Le secret de Copernic
(Les Bâtisseurs du ciel, tome 1)
EDITION ORIGINALE
381 pages, JC Lattès, Paris, 2006 – ISBN 978-2709625968
“Le trait de lumière qui éclaire aujourd’hui le monde est parti de la petite ville de Thorn. ” C’est ainsi que Voltaire saluait le génie d’un homme dont l’esprit a effectivement révolutionné notre vision du monde. Et pourtant, en ce début de XVIe siècle en Pologne, lorsque Nicolas Copernic exerce ses multiples fonctions d’astronome, de médecin et de chanoine, les ombres sont menaçantes. Les Chevaliers teutoniques livrent leurs derniers combats, les royaumes cherchent de nouvelles alliances, la Réforme commence à fissurer l’Eglise… Au cœur de ces turbulences, Copernic va renverser les théories établies par Ptolémée et Aristote : la Terre n’est plus le centre de l’Univers, mais le Soleil ! Des ruelles de Cracovie aux universités de Bologne et de Florence, des ateliers de Nuremberg aux couloirs du Vatican, des voyages avec Dürer aux intrigues conduites par les Farnèse, ce roman qui mêle avec vivacité la science et l’histoire nous propulse dans une époque de grands changements et nous éclaire sur les débats théologiques et scientifiques de ce temps.
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EDITION DE POCHE
Livre de poche LGF, Paris, 2008 – 978-2253120285
“Le trait de lumière qui éclaire aujourd’hui le monde est parti de la petite ville de Thorn. ” C’est ainsi que Voltaire saluait le génie d’un homme dont l’esprit a effectivement révolutionné notre vision du monde. Et pourtant, en ce début de XVIe siècle en Pologne, lorsque Nicolas Copernic exerce ses multiples fonctions d’astronome, de médecin et de chanoine, les ombres sont menacantes. Les Chevaliers teutoniques livrent leurs derniers combats, les royaumes cherchent de nouvelles alliances, la Réforme commence à fissurer l’Eglise… Au cœur de ces turbulences, Copernic va renverser les théories établies par Ptolémée et Aristote : la Terre n’est plus le centre de l’Univers, mais le Soleil ! Des ruelles de Cracovie aux universités de Bologne et de Florence, des ateliers de Nuremberg aux couloirs du Vatican, des voyages avec Dürer aux intrigues conduites par les Farnèse, ce roman qui mêle avec vivacité la science et l’histoire nous propulse dans une époque de grands changements et nous éclaire sur les débats théologiques et scientifiques de ce temps.
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TRADUCTIONS
El enigma de Copérnico (traduction espagnole)
Ediciones B, Barcelona, 2007 – ISBN 978-84-666-3397-0
Polonia, comienzos del siglo XVI. Los caballeros teutónicos libran sus últimas batallas, los reinos buscan nuevas alianzas y la Reforma empieza a agrietar la unidad de la Iglesia.
En medio de tanta turbulencia, Nicolas Copérnico, astrónomo, medico y canónigo. refuta las teorías establecidas por Tolomeo y Aristóteles al afirmar que no es el Sol el que gira alrededor de la Tierra lino al revés. Junto a su ayudante, Rheticus, publica su obra definitiva, Revolución de los Orbes Celestes. Sin embargo, la ambición impulsa a Rheticus a tomar decisiones que producen funestas consecuencias.
De las callejuelas de Cracovia a las universidades de Bolonia y Florencia, de los talleres de Núremberg a los pasillos del Vaticano, de los viajes con Durero a las intrigas de los Farnesio, esta novela combina hábilmente ciencia e historia, introduciéndonos en una época de grandes cambios e ilustrándonos acerca de los múltiples debates de su tiempo.
“El enigma de Copérnico, de Jean-Pierre Luminet, se devora como una novela cuyos héroes parecen amordazados por un siglo de conjuras. Pero el rasgo del genio finalmente consigue atravesar las brumas.” France Info.
Tajemnica Kopernika (en polonais)
M Wydawnictwo, Wroclaw, 2008 -ISBN 978-83-60725-82-5
O Segredo de Copérnico (en portugais)
Editorial Presença, 2009 -ISBN 978-972-23-4064-9
Sob a forma de uma biografia romanesca, O Segredo de Copérnico permitenos descobrir aspectos da pessoa que se esconde por trás da figura deste extraordinário pensador e da sua vida. No início do século XVI, em Cracóvia, Copérnico vive numa época controversa, exercendo as suas múltiplas funções de astrólogo, médico e de homem da Igreja. Ainda assim, Copérnico prossegue as suas investigações sobre a organização do Cosmos, tal como a haviam estabelecido Ptolomeu e Aristóteles séculos antes, derrubandoa e colocando o Sol no centro do nosso Universo. Este romance pinta com forte colorido uma época de grandes mudanças, iluminando os debates teológicos e científicos de então.
