donc difficile de ne pas s’intéresser à la possibilité d’une vie extraterrestre. Je parle ici de vie extraterrestre au sens le plus large du terme, les bactéries, j’y reviendrai.
Mais surtout, en tant que théoricien, la question des OVNIS m’a aussi interpelé parce que, si les OVNIS sont effectivement des vaisseaux extraterrestres, cela implique qu’il y a des civilisations très avancées qui nous visitent et qui ont donc découvert des lois physiques que nous ignorons ! C’est sur ce plan que le sujet m’intrigue : elles auraient découvert le moyen de voyager entre les étoiles, peut-être d’utiliser et de maîtriser certains phénomènes sur lesquels j’ai travaillé sur le plan théorique, comme les trous noirs et les trous de ver. C’est pour cette raison que le sujet fait partie de mes préoccupations. Le terme « préoccupation » est peut-être un peu fort, disons que cela fait partie de mes intérêts et de mes questionnements.
Vous avez écrit sur de nombreux astronomes du passé, certains d’entre eux croyaient-ils à une vie extraterrestre ?
Comme vous le savez, l’hypothèse de la pluralité des mondes habités avait déjà été avancée dans l’Antiquité, par les philosophes atomistes notamment comme Démocrite et Epicure. Elle a ensuite été interdite de pensée par l’Église, et commencé à revenir sur le devant de la scène à la fin du XVIe siècle, avec Giordano Bruno (qui, rappelons-le, a été brûlé vif comme hérétique en 1600). C’est surtout à partir du XVIIe siècle, avec Galilée, Kepler et l’évolution de nos connaissances en astronomie, qu’on a commencé à comprendre que la physique d’ici-bas, la physique terrestre, est la même que la physique céleste. Et qu’en conséquence les autres planètes, contrairement à ce que pensait Aristote, pouvaient ressembler à la Terre. Est alors revenue l’idée d’autres mondes peuplés d’habitants. Parmi les auteurs sur lesquels j’ai écrit livres et articles, Kepler a publié à titre posthume un ouvrage étonnant intitulé Le Songe ou l’astronomie lunaire, dans lequel il imagine des habitants de la Lune, des « sélénites », en mesure d’observer le système solaire depuis notre satellite pour en découvrir les lois.
À partir de là, pendant deux siècles, quantité d’ouvrages ont été publiés sur la « pluralité des mondes habités », y compris par des auteurs très sérieux comme le physicien et astronome hollandais Huygens (qui a notamment découvert les anneaux de Saturne et inventé les horloges à pendule), ou encore le philosophe Kant qui, dans son Traité du Ciel, développe toute une théorie sur la possibilité de planètes du système solaire habitées, avec des êtres adaptés aux conditions complètement fantasmagoriques que l’on croyait alors y régner. L’un des plus fervents adeptes de la pluralité des mondes a été Camille Flammarion. Il faisait partie de ceux qui, à la fin du XIXe siècle, croyaient notamment à l’hypothèse de canaux artificiels à la surface de Mars. Dans nombre de ses ouvrages, il fantasme sur les habitantes de Vénus à demi-nues se prélassant sous les tropiques, et autres savoureuses fantaisies…
Le paradoxe de Fermi est-il toujours intéressant ? valide ?
C’est une très bonne question soulevée en 1938 par le physicien prix Nobel de physique Enrico Fermi : « s’il y avait des civilisations extraterrestres, leurs représentants devraient être déjà chez nous. Où sont-ils donc ? ». En effet, à partir du moment où le Soleil est une étoile relativement jeune dans l’histoire de l’univers, il y a eu beaucoup d’autres étoiles qui se sont formées bien avant. Et si l’on croit que l’évolution naturelle conduit inéluctablement à l’émergence de formes vivantes de plus en plus sophistiquées, allant jusqu’à des civilisations technologiques, alors il devrait y avoir eu bien avant nous des civilisations beaucoup plus avancées que nous. Le raisonnement est donc le suivant : si ces civilisations développent les technologiques spatiales et découvrent la façon de voyager entre les étoiles, pourquoi ne nous ont-elles pas rendu visite de façon incontestable ?
