Suite du billet précédent La révolution copernicienne chez les humanistes provençaux (4) : Gassendi et fin
De la Provence à Paris : Cassini Ier
Concluons ce récit en évoquant plus brièvement la vie et l’œuvre de Gian-Domenico Cassini (1625-1712), astronome d’origine également provençale. Né à Perinaldo, alors dans le comté de Nice appartenant au Duché de Savoie, il est éduqué au collège jésuite de Gênes. Ses brillantes aptitudes le font remarquer d’un riche amateur de Bologne, le marquis Cornelio Malvasia. En 1644, ce dernier l’engage pour travailler à l’Observatoire de Panzano encore en construction. De nombreux instruments sont mis à sa disposition et il côtoie les pères jésuites Giovanni Riccioli et Francesco Grimaldi, deux astronomes de grande notoriété qui complèteront son éducation.
La qualité de ses observations et ses publications astronomiques de valeur lui valent d’être nommé professeur d’astronomie et de mathématiques à l’Université de Bologne, en 1650. Il a alors vingt-cinq ans.
Dans les états sous juridiction de l’église catholique romaine, il est obligé d’enseigner l’astronomie de Ptolémée. Cependant, après l’observation suivie de la comète de 1652-53, il est conduit à adopter le système géo-héliocentrique de Tycho Brahe, déjà favori des jésuites (il n’adhèrera au modèle copernicien que sur le tard).
Expert également en hydraulique et en ingénierie, Cassini acquiert une telle réputation que le sénat de Bologne et le pape le chargent de plusieurs missions scientifiques et politiques. Mais c’est l’astronomie qui l’occupe principalement. Il découvre la grande tache rouge de Jupiter en 1665, et détermine la même année la vitesse de rotation de Jupiter, Mars et Vénus.
Sa notoriété franchit les frontières et, en 1668, Colbert, qui recherche des savants étrangers pour la toute nouvelle Académie des Sciences parisienne, lui offre d’en devenir membre correspondant. Cassini accepte. Colbert l’invite alors à venir en France pour un séjour de durée limitée, afin de l’aider dans la construction du nouvel observatoire.
Cassini arrive à Paris en août 1669 et collabore aussitôt aux travaux de l’Académie, modifiant les plans de l’architecte Perrault pour adapter le bâtiment aux observations astronomiques. Considéré comme le meilleur astronome de son temps, il est nommé directeur de l’Observatoire de Paris à la demande de Louis XIV, chargé d’en faire le plus important centre astronomique et scientifique de son temps – but auquel il parviendra. Avant même que l’Observatoire ne soit achevé, Cassini commence d’ailleurs ses travaux d’observation et de recherche, découvrant notamment deux satellites de Saturne (Japet en 1671, Rhéa en 1672).
Malgré les rappels du pape, il manifeste le désir de rester en France et sollicite une naturalisation, qu’il obtient en 1673. Il francise dès lors son prénom en Jean-Dominique. La même année il effectue la première mesure précise de la distance de la Terre au Soleil grâce à la mesure de la parallaxe de Mars déduite des observations de Jean Richer à Cayenne. Deux ans plus tard il découvre la division des anneaux de Saturne, dite de Cassini, et en 1684 deux nouveaux satellites de Saturne, Téthys et Dioné.
En 1679, il présente à l’Académie des sciences une cartographie de la Lune qui surpasse les cartes de Mellan et ne sera égalée en précision qu’à partir de l’invention de la photographie.
Entre 1668 et 1693 il publie un grand nombre de mémoires, dont des Ephémérides des satellites de Jupiter sur la base desquelles Olaus Römer, toujours à l’Observatoire de Paris, démontre pour la première fois, en 1676, que la vitesse de la lumière n’est pas infinie et en calcule la valeur (assez étrangement, Cassini refuse de l’accepter).
Vers 1590 il observe l’atmosphère de Jupiter et met en évidence sa rotation différentielle. Devenu aveugle en 1710, il meurt deux ans plus tard à Paris à l’âge de 87 ans.