Koperniko paslaptis (en lithuanien)
Vilnius: Alma littera, 2014. Ð 352 p.
Traduction en lithuanien du “Secret de Copernic”
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DOSSIER DE PRESSE
Un « jongleur de planètes ». N’en déplaise à l’évêque de l’Ermlande prussienne, son neveu, Nicolas Copernic, sera bien plus que cela. Mais il lui en faudra toute l’agilité pour jongler entre ses activités de chanoine, de savant, et manœuvrer dans cette Europe des XVe et XVIe siècles, tiraillée entre les princes, les guerres, entre Rome et l’émergence des Réformés, pour éviter de finir au bûcher. Destiné à coiffer la mitre de l’évêque, Nicolas Copernic court l’Europe, de Cracovie aux universités italiennes, où il assouvit sa soif de sciences. Pas tête en l’air, mais dans les étoiles, il rêve de l’univers. Avec le soleil au centre, révolutionnant ainsi la vision du cosmos établie par Ptolémée et Aristote. Comment un homme a-t-il pu renverser quinze siècles d’astronomie ? L’auteur donne son point de vue en se plaçant dans la peau d’un maître de Johannes Kepler, l’un des premiers astronomes à adhérer aux théories de Copernic, mêlant fiction, comme la rencontre de Copernic et de Léonard de Vinci, et réalité. A travers ce roman historique, Jean-Pierre Luminet, astrophysicien, poète et romancier, nous plonge au cœur d’une période tourmentée par l’un des plus grands débats philosophiques de tous les temps.
Benoît Merlin, Le Monde des Religions, juillet-août 2006
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L’hommage à un grand homme de science
Jean-Pierre Luminet ne tourne pas autour de la vie et de l’œuvre de Copernic : il nous y plonge.
A en croire les spécialistes, les Français ne comprennent pas grand-chose au fonctionnement des sciences. Romancier, poète et astrophysicien, Jean-Pierre Luminet estime, lui aussi, que l’histoire des sciences, et surtout celle des grands nommes l’ayant forgée, demeure largement ignorée du grand public. D’où cette série romanesque intitulée « Les bâtisseurs du ciel » qu’il ouvre de splendide manière avec un ouvrage consacré à Copernic, avant d’aborder ultérieurement Kepler, Newton… Le secret de Copernic nous plonge dans la Pologne de la fin du XVe siècle. Né le 19 février 1473 à Torun, décédé le 24 mai 1543, Nicolas Copernic batailla pour faire admettre que, contrairement aux idées de l’époque, c’est le Soleil qui se trouve au centre géométrique du monde. Incompris de son vivant, peu lu de ses contemporains, ce génie qui permit de fissurer le système aristotélicien en montrant également que la Terre tourne sur elle-même, fut un homme d’un courage physique et moral exemplaire. Dans ce brillant roman très facile d’accès pour les néophytes, à qui l’on propose des dessins et des schémas, ainsi qu’une indispensable biographie des personnages, Jean-Pierre Luminet nous décrit un Copernic très tôt orphelin, luttant contre le mauvais sort et capable de satisfaire à ses multiples fonctions d’astronome, de médecin, et de chanoine. L’auteur ne néglige aucun aspect de la vie de ce bâtisseur du ciel salué à sa mort par Voltaire, et surtout pas ses blessures profondes, comme le fait d’avoir été écarté d’un poste d’évêque par le roi Sigismond Ier. Malgré l’adversité, Copernic témoigna d’une sagesse qui contrastait avec l’esprit belliqueux de son époque. Génie scientifique, il fut aussi l’un des premiers épistémologues à ouvrir la voie à la philosophie des Lumières. Il est servi ici par une écriture classique et un esprit encyclopédique d’une gourmandise intellectuelle à l’égal du sujet étudié.