Certains pensent qu’elles l’ont fait. Pour eux, la preuve en serait les pyramides d’Egypte ou d’autres constructions savantes, en Amérique du Sud et ailleurs… J’aimerais bien croire à tout cela, mais cela me paraît invraisemblable. Néanmoins le paradoxe de Fermi reste une très bonne question. Il y a plusieurs autres réponses, bien entendu ! Par exemple, une civilisation technologiquement avancée dans une galaxie donnée pourrait être très rare. Une autre réponse consiste en l’hypothèse qu’en fait les extraterrestres nous rendent visite mais qu’ils ne se manifestent pas, de sorte que l’on ne s’en rend pas compte… Le débat reste donc ouvert.
Justement, vous, à titre personnel, croyez-vous à une vie extraterrestre ? Si oui, pourquoi ?
Je dirais … plutôt oui. Mais essentiellement sous la forme la plus simple du vivant, c’est-à-dire la bactérie. Car je pense que l’évolution de l’arbre du vivant à partir d’une souche initiale, c’est-à-dire la bactérie, fondée sur des principes fondamentaux comme la chimie du carbone, dépend de facteurs endogènes très particuliers à l’histoire de chaque planète.
Donc, l’hypothèse de la vie extraterrestre, j’y crois plutôt, oui, même si le terme de « croire » n’est pas un terme que j’apprécie beaucoup dans la démarche scientifique. Disons que cela me semble plausible, au niveau basique, je le répète, des bactéries. Après, j’aimerais bien avoir des preuves indubitables et des confirmations qu’il existe ailleurs que sur Terre des formes de vie plus avancées que les bactéries. J’aimerais vraiment, pour les raisons que j’ai évoquées : des lois physiques inconnues, etc.
Dans la sphère scientifique, plus particulièrement dans le domaine de l’astrobiologie, le débat avance en ce moment dans deux directions opposées. On a deux écoles qui s’affrontent : l’école plutôt « classique », initiée par Carl Sagan, affirmant qu’il y a tellement de planètes dans l’univers qu’il n’est pas possible que la Terre soit la seule à accueillir le vivant. C’est un argument probabiliste, le problème est qu’il ne tient pas du tout la route, je vais vous dire pourquoi.
L’autre école fait l’hypothèse de la « terre rare », en mettant simplement en jeu une combinatoire, c’est-à-dire une combinaison d’un certain nombre de facteurs exceptionnels qui doivent s’enchaîner d’une certaine façon pour aboutir au vivant. Si l’on s’en tient à très peu de facteurs, par exemple juste du carbone, de l’eau liquide et de l’énergie, alors la vie apparaîtrait un peu partout, et je pense qu’on l’aurait déjà trouvée. Si par exemple on découvrait dans les années à venir des bactéries fossiles sur Mars, cela validerait la première hypothèse – et j’en serais personnellement ravi. Mais rien n’est certain ! De fait, les partisans de la vie « partout dans l’univers » invoquent un argument statistique qui ne résiste pas à l’analyse, tout simplement parce qu’on ne peut pas évaluer de probabilité d’occurrence de tel ou tel phénomène tant que l’on ne connaît pas l’ensemble des facteurs nécessaires à l’émergence du phénomène en question. C’est le cas pour le vivant. Les facteurs nécessaires sont très vraisemblablement en beaucoup plus grand nombre que trois ! Je me suis amusé à utiliser la combinatoire permettant de calculer la probabilité d’occurrence d’un phénomène donné – disons l’émergence d’une bactérie – à partir d’une bonne vingtaine de facteurs nécessaires, qui en outre doivent s’enchaîner d’une certaine manière ‑ à l’exemple de ce qui s’est probablement passé sur notre planète Terre. Le calcul fait intervenir des factorielles, et montre finalement que le nombre gigantesque de planètes que l’on suppose exister dans l’univers, de l’ordre de 1021, suffit à peine pour réaliser une occurrence ! L’hypothèse de la terre rare, si elle est philosophiquement un peu dérangeante, n’est donc pas absurde. Mon ami Jean-Pierre Bibring a récemment publié un livre fort intéressant[1] sur cette hypothèse. En poussant à l’extrême, la Terre pourrait être la seule planète de l’univers abritant de la vie, même au niveau aussi fondamental que la bactérie. Personnellement, je n’ai pas trop envie d’y croire, mais on ne peut pas éliminer cette hypothèse assez radicale.
Si on découvrait de la vie extraterrestre, quelles seraient les conséquences de cette découverte ? Cela changerait-il notre conception de la vie ? Qu’est-ce que cela impliquerait ?
Si l’on découvre de façon indubitable une vie extraterrestre sous forme de bactéries, et à mon avis si cela se produit ce sera sous cette forme, je pense que ça ne changera pas grand-chose. Tout simplement parce que c’est quand même plus ou moins attendu par la thèse dominante en exobiologie…
On y arrivera forcément un jour ou l’autre ?
Je n’en sais rien ! On y arrivera si l’on trouve par exemple des bactéries martiennes fossiles, mais comme je viens de le dire cela ne changera pas grand-chose parce que c’est largement attendu par beaucoup d’exobiologistes « optimistes ». Après, si l’on découvre des bactéries actuellement vivantes sous les croûtes glacées des satellites de Jupiter et de Saturne, comme Europa ou Encelade par exemple, ce serait mieux. Mais je ne pense pas non plus que cela changerait beaucoup de choses dans l’esprit des gens. Rappelons quand même que la révolution copernicienne selon laquelle la Terre n’est pas au centre de l’univers, quatre cents ans plus tard n’est pas complètement assimilée par une fraction importante de la population mal éduquée… En revanche, si l’on entrait en contact avec une civilisation avancée, alors cela bousculerait vraiment bien des choses, tant au niveau politique que sur les plans culturel, philosophique et religieux. Même si l’on aurait droit, comme cela est devenu une malheureuse habitude chez les adeptes de la pensée unique, à quantité de contestations, d’accusations de « fake news » et autres théories complotistes.
Dans le cas d’un contact avec une civilisation avancée, pensez-vous que nous y sommes préparés ? Comment réagirait l’humanité, à votre avis ?
Franchement, je n’en sais strictement rien. Certains esprits sont préparés… En premier lieu ce n’est pas le peuple qui réagirait, mais les politiques, les gouvernements, les militaires… Comme on l’a vu dans certains films de science-fiction, des esprits « paranoïaques » pourraient réagir de façon belliqueuse, en pensant que tout ce qui nous est étranger est hostile. Pour ma part, j’y suis préparé très positivement, souhaitant même ardemment que cela arrive de mon vivant, car ce serait une date capitale dans l’histoire de l’humanité, même si ce premier contact serait probablement indirect, par le biais de signaux radio artificiels. Mais je répète que c’est très improbable si l’on suit le paradoxe de Fermi.
Un cas qui serait beaucoup plus spectaculaire, mais malheureusement bien plus invraisemblable, serait celui d’OVNIS ou de contact direct, comme cela a souvent été mis en scène au cinéma, généralement dans des scénarios d’une naïveté confondante, comme dans les films de Spielberg Rencontres du troisième type ou E. T., avec leurs petits aliens de forme humanoïde. Je ne pense pas du tout qu’une forme de vie extraterrestre évoluée puisse être humanoïde. C’est une projection typiquement terrestre, humaine. En revanche, Premier contact (en anglais, Arrival) le film Denis Villeneuve, est un chef-d’œuvre du genre. Je trouve ce film magnifique et d’une très grande intelligence.
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Puisque vous parlez de réception de signaux, que pensez-vous des messages envoyés par les humains dans l’espace à l’attention d’éventuelles créatures extraterrestres ?