Son fils, Jacques Cassini, lui succède, et trois générations de Cassini régneront à la tête de l’Observatoire de Paris durant une période de 122 ans. L’ancêtre, Jean-Dominique Cassini, sera désormais désigné sous le nom royal de Cassini Ier…
Pour conclure
Le changement radical de conception cosmologique, parachevé en 1687 dans les Principes mathématiques de la philosophie naturelle d’Isaac Newton, est le prolongement logique des épisodes relatés ici, dont ceux concernant Peiresc et, dans une moindre mesure, Gassendi, sont peu ou mal connus des historiens. Ce sont pourtant ces aventuriers du savoir qui ont poursuivi la révolution entamée au siècle précédent par Copernic et ouvert la voie à la civilisation moderne. Non contente de révolutionner l’astronomie et la science en général, la nouvelle philosophie issue de l’astronomie copernicienne, puissamment développée par Kepler et Galilée et propagée en Europe par les humanistes provençaux du XVIIe siècle, a imprégné les autres domaines de la pensée humaine et conditionné l’évolution ultérieure de la société occidentale. Newton, qui cherchait Dieu dans la Nature comme dans les Écritures, a paradoxalement laissé derrière lui un monde dans lequel la religion n’est plus aux commandes. Comme je l’ai écrit dans l’introduction à ma série historique Les Bâtisseurs du ciel : « Avec [Newton], la science a contribué à décomposer la lumière de la foi qui jusqu’alors dominait la pensée. Libre, elle a emporté l’humanité aux confins de l’univers, lui faisant toucher la petitesse et la touchante fragilité de sa planète ».[i]
Le XVIIIe siècle qui a suivi verra le triomphe des théories de Newton, le temps d’une mécanique céleste parfaitement mathématisée, capable de prévoir le retour de la comète de Halley ou les détails de l’orbite lunaire, le siècle aussi où l’on découvrira au télescope la première planète invisible à l’œil nu (Uranus), celui où sera dressé le premier catalogue de nébuleuses et celui on l’on inventera le concept d’astre invisible, précurseur du fameux “trou noir” relativiste. Sur un plan culturel plus général, ce sera le siècle des salons d’intellectuels éclairés où l’on pourra entendre Voltaire, Diderot, d’Alembert et autres philosophes disserter avec aisance de science, de société, de mœurs ou de politique. Hélas, la grande majorité de nos philosophes et littéraires d’aujourd’hui sont bien incapables de discuter avec pertinence du big bang, de la supraconductivité ou de la gravitation quantique. Pour cause, le clivage désastreux entre scientifiques et littéraires qui s’est instauré à partir du XIXe siècle. L’un des buts (probablement utopique) de mon travail de chercheur et d’écrivain est de retisser en partie le lien perdu entre science, philosophie, art et littérature.
Notes et références
[i] J.-P. Luminet : Les Bâtisseurs du ciel (Copernic, Kepler, Galilée, Newton). Paris, J.C. Lattès (2010)
Bonjour !
En cette nuit où il nous faut retarder les horloges d’une heure, autant retourner à la maison pour répondre au dernier billet de M.Luminet sur G-D Cassini. A chacun son heure de s’enivrer, palsambleu !
Je ne savais point que cet astronome était d’origine provençale, comme l’affirme, l’auteur de l’article.
Ma référence étant celle du Club d’astronomie Quasar 95 de Valmondois : « La dynastie des Cassini », qui précise :
« Le créateur de l’astronomie française, l’homme qui a mené l’Observatoire de Paris à son summum, et couvert de gloire scientifique la puissante couronne de France est ….. un italien. Jean Dominique Cassini est en effet né le 8 juin 1625 “Giovanni Domenico “, à Périnaldo, dans le comté de Nice, dépendant alors du Duché de Savoie – Piémont » (Fin de citation)
A quoi, j’ajouterai que le bourg de Périnaldo fut annexé à la France avec le Comté de Nice, en 1793, après la mort de G-D Cassini.
Fin de la série mais point d’adieu à la Venise provençale, rassurez-vous, cher conteur des étoiles !
Mais laissons là le surintendant des eaux, de Bologne, envié par Colbert et Le roi Soleil pour s’envoler à tire-d’aile vers votre si édifiante conclusion.
Le lecteur lambda plus ou moins curieux se rend bien compte que les aventuriers du savoir que nous découvrons dans « Luminesciences », à part Gassendi, ne sont pas mentionnés dans des ouvrages connus du grand public, comme « La Nouvelle Alliance- métamorphose de la science – » de Ilya Prigogine et Isabelle Stengers, par exemple.
Les Rotary-Club, les plateaux de télévision et leurs beaux parleurs ont quelque peu remplacé, aujourd’hui, les salons d’intellectuels éclairés où l’on ne trouvait oncques parmi ce beau monde cultivé Gavroche et Marianne.
Maintenant dire que nos philosophes et littéraires sont des béotiens qui ne connaissent rien à rien à la science (Monsieur Luminet ne va pas jusque-là!) c’est peut-être vrai pour une majorité mais il en est, quand même, qui sortent du lot et qui le font savoir.
Je pense à cette discussion dans un blogue non officiel entre Messieurs Dominique de Villepin et Régis Debray où le lecteur citoyen ordinaire peut apprendre des choses sérieuses.
Par ailleurs, Monsieur Debray s’est risqué dans l’incomplétude et s’en explique.
Le chercheur de profession, très bien informé sait parfaitement que les relations d’incertitude sont à la page du roman, autant dire de la vie. Alors, il se veut moderne Pénélope et le voici tisserand :
« L’un des buts (probablement utopique) de mon travail de chercheur et d’écrivain est de retisser en partie le lien perdu entre science, philosophie, art et littérature. »
Et sur le métier remettant son ouvrage, M.Jean-Pierre Luminet nous prépare ainsi à une société heureuse puisqu’il appartient à une cité d’être heureuse, comme l’écrivait Platon parlant du magnifique et du meilleur de tous les tissus produit en droit entrecroisement par l’activité politique(« Le Politique », 311 B7-C8, traduction de M.Dimitri El Murr)
Entre parenthèses deux mots : probablement – utopique
L’auteur, aussi musicien soit-il, j’en suis sûr, n’en voudra pas à son lecteur de laisser là le chat Murr et d’aller de ce pas interroger le chat souriant du pays des merveilles. (Voir la revue Littérature et Sciences humaines « Approches » n° 170 – juin 2017 consacré à l’improbable)
Pour y apprendre sous la plume de Guy Samama que la plupart des changements décisifs dans notre existence sont affectés d’un coefficient d’improbabilité, lui-même imprévisible et non mathématiquement calculable. Quant au calcul des improbabilités, il faudrait, cher Monsieur Luminet, y passer tout un été… avec Bachelard.
Et l’utopie…
Esprit es-tu là ? Souhaité dans une française démocratie qui sait qu’il en est de porteuses d’avenir, j’en donnerai la définition de Robert Musil, cité dans la revue « Esprit » 9-10, page 57 :
« Utopie veut dire l’expérience dans laquelle on observe la modification possible d’un élément et les effets qu’elle produirait dans ce phénomène complexe que nous appelons la vie ».(Fin de citation)
Disons que dans le fruit de Paul Celan quelque chose qui n’est pas vide continue d’être…
Mais comment en parler ? Et si la vérité est fille de la discussion, comme l’écrivait Gaston Bachelard dans sa Philosophie du non, la flamme d’une chandelle peut-elle éclairer une présence discutée par exemple au chapitre de l’approximation newtonienne (La valeur inductive de la relativité), où l’auteur en appelle à la formule de Schwarzschild pour exprimer ou élucider une position paradoxale de l’épistémologie relativiste ?
J’avoue donner ma langue au chat en laissant le lapidaire apprécier ou non le cristal du geste.
De son sanctuaire des sciences, quel oracle le savant des étoiles rendra-t-il en réponse aux interrogations des gens d’ici-bas ?
Comment ne point penser à cette auberge de l’autre jour, où votre serviteur déjeunais avec sa bande de croquants, à quelques lieues de là, en ce bourg où Voltaire a laissé son nom. ?
Nous devisions tranquillement sur tout et sur rien quand un sénateur vint nous saluer, tout sourire, et nous raconter quelques bons mots. Mais quid de la réalité de la vie de ces gens au sujet de laquelle, interrogé sur le vif du sujet, il nous a répondu quelque peu gêné qu’il ne pouvait rien changer. ?
Et les pauvres de trouver cela normal…Et les journalistes commensaux accompagnant l’édile au sortir de l’émission de faire preuve de condescendance, en s’adressant à notre tablée :
« Eh bien, vous allez faire une belote après le déjeuner ? »
Michel Moine qui fut à l’origine de la création de la station de radio toute proche aurait-il, de son vivant, sorti son pendule pour savoir sur quel livre nous allions deviser autour d’une table de campagne improvisée, à défaut de nous indiquer les remèdes à nos maux ?
Autre méthode sans doute, autre baguette et autre ballade…
A l’heureux trouvère de la voûte des cieux, notre moderne Uranie, de nous donner le la.
Bon dimanche d’octobre et
…à la bonne heure.
GARO
A l’occasion de mon premier billet de la série concernant Montaigne le Bordelais, une autre personne m’avait déjà raillé sur le terme “provençal”. Il est vrai, j’ai toujours eu une conception très élargie de “ma” chère Provence : le pourtour méditerranéen où règne la lumière irremplaçable du Sud, et qui va donc idéalement de l’Aquitaine au Piémont (je sais, il fait beau aussi en Croatie et en Grèce, mais il ne faut pas pousser trop loin). Je sais bien que ce n’est ni historiquement ni géographiquement “correct”, mais si j’avais été, dans une vie antérieure, quelque comte de Provence, peut-être aurais-je pris les armes – à défaut de diplomatie – pour faire valoir ma conception et étendre mon territoire…
Prendre les armes pour défendre un territoire, dites-vous !
Nous ne sommes plus aux temps d’un Charles Emmanuel ou d’un Victor-Amédée et le simple citoyen en ouvrant le journal, ce matin, lit que dans ma campagne, le cadre modèle d’une entreprise proche a dérobé en une bonne décennie, plus d’un million et demi d’euros.
Pour payer les études supérieures à sa petite famille, réplique l’accusé sur les bancs de la justice! Il est vrai qu’avec un salaire de dix mille euros par mois, on doit tirer le diable par la queue, palsambleu !
Même page, à côté, dans la ville où mon village a été annexé par décision administrative sans l’avis de la population, on apprend qu’un adolescent tout tranquille s’est fait attaquer par 4 jeunes voyous déambulant dans la rue.
Je ne parle pas de l’autre violence, celle, insidieuse et sournoise, qui laisse des gens survivre comme ils peuvent, avec des revenus et des retraites de misère, en milieu agricole et rural, par exemple.
Devant telle situation, que peut faire le savant, chercheur, tiers-instruit ou autre oubliant tel le grand Archimède, les exigences de la cité ? Féru de littérature et homme de science avisé, son but intensément chéri peut-il l’inciter à lever les yeux de ses figures géométriques et de ses vers de lai pour aller de ce pas montrer les dents sur les barricades, si tant est qu’elles existassent encore ?
Un prisonnier m’écrivait l’autre jour…Il se reconnaît comme révolutionnaire professionnel et me parle de ses années de vacances forcées en se bombant le torse pour la photo.Un chef d’État en Amérique du Sud demande sa libération. ..Toujours la même chanson !
Ami des sciences et des arts, orrez-vous, un jour, une envolée de colombes sur vos terres de Provence ? Si loin, si loin du cri sourd du pays qu’on enchaîne et des appels à la mitraille, aux fusils, à la grenade et au fardeau de dynamite des partisans…
Dans votre mouseîon (sans chapeau au Musée des-sciences-en-culture), non point l’âme abusée ou désarmée mais enchantée, saurez-vous sans déplacer les montagnes, volatiliser, en l’occurrence, les chaînes de nos cavernes ? (Un autre refrain à composer…en ce lieu d’alliage où la langue tire la science).
La question est in-pertinente, je le sais ! Cependant, elle est posée au vulgarisateur scientifique,
cœur intelligent qui recherche la science (Livre sapiential des Proverbes, XV, 14)
C’est plutôt à moi de faire amende honorable avec ma faute à « votre serviteur déjeunait », verbe à l’imparfait qui prend ici un t final et non un s, bien entendu …Que les lecteurs me pardonnent ce manque d’attention à la relecture !
Quant à vous railler pour un Provençal au lieu d’un gascon, oh que nenni !
Garro qui ne manque point d’air n’avait certainement pas cette intention, mon bon Seigneur !
A bientôt, peut-être, sur vos erres.
Garo
Bonjour la compagnie retrouvée!
Oh là, vous allez loin, au delà des limites couramment admises!
Comment répondre en deux temps, trois mouvements, chef?
Bon coup de baguette pour un beau menuet à venir, peut-être!
Roxane
A l’attention de Monsieur Jean-Pierre Luminet,
de Monsieur Levent Yilmaz et de Monsieur Stéphane Paoli
A vrai dire votre lecteur sous son chêne, Monsieur Luminet, s’ennuyait fort en ne voyant rien venir à l’horizon de vos luminesciences automnales. Point de billet en Brumaire, et Garo de ramasser les feuilles mortes, triste de ne pouvoir se délecter de la manne tombée des cieux du savant de la nature des choses. Revenu à la maison dans une forêt d’informations entrelacées, j’ai aperçu une petite lumière du côté de Marseille et dans cette auberge moderne de rentrer incontinent sans sortir de ma chambre où le poêle à bois prodiguait une douce chaleur. Puis j’ai vu et entendu trois vaillants mousquetaires s’interroger, expliquer, douter et surtout partager avec la salle quelque chose qui n’a pas de prix, Monsieur Paoli à demander à l’auditoire de prendre la parole mais icelui a préféré garder le silence.
Grâce à vous, Messieurs les débatteurs, j’ai pu aller, de ce pas de côté, réveiller ma chambrette de livres au grenier. Quelques ouvrages choisis en rapport avec vos propos et descendus pour la bonne cause, comme pour les réchauffer de vos paroles.
Je ne résiste pas à l’envie de vous en dresser une liste non exhaustive, juste pour entendre autrement des refrains que vous connaissez par cœur, palsambleu !
« Ordres et désordres » de Jean-Pierre Dupuy, évidemment !
« Le hasard et la nécessité » bien sûr !
Et puis tous les ingrédients de la complexité, avec Edgar Morin…Émergence oblige, mon bon Seigneur ! Sans oublier les figures du temps et la chance de votre collègue de l’Alma mater, Monsieur le président et professeur Ivar Ekeland. Le système solaire ou trou noir d’Etiemble, l’essai sur l’organisation du vivant du biologiste Henri Atlan et pour faire plaisir à Monsieur Yilmaz, un essai sur une religion moderne d’un historien des idées et des formes littéraires et artistiques de l’Europe. Enfin pour couronner le tout – façon de parler un peu simplette!- un projet écrit pour Gavroche et Marianne d’un visionnaire homme d’État français, pour qui le temps a valeur d’instrument.
Que serait la parade sans un album, celui des contes de Charles Perrault ?
Allez, le compte est bon, et n’en parlons plus !
Pour autant, il ne messied pas de vous dire que votre auditeur, votre lecteur ne vous apprend strictement rien, il ne vous apporte la moindre nourriture avec toutes ses lectures étalées.
Les homéoméries et la neige noire d’Anaxagore de Clazomènes, aux pages des « Intuitions atomistiques » et de « La terre et les rêveries du repos » ne nous disent pas tout sur la rêverie d’intimité matérielle qui ne suit pas les lois de la pensée signifiante.
Autant lui dire de remonter ses livres bien sagement à votre croquant et de continuer à rêver tout tranquille dans ses coins de poétique de l’espace. Peut-être pour savoir des choses qui pourraient intéresser son hôte des beaux jours à venir, préfacier d’un livre susmentionné…
Ah, le hasard, mes bons seigneurs !
