Suite du billet précédent : L’univers holographique (4) : la conjecture de Maldacena
Des centaines de chercheurs ont exploré les conséquences de la conjecture de Maldacena, avec l’espoir que la dualité jauge/gravité, sous sa forme la plus générale, puisse établir une sorte de dictionnaire pratique entre les propriétés d’un système physique en gravitation quantique, décrit par la théorie des cordes dans un espace courbe de dimensionnalité élevée (la Matrice), et un autre système physique, plus simple celui-là, décrit quantiquement par une théorie de jauge sur l’enveloppe de la Matrice – espace plat de dimensionnalité moindre. Il existe notamment une approche en théorie M, développée en 1997 et baptisée BFSS[1], destinée à fournir une formulation numériquement calculable, qui a en outre le mérite d’établir un lien avec l’approche a priori différente de la géométrie non-commutative d’Alain Connes – pour plus de détails voir l’excellent billet de L. Sacco sur Futura Sciences.
L’avantage serait évident : certains calculs très complexes – voire impossibles – en gravité quantique pourraient être menés de façon plus simple dans le cadre de la théorie de jauge, comme on l’a vu dans le billet précédent pour l’évaporation quantique d’un trou noir dans AdS5. Inversement, quand les champs de la théorie quantique sont fortement couplés (comme dans le plasma quark-gluon, voir ci-dessous), ceux de la théorie gravitationnelle interagissent faiblement et pourraient être plus facilement appréhendés mathématiquement. Cette dualité forte/faible permet ainsi d’explorer des aspects complexes de la physique nucléaire et de la physique de la matière condensée, en les traduisant en termes de théorie des cordes à haut degré de symétrie, plus aisément traitable.
Les possibles réalisations de la dualité jauge-gravité font aujourd’hui l’objet d’ambitieux programmes théoriques, rattachés à trois vastes domaines de la physique :
- physique nucléaire, avec notamment l’étude du plasma quark-gluon (programme AdS/QCD)
- physique de la matière condensée, avec l’étude des états exotiques de la matière (programme AdS/CMT)
- relativité générale et cosmologie, avec les programmes Kerr/CFT et dS/CFT.
Développons brièvement chacun de ces programmes, en mentionnant leurs succès et leurs échecs. Continuer la lecture