C’était un bon coup à tenter, même s’il y avait très peu de chances de réussite. De plus, j’ai connu, quand je suis arrivé à l’Observatoire de Paris-Meudon, les radioastronomes François Biraud et Jean Heidmann qui ont été les premiers, en France en tout cas, à faire ça avec le radiotélescope de Nançay. C’était une bonne idée, mais il ne faut pas oublier que les signaux ont été envoyés en direction d’un amas globulaire située à 20 000 années-lumière. Il mettra donc 20 000 ans pour arriver, et il faudra 20 000 ans de plus pour avoir une éventuelle réponse !
Vous parliez des films de Spielberg et de celui de Villeneuve. Pensez-vous que la fiction, que ce soit dans l’ordre du roman, du film ou des séries, a un peu dénaturé la réception que l’on peut avoir du phénomène OVNI et de la question de la vie extraterrestre ?
Dénaturé, oui, tout simplement parce que, la plupart du temps, tout cela reste très anthropocentrique, que ce soit dans le cinéma, dans la littérature de science-fiction ou dans l’imaginaire collectif. Au contraire, le film de Villeneuve se démarque de l’anthropocentrisme, avec l’idée d’un extraterrestre en forme de grande pieuvre (encore que sur ce point ce soit aussi un grand classique de la science-fiction), mais surtout sur la manière d’entrer en communication en utilisant non pas les mathématiques ou la géométrie, mais la science de la linguistique. C’est sur ce point que j’ai trouvé le film très intéressant. Mais je répète, la plupart du temps les représentations sont extrêmement naïves. Les formes humanoïdes sont très particulières aux conditions physiques qui règnent sur telle ou telle planète, à la pesanteur, et plus encore à l’évolution naturelle des espèces. Quand on voit l’extraordinaire diversité des espèces vivantes qui se sont succédé sur Terre depuis des centaines de millions d’années, avoir deux bras et deux jambes, c’est quand même plutôt rare !
Vous avez été conseiller scientifique sur la série OVNI. En quoi a constitué votre apport ?
J’ai été un peu surpris d’être contacté parce que je n’avais pas manifesté publiquement mon intérêt pour la question. Malgré tout ce que je viens de raconter, je n’avais pas beaucoup écrit sur le sujet. J’y ai juste consacré quand même quelques chapitres dans au moins trois de mes livres de vulgarisation[2]. Mais comme je suis toujours très ouvert et que j’aime bien collaborer à des idées originales, j’ai bien voulu rencontrer les scénaristes, le réalisateur et le producteur, et j’ai bien accroché avec eux. Je les ai trouvés non seulement sympathiques mais tout à fait pertinents et bien documentés. J’ai donc été partant pour l’aventure. Je dois avouer que je n’ai pas eu beaucoup de travail ! Les deux scénaristes, Martin Douaire et Clémence Dargent, étaient déjà vraiment très bien documentés et pourvus de bonnes idées. Simplement, ils m’envoyaient à mesure des ébauches de scenario pour relecture, et de temps en temps je corrigeais un petit truc par-ci par-là ou j’ajoutais quelques indications.
Cela m’a donné l’occasion de me plonger un peu plus sérieusement dans le sujet en lisant plusieurs ouvrages issus des archives du GEIPAN pour voir quels étaient les cas les plus bizarres… L’aventure a été plutôt amusante, surtout dans la deuxième saison où les scénaristes ont eu l’idée de me faire intervenir en tant que personnage (joué par Bastien Ughetto) présentant au héros de la série ma première image de trou noir, la scène se déroulant justement en 1979, l’année où j’avais publié ce travail. Cela m’a aussi donné l’occasion de me rendre sur le tournage du film et de me lier d’amitié avec l’acteur principal de la série, l’excellent Melvil Poupaud.
Vous évoquez le GEIPAN. Quelle réception et quelle perception avons-nous en France de ces questions et en particulier de la question OVNI ? On a l’impression que la France, à un moment donné, a été à la pointe de la recherche et que ce n’est plus le cas aujourd’hui, alors qu’aux États-Unis il y a énormément d’actualité sur ces questions, notamment avec la déclassification de nombreux documents par l’armée américaine.