L’autre jour, j’apprends par le canon à images, dit le poste de télévision que la fille d’un correspondant ami de longue date vient de publier un deuxième livre, intitulé « Fille de révolutionnaires » Je m’empresse d’en faire l’acquisition et je le lis en prenant des notes, beaucoup de notes…J’ai traversé ce livre comme on traverse un pont sous ses six arches ou six chapitres…d’un bout à l’autre sans mot dire, sans maudire. Je veux dire de la citation, page 9, du Misanthrope :
« Plus on aime quelqu’un, moins il faut qu’on le flatte ;
A ne rien pardonner, le pur amour éclate. »
à la citation latine, page 312 « At last but not least ». On dira que la boucle est bouclée et sauf le hasard objectif de la jeune dame réaliste et pragmatique, qui croit aux anges gardiens.
Sa grand-mère, dans un livre paru en mil neuf cent soixante-dix-neuf, l’année de la publication du Pouvoir intellectuel en France, de son fils, écrivait : « puisque le hasard – ou le Ciel – »(Haendel, page 13)
Et maintenant, chers, très chers dispensateurs dévoués du savoir humain, sommes-nous plus avancés ?
Relisez la fin d’Intermezzo de J.Giraudoux, avant la tombée du rideau.
Et voyez notre jeune auteur (je n’écris pas auteure), aujourd’hui, du haut de son balcon huppé regardant passer dans la rue toute la misère du monde. Toujours la même chose…ou presque !
Que peut-elle faire, cette jeune femme riche ? Que pouvez-vous faire ? Que pouvons-nous faire ?
Il y a peu, quelqu’un de votre sérail s’est plu, par estime, à me transférer un courriel d’Uranie la Céleste destiné à Apollon. Elle écrit en substance :
« Aînée des sciences, l’astronomie démontre qu’aucune ne peut sans dépérir se priver des racines qu’elles plongent dans les profondeurs de l’âme humaine ».
Mais ce n’est qu’un oracle utopique à l’attention d’un dieu inexistant.
Avez-vous, aimables lecteurs de ce commentaire et instructeurs courageux du peuple, dans votre solitude, un beau jour de mil neuf cent soixante-seize, l’année de la disparition de l’auteur de « L’être et le temps » et de la naissance de l’auteur : « Fille de révolutionnaires », interrogé autour de vous, vos collègues de laboratoire, par exemple, pour essayer de comprendre ce qu’a voulu nous dire, cette année-là, le chef de l’État dans la conclusion spiritualiste de son projet, écrit pour Gavroche et Marianne ?
Un an plus tard, ce même président de la république française ajoutait une préface inédite à son ouvrage.Il précise : « Une civilisation n’apparaît pas à la sollicitation, moins encore pour répondre à la nécessité tactique, ou au besoin d’un « choc psychologique ». Elle vient de la rencontre de l’esprit et de la sève de l’espèce humaine. Elle s’exprime par la vision prophétique ».
Et aussi :
« Le temps viendra. Le temps, quatrième dimension de la relativité et sans doute dimension de l’homme d’État. Le temps dont j’ai appris la valeur de la leçon personnelle du Général de Gaulle. Le temps, seul passage entre la passion et la raison » . Il publiera, des années plus tard, un roman « Le passage »
Il écrivait ces mots en décembre mil neuf cent soixante-dix-sept, à Authon, dans le Loir-et-Cher.
Même mois, même année, naissait celui qui préside maintenant aux destinées d’une France en marche…Une fée peut-être, cette année-là, s’est penchée sur le berceau de l’enfant, un oiseau dans la voix.
Vous êtes, je crois, de bons marcheurs…Si d’aventure, sur vos chemins professionnels de connaissance, vous voyez s’allumer quelque lumière qui éclaire et n’éblouit pas, de grâce, faites-nous signe !
Pour l’heure, à défaut de marcher avec Thoreau dans les livres, je vais aller dehors marcher pour donner un peu de foin aux bêtes.
Espérons, en ce temps d’Avent qu’elle vienne enfin, la pluie longtemps attendue et ardemment désirée pour soulager, ici, l’intérieur des terres.
En toute allégresse.
Garo