Suite du billet précédent : Montaigne
La révolution galiléenne
Au cours des soixante années qui suivent la publication du De revolutionibus, seule une poignée d’astronomes répartis en Europe mesurent l’importance de la thèse copernicienne et s’attachent à la défendre, voire à l’adopter et à l’améliorer : William Gilbert et Thomas Digges en Angleterre, Galileo Galilei dans la très catholique Italie, Georg Joachim Rheticus, Michael Maestlin, Christophe Rothmann et Johannes Kepler en pays luthériens. Ils doivent cependant faire face aux virulentes critiques adressées à la doctrine du double mouvement de la Terre, jugée absurde. Reprenant l’argumentation d’Osiander, la majorité des savants de l’époque ne retiennent en effet de l’œuvre copernicienne que l’ingénieuse fiction mathématique permettant de faciliter et d’améliorer les calculs d’éphémérides célestes. En témoignent les nouvelles tables astronomiques dites Pruténiques, élaborées en 1551 par Erasmus Reinhold et s’appuyant sur la théorie héliocentrique, qui s’avèrent légèrement supérieures aux séculaires Tables Alphonsines fondées sur le système géocentrique de Ptolémée.
Ce sentiment de défiance est conforté par le Danois Tycho Brahé (1546-1601), le plus célèbre astronome de son temps réputé pour l’extrême qualité de ses observations. S’il admire l’œuvre du chanoine polonais, il ne peut en aucune manière adhérer au géocinétisme, raison pour laquelle il propose en 1583 un modèle dit géo-héliocentrique, système mixte dans lequel la Terre est immobile, la Lune, le Soleil et les étoiles fixes tournent autour d’elle, mais les cinq planètes tournent autour du Soleil. Ce confortable et astucieux compromis, qui lui permet de rester fidèle aux principes de la physique aristotélicienne et à l’interprétation théologique de la Bible, recueille rapidement l’aval de la majorité des astronomes, des philosophes et des théologiens de l’époque, qu’ils soient catholiques ou réformés. Continuer la lecture