La France a effectivement été à la pointe grâce à la création de cet organisme du CNES, le GEIPAN, spécifiquement chargé d’étudier rationnellement les dossiers d’apparition d’OVNIS. Dans d’autres pays cela existait aussi, même si c’était moins officialisé qu’en France. Il y avait notamment des groupes d’études aux Etats-Unis. L’histoire du GEIPAN a fini par se dégonfler un petit peu, c’est vrai. Je pense que c’est parce que, malheureusement, il n’y a rien de très convaincant dans tout cela. Même dans les cas dits de catégorie D, la catégorie de phénomènes pour lesquels on n’a pas d’explication claire. À l’époque, je m’étais d’ailleurs intéressé à la fameuse histoire de Trans-en-Provence, où un engin aurait atterri dans un champ et aurait été vu par un paysan. Ce qui m’interpelle le plus aujourd’hui, ce sont les témoignages de pilotes d’avion, notamment aux Etats-Unis.
Avez-vous personnellement observé des phénomènes OVNI ?
Non, du tout. Hélas d’ailleurs, j’aimerais bien !
Parmi les phénomènes OVNI, il y en a un qui a fait beaucoup parler : celui d’Oumuamua. Notamment par la voix d’Avi Loeb, avec qui vous avez débattu sur cette question ?
Effectivement. Il se trouve que j’ai connu Avi Loeb avant qu’il ne propose son hypothèse assez extravagante sur la nature de l’objet Oumuamua qui a traversé notre Système solaire en 2019. Il dirigeait à Harvard un groupe d’astrophysique autour de l’imagerie des trous noirs. Après l’obtention cette même année 2019 de la première image télescopique de trou noir par l’Event Horizon Telescope, laquelle ressemblait aux simulations numériques que j’avais faites plus de trente ans auparavant, j’ai été invité à Harvard par Avi Loeb.
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J’ai rencontré un scientifique extrêmement imaginatif. Il est l’auteur de travaux spécialisés extrêmement sérieux, sur des sujets voisins de ceux sur lesquels j’avais travaillé d’ailleurs, comme la destruction d’étoiles par les forces de marée engendrées par les trous noirs. J’ai tout de suite trouvé que c’était un esprit très original, et je dois dire un peu plus ouvert que la moyenne… Lorsque, un ou deux ans plus tard, j’ai lu son hypothèse selon laquelle Oumuamua pouvait être un artefact extraterrestre envoyé par une civilisation très avancée, cela ne m’a pas étonné de sa part. Certes l’idée paraît extravagante au départ, mais en échangeant avec lui à ce sujet j’ai compris qu’il avait lancé l’idée non pas parce qu’il y croyait de façon ferme, mais simplement pour faire passer un message essentiel aux chercheurs : il faut faire preuve d’imagination ! Le monde scientifique actuel est devenu bien trop orthodoxe. Nombre de jeunes, enferrés dans des programmes « à la mode » décidés en « haut lieu », n’osent pas sortir des sentiers battus. Et, sur ce point-là, Avi Loeb avait raison. Ensuite, de là à développer et à insister comme il le fait depuis sur la présence sur Terre d’artefacts extraterrestres, c’est une autre histoire… Je pense pour ma part qu’Oumuamua est un objet parfaitement naturel, un astéroïde de forme particulière issu d’un autre système planétaire. En tout cas, j’ai apprécié mes échanges avec Avi, qui d’ailleurs m’a écrit un mot très élogieux à l’occasion de la sortie d’un de mes livres aux États-Unis[3]. J’apprécie cet esprit original et iconoclaste.
Avez-vous eu le sentiment de mettre un peu votre réputation en jeu en vous intéressant à ces questions et en en parlant ?
Pas du tout, non… Réputation en jeu auprès de qui, d’abord ? Vous savez, ma carrière de chercheur est aujourd’hui bien établie, même si j’ai toujours passé pour un original. J’ai fait ma première simulation numérique de trou noir en 1978, à une époque où quasiment aucun astronome ne croyait à l’existence réelle de ces objets, considérés comme purement théoriques. Ensuite, quand j’ai développé mes modèles de « crêpes stellaires », personne n’y croyait, non plus, jusqu’à ce que dans les années qui ont suivi les phénomènes que j’avais prédits ont été observés ; même chose avec mes modèles de « topologie cosmique » et « d’espaces chiffonnés » aux formes a priori bizarres. Au début, ma communauté scientifique trouvait mes idées extravagantes, puis tout est rentré dans l’ordre lorsque les observations astronomiques ont montré qu’elles étaient tout à fait plausibles, ce qui a conduit des dizaines d’autres chercheurs à travailler dessus et à les développer. Tout cela pour dire que je n’ai jamais craint de faire figure d’original, bien au contraire !
Cela rejoint ce que vous disiez sur Avi Loeb : il faut, au contraire, faire des hypothèses, modéliser et être audacieux
Absolument, même si je n’irai pas aussi loin qu’Avi Loeb, qui va maintenant chercher dans l’océan Pacifique des artefacts extraterrestres supposés s’y trouver. Je crains fort que cela ne donne rien (dans le cas contraire ce serait une découverte extraordinaire). Quoi qu’il en soit, pour être créatif en science, il faut faire preuve de hardiesse et d’originalité, même si cela heurte la plupart du temps la « doxa » et le consensus.
Avez-vous un avis sur les personnes qui disent avoir été abductées ?
Je pense qu’elles ont toutes un profil psychologique un peu particulier ! Ceci dit je rêverais d’être moi-même abducté et de revenir vous raconter l’histoire ! Mais tant que nous n’avons pas de preuve ou de récit vraiment indubitable, on ne peut qu’être très sceptique sur la question. Il y aura toujours des gens qui diront : « les extraterrestres sont là, parmi nous », et d’autres pour affirmer : « C’est complètement fantaisiste, complètement idiot ». Pour ma part je doute qu’une preuve arrive rapidement. Je le répète, j’aimerais bien qu’elle arrive de mon vivant, mais ça m’étonnerait fort !
Vous avez évoqué tout à l’heure, brièvement, la sphère complotiste. Pensez-vous qu’on nous cache des choses ? Du matériel ou des artefacts extraterrestres que des agences gouvernementales nous cacheraient ?
Non, je n’y crois pas du tout. Hélas, d’ailleurs, car le contraire serait plus excitant, et c’est bien pour cela que beaucoup de personnes veulent y croire. Il faut bien aussi rêver un peu !
[1] Seuls dans l’Univers. De la diversité des mondes à l’unicité de la vie, Paris, Odile Jacob, 2022.
[2] Figures du Ciel, Seuil/BnF 1998, chapitre Les Habitants du Ciel. Bonnes nouvelles des étoiles, en collaboration avec Elisa Brune, Paris, Odile Jacob, 2010. Chroniques de l’espace, Cherche Midi, 2019
[3] The Big Bang Revolutionaries, Seattle, Discovery Institute Press, 2024.
Dommage il confond l’ovni de Valensole avec celui de Trans en Provence. Sacrilège !!! Oui bon il fallait bien que je trouve un truc à redire non ? Article très intéressant
Je n’ai rien confondu. D’accord, le gars de Trans-en-Provence était maçon, pas paysan, et alors ? Et puis pourquoi vouloir systématiquement trouver un truc à redire?
Merci de chercher à trouver des preuves de l’existence d’autres êtres vivants de notre univers qui viennent nous rendre visite. J’ai eu la preuve irréfutable que des êtres intelligents viennent nous rendre visite. C’était en 1986 près de Todmorden au nord de l’Angleterre et j’ai compris que des anglais étudiaient sérieusement la question. À l’époque j’étais bizarre et cela n’intéressait mes proches. Maintenant le phénomène ovni (extraterrestre) est une vrai question aux USA avec confusion avec des drones.. Il y a une crainte de panique générale, ça se comprend. Perso j’espère que cette réalité sera présentée de façon habile et aidera les êtres humains à se situer dans l’univers.
Merci beaucoup pour vos activités et votre ouverture d’esprit.
Que tout soit bénéfique pour les êtres vivants de la planète terre.
Bien à vous. Annie Houlet
Sur internet kelsangdana@gmail.com