Jean-Rémi Barland, Lire, été 2006
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Copernic intime
De lui, vous savez que c’est un Polonais à qui l’on doit une révolution scientifique, l’héliocentrisme. Vous savez aussi peut-être qu’il était chanoine à la cathédrale de Frombork (au nord de la Pologne) et que, récemment, son crâne aurait été retrouvé sous l’autel de ladite cathédrale. Mais saviez-vous que dans sa jeunesse, Nicolas Copernic était un bon vivant ? Que par amour pour lui, un homme s’est donné la mort ? Saviez-vous qu’au début de ses études à l’université de Cracovie il tenait la science des astres pour un monde « d’inepties et d’à peu près » ? Que ce n’est qu’à l’âge de 20 ans qu’il commence à se passionner pour l’astronomie alors devenue pour lui « comme ces olives venues d’Italie et présentées pour ouvrir l’appétit en début de repas. On en croque une, par mégarde, et sans qu’on sache comment, l’écuelle est vidée en un clin d’œil » ?
C’est en se penchant sur les détails de sa vie quotidienne, en s’intéressant au contexte scientifique, politique et religieux de l’époque que Jean-Pierre Luminet a choisi de nous conter Nicolas Copernic. Et le résultat est brillant. La plume de l’auteur, à qui l’on doit déjà plusieurs romans scientifiques dont Le rendez-vous de Vénus et Le bâton d’Euclide est ici plus énergique, plus colorée, plus sensible, voire plus féminine que jamais. Un seul mot : bravo !
Emilie Martin, Ciel & Espace, juillet 2006
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Ce nouveau roman de Jean-Pierre Luminet nous invite une fois encore à partager une histoire construite autour de l’astronomie, son domaine de recherche. C’est aussi Le premier, dans un projet de trois volumes, d’une série, «Les bâtisseurs du ciel», qui, après ce volume autour de Copernic, devrait nous permettre de rencontrer Kepler puis Newton. Il s’agit bien d’un roman, même si l’auteur prend soin à la fin de donner Les éléments historiographiques qui lui ont permis de construire une histoire autour de Copernic et de la façon dont il se convaincra de l’héliocentrisme, ce qui conduira à l’écriture des « révolutions des orbes célestes». Le récit est présenté sous forme d’un récit écrit par Michael Mestlin, un mathématicien astronome, à son élève Johannès Kepler. Mestlin était un élève de Rheticus, unique et fidèle disciple de Nicolas Copernic qui assura la promotion et la diffusion de l’œuvre de son maître. Par cette «généalogie» et par «le bâton d’Euclide» et ses possesseurs astronomes successifs, tel un bâton dans une course de relais, Luminet entend souligner les relations entre ces savants qui, eux-mêmes, eurent leur inspiration dans des précurseurs de l’Antiquité tels que Ptolémée, quinze siècles plus tôt. Mais le lecteur y trouvera avant tout le plaisir de la lecture d’un roman qui narre une vie exceptionnelle de ce médecin et chanoine, esprit universel et curieux de tout (on le trouve même intéressé par la monnaie comme, bien plus tard, Newton qui fut «earl of the mint»). Son énergie, son courage et sa sagesse sont exceptionnels et lui permettront de vaincre les hostilités pour faire passer son grand message. Le roman nous invite à suivre Nicolas, neveu du puissant évêque d’Ermlande, à travers sa formation en Pologne (Cracovie) et en Italie, qui lui permettront de faire de très nombreuses rencontres des grands de l’époque tout en affinant sa pensée, nourrie des observations antiques qu’il consultera notamment à la bibliothèque du palais Farnèse. Il connaîtra l’adversité et la déception, celle en particulier d’avoir été écarté d’un poste d’évêque, et la seconde partie de sa vie sera plutôt celle d’un reclus, qui est l’image la plus classique que l’on a habituellement de Copernic. Le livre est remarquablement écrit et documenté. Quelques illustrations soutiennent le propos scientifique. J’ai apprécié l’annexe où Luminet indique ses sources ainsi que l’indispensable biographie, qui nous permet de situer les personnages qu’il a été amené à côtoyer (ou que Luminet lui fait rencontrer!), ainsi que les personnages de l’histoire antérieure de l’astronomie, la part des histoires qu’il crée et lui semblent plausibles. Ce sont les éléments nécessaires d’un roman dont les femmes ne sont pas absentes, telle sa fidèle compagne Anna, qui l’accompagnera aussi dans la présentation de son œuvre.
Il s’agit d’une grande histoire d’un personnage exceptionnel, et je ne penserai plus à la révolution copernicienne sans penser à l’image de Copernic, de l’étudiant inspiré et engagé jusqu’au vieux maître bougon.
Etienne Guyon, Vient de paraître n°26, septembre 2006
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Comment la Terre devint une planète
“Sarmaticus astronomus qui movet terram et figit solem”. En écrivant ces mots en 1541, Melanchthon, grand théoricien du protestantisme et ami de Luther, les chargeait d’un ironique avertissement à l’adresse de Nicolas Copernic, né à Torun, Pologne, le 19 février 1473, mort le 24 mai 1543, à Frauenhurg, Pologne. Aujourd’hui, contrairement aux intentions de son auteur, cette phrase sur l’insolent astronome polonais représente le condensé le plus réussi et le plus populaire de la nature du bouleversement provoqué par la théorie copernicienne.
Dans l’ouvrage qu’il vient de publier aux éditions Lattès, Jean-Pierre Luminet retrace pour nous la vie de cet astronome polonais qui a découvert ce que tous les enfants apprennent aujourd’hui à l’école primaire: la Terre tourne autour du Soleil. En cela, il s’opposait à la conception classique de son temps, acceptée depuis l’Antiquité, celle de Ptolémée, qui mettait la Terre au centre de l’Univers et faisait tourner le Soleil autour d’elle. Pour apprécier pleinement la signification de cette découverte, il faut se replacer dans l’esprit du temps, à un moment où la Renaissance commençait tout juste à se dégager du Moyen Âge. La révolution copernicienne ne peut être jugée hors de ce contexte. En ne mettant plus la Terre, donc l’homme, au centre de l’Univers, elle portait un coup très grave aux conceptions religieuses médiévales.
Des ruelles de Cracovie aux Universités de Bologne et de Florence, des observatoires de Nuremberg aux couloirs du Vatican, des voyages avec Dürer aux intrigues des Farnese, ce roman qui mêle avec bonheur la science et l’histoire, nous propulse au cœur d’une époque de grands changements et nous fait revivre les débats théologiques et scientifiques de ces temps de métamorphose. Une époque qui n’est guère favorable aux audacieux tel que Copernic puisqu’elle voit en 1517 la rupture de Luther avec Rome, en 1538 l’excommunication de Henri VIII et en 1542 la création du Saint-Office ! L’auteur nous raconte avec passion toute l’histoire du De Revolutionibus Orbium Cœlestium, l’œuvre qui ne devait sortir de presse qu’au moment où une maladie clouait Copernic au lit. Cet ouvrage, imprimé à l’heure de la mort du génial astronome, à la rédaction duquel il consacra plus de vingt années de son existence, fut édité d’une façon contraire à sa volonté.
Jean-Pierre Luminet nous fait revivre ce drame – car il s’agit réellement d’un drame – vécu par un savant qui a reculé pendant des années devant la décision de publier l’œuvre de sa vie. qui a refusé tout compromis et qui la voit finalement sortir des presses de l’époque contenant à la fois sa lettre adressée au pape Paul III dans laquelle il présente sa théorie non pas sous la forme d’une supposition mais d’une affirmation, et d’une préface anonyme proposant ses idées comme une vague hypothèse !
Ce roman qui retrace la vie et l’œuvre de ce génie qui fut astronome, médecin et chanoine, doit figurer dans la bibliothèque de tout homme curieux des sciences.
Paul Devuyst, Athena n°222, juin 2006
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Reprenant le projet d’Alexandre Dumas : “Instruire en divertissant”, Jean-Pierre Luminet nous livre le premier volume de la grande saga de l’astronomie qu’il a entrepris d’écrire. L’auteur nous avait déjà proposé deux “romans historiques” : Le Rendez-vous de Vénus, et Le bâton d’Euclide. Voici Le Secret de Copernic. Suivront Tycho Brahé, Johannes Kepler et Isaac Newton.
Quel que soit le sérieux avec lequel l’auteur ait préparé sa documentation, les puristes de l’Histoire vont probablement trouver qu’il a un peu trop laissé la bride sur le cou à son imagination : il s’agit bien d’un roman qui doit vous donner l’envie et le plaisir de le lire.
Mission réussie : il est difficile de refermer le bouquin… En fin d’ouvrage, on trouve les “Notes de l’auteur” qui nous renseignent sur les sources, hélas rares, qu’il a pu consulter, une “Table des personnages” donnant en quelques lignes l’essentiel de la biographie des personnages rencontrés ou cités au cours du roman, et un résume des “Systèmes du Monde de l’Antiquité à Copernic”. Sachez également que les archéologues ont exhumé le crâne de Copernic, et que les experts du Laboratoire central de criminologie de Varsovie ont reconstitué son visage! Le lecteur a donc droit en prime à la photo de Nicolas Copernic…
André Thiot, L’Astronomie, juillet-août 2007
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EXTRAIT
Dès le lendemain, l’évêque d’Ermlande et sa suite, dont son nouveau médecin et secrétaire Nicolas Copernic, partirent à Cracovie assister au couronnement de Sigismond Ier. Le médecin n’avait pas trop de soucis à se faire. À cinquante-trois ans, Lucas possédait une santé de fer et le temps semblait ne pas avoir de prise sur lui. À l’étape, il défiait son neveu à l’escrime. Il le désarmait systématiquement, de sorte que Nicolas finit par refuser tout affrontement, lui qui avait reçu les leçons des meilleurs maîtres italiens. Alors, à la grande joie des soldats, l’évêque luttait avec son fils Philippe, qui commandait l’escorte, et finissait toujours par lui mettre les deux épaules à terre. Copernic soupçonnait malgré tout son cousin de ne pas mettre trop d’ardeur au combat.
Si le médecin en lui devait rester inactif, en revanche, le secrétaire n’allait pas chômer. L’avènement de Sigismond Ier devait changer bien des choses en Pologne et dans les contrées vassales.
— Il faut que tu saches, expliqua Lucas à Nicolas alors qu’ils chevauchaient botte contre botte, que notre nouveau roi est un homme qui ne jure que par l’Italie et les idées nouvelles. Il rêve de faire de son royaume une nouvelle France, une terre d’art et de philosophie, attirant à elle les plus grands artistes et les plus grands philosophes. Tu devras lui plaire, mon neveu. Accrocher comme premier trophée à son tableau de chasse un Polonais qui vaut bien Pic de la Mirandole l’enchantera.
— Peste ! Comme vous y allez, mon oncle ! Je ne suis même pas docteur en médecine, et je n’ai rien publié.
— Epargne-moi ton humilité de curé de village, mon garçon. Je sais ce que tu vaux, et tu le sais aussi. N’as-tu pas en réserve quelque joli livre de philosophie à lui dédicacer, quelque chose de tout nouveau tout beau ?
Nicolas connaissait assez son oncle pour savoir qu’il jouait au rustre afin de masquer sa sapience de toute chose. Aussi, décida-t-il d’entrer dans son jeu et de jouer l’érudit face à l’inculte.
— Vous avez, je suppose, lu un jour l’Almageste ? fit-il en prenant des allures comiquement pédantes. Eh bien, pour ma part, depuis maintenant bientôt quinze ans que je le dissèque, que je le tourne et le retourne dans tous les sens en grec, en latin, et même en allemand, je reste désemparé par l’extrême complication de la mécanique céleste que Ptolémée et ses successeurs nous imposent depuis tant de siècles.
— Tu n’es pas le premier à le dénoncer, mon neveu, à ce que j’en sais. Détruire est parfois une bonne chose. Mais que construire à la place ?
— La simplicité, mon oncle, la simplicité. La nature ne fait rien de superflu, rien d’inutile ; elle sait tirer de nombreux effets d’une cause unique. Or, qu’ont fait les astronomes depuis l’Almageste, avec leurs adaptations, leurs paraphrases, leurs commentaires ? Des recettes de cuisine ! Un bricolage compliqué, fait de dizaines de sphères de cristal connectées entre elles par d’absurdes engrenages. Je comparerais leur œuvre à celle d’un homme qui, ayant rapporté de divers lieux des mains, des pieds, une tête et d’autres membres – très beaux en eux-mêmes mais non point formés en fonction d’un seul corps et ne se correspondant nullement –, les réuniraient pour en former un monstre plutôt qu’un homme. Hé bien non ! Au lieu de cette église biscornue qui ne tient debout que grâce à mille et un contreforts et arcatures, j’érigerai un temple antique, un toit, un simple toit soutenu par de fines colonnes. Et au centre, le tabernacle. Si Dieu est, comme je le pense, le plus grand des architectes, il a construit sa maison non comme un anonyme compagnon des temps obscurs, mais comme Brunelleschi.
— Abrège, mon garçon, et cesse de tourner autour du pot. On dirait que tu as peur de ce que tu veux me dire. Je ne suis pas ton professeur, moi, encore moins ton élève, je suis ton oncle. Alors ?
— Alors, tenez-vous bien au pommeau de votre selle, vérifiez si vos pieds sont bien engagés dans vos étriers. Car même un aussi bon cavalier que vous risquez de tomber à terre, après avoir entendu ce que je vais vous dire. Oui, j’ai peur. Quand, à Rome devant de grands personnages et les meilleurs savants du siècle, même devant mon maître Dominique Novara, je n’osais aller jusqu’au bout de mon raisonnement, je ne pouvais formuler les conclusions qui s’imposaient. Et mon auditoire non plus, comme si nous étions face à un mur invisible, qui nous empêchait d’aller plus loin, vers la vérité.
Lucas regardait son neveu comme s’il le découvrait pour la première fois. Nicolas, en effet, avait abandonné son ton léger et pédant pour une étrange exaltation qui faisait vibrer sa voix, d’ordinaire grave et posée. Alors, l’évêque, lui aussi, eut peur de ce qu’il allait entendre et qu’il croyait deviner comme un fantôme dans le brouillard.
— Durant de longues années, poursuivit Nicolas, j’ai collecté toutes les observations faites au fil des siècles. J’ai lu et relu tous les philosophes qui traitaient du sujet. Et aujourd’hui, si mon âme est encore tourmentée par le doute, ma raison, elle, est sûre d’avoir atteint la vérité. Cela paraîtra difficile ou même incroyable ; mais, avec l’aide de Dieu, je le rendrai plus clair que le Soleil, du moins pour ceux qui ne sont pas étrangers aux mathématiques.
Il reprit son souffle en aspirant une large bouffée d’air. Là-bas, à l’horizon se profilaient sur leur colline, les tours et les clochers du château Wawel. Dans une heure, ils pénétreraient dans Cracovie.
— Ma raison me dit que le Soleil est au centre de tout, au centre de l’univers. Que la Terre tourne autour de lui, comme Mercure et Vénus devant elle, comme Mars, Jupiter et Saturne derrière. Que la Terre tourne aussi sur elle-même, sur son axe, ce qui nous donne l’impression fausse d’un soleil mobile et de la rotation des étoiles fixes. Mon oncle, je ne vous remercierai jamais assez de m’avoir envoyé en Italie. Car là-bas, j’ai compris que la Terre joue pour le monde le rôle de la tavoletta utilisée par Brunelleschi quand il découvrit les lois de la perspective. Mais une fenêtre mobile. C’est la mobilité du point de vue qui explique les mouvements apparents des planètes ! Cependant là, mon âme répond : « Qui es-tu, petit Copernic, pour déménager ainsi l’univers, et aller à l’encontre de toutes les apparences, de tous les savants, et même des saintes écritures ? »
Puis, se jugeant trop solennel, il eut un petit rire et ajouta :
— Ouf ! Cela va mieux. J’ai l’impression de sortir de votre confessionnal, Monseigneur !
— Par le sang du Christ, mon garçon, tu n’y vas pas de main morte ! As-tu déjà écrit quelque chose là-dessus ?
— Je m’apprêtais à le faire, à Padoue, pour aller ensuite l’imprimer à Venise, avec une belle dédicace au cardinal Farnèse, quand…
— Eh ! Nico ! Il me semble percevoir comme un reproche au fond de ta voix. Si je t’ai demandé de rentrer, c’est que j’avais besoin de toi dans la rude partie qui s’annonce. Mais, par Belzébuth, je ne m’attendais pas à me retrouver avec un jongleur de planètes, un anti-Ptolémée, un nouvel Atlas ! C’est trop gros, c’est énorme. C’est prématuré. Écris donc cela, mais ne le soumets qu’à des gens dont tu es sûr. Je ne pense pas que le nouveau roi de Pologne puisse se mettre une telle affaire sur le dos en ce moment. N’as-tu pas quelque chose de plus innocent, de moins… où figurerait ton nom ?
— J’ai ce qu’il vous faut, répliqua un Nicolas hilare, en sortant de ses fontes une liasse de papier broché par un ruban rouge.
C’était le manuscrit de sa traduction en latin des épîtres de Théophylacte Simocatta. Laissant la bride sur le cou de son cheval, Lucas se mit à le feuilleter, approuvant parfois d’une moue, puis riant à tel ou tel passage.
— C’est parfait, s’exclama-t-il enfin. Il faut publier cela. Dédicace-le donc à notre roi Sigismond.
— Non, mon oncle. Pour la première fois de ma vie, je vous désobéirai. Car c’est à vous et à vous seul que je veux offrir ce livre.
— Ma foi, pourquoi pas ? Tous comptes faits, ce serait de bonne politique Et pour ton histoire de la Terre tournant autour du Soleil ?
— J’y pense, mon oncle, j’y pense. Laissez-moi le temps. Car le temps, mon oncle, est avec nous.