Une étoile nouvelle fut observée en 1054 par les astronomes chinois : l’astre resta visible de nuit dura deux années, puis s’éclipsa.
Tout fut oublié jusqu’à ce que John Bevis, astronome amateur anglais, découvre en 1731 une nébuleuse dans la constellation du Taureau.
Au titre d’objet diffus, elle fut classée en no 1 dans le célèbre catalogue de Messier, et plus joliment baptisée « nébuleuse du Crabe » par lord Rosse, qui étudia sa forme en 1844. En 1919, à la faveur d’une traduction d’annales d’astronomie chinoise, le Suédois Lundmark fit le rapprochement entre cette brillante nébuleuse de gaz chaud en expansion et l’étoile nouvelle de 1054, situées dans la même région du ciel. En 1928, Edwin Hubble mesura la vitesse d’expansion de la nébuleuse du Crabe et lui attribua un âge d’environ 900 ans, en bon accord avec la « date d’explosion » de 1054. L’identification entre l’étoile en explosion et son résidu gazeux ne faisait dès lors plus de doute.
Aujourd’hui, la nébuleuse s’étend sur six années-lumière et se dilate à une vitesse d’environ 1 000 km/s, la masse totale éjectée étant estimée à 0,1 masse solaire.
En 1934, Walter Baade et Fritz Zwicky avancèrent l’idée que les neutrons pouvaient exercer une pression dégénérée capable de supporter une masse stellaire plus massive que la limite de stabilité des naines blanches. S’intéressant de près à la nébuleuse du Crabe comme résultant d’une explosion de supernova, ils supputèrent en son centre la présence d’une étoile à neutrons. Leur article fut oublié jusqu’en 1968, lorsque la découverte du pulsar PSR B0351+21 au sein de la nébuleuse du Crabe renforça l’hypothèse selon laquelle des étoiles à neutrons sont formées lors de ces explosions stellaires. La même année, l’interprétation du phénomène de pulsar en termes d’une étoile à neutrons magnétisée et en rotation rapide fut proposée par Franco Pacini et Thomas Gold. Astre condensé de masse comparable à celle du Soleil dans une sphère de 10 km de diamètre, le pulsar du Crabe tourne 33 fois par seconde en émettant un faisceau de rayons X et d’ondes radio.
Cette photographie me touche à plus d’un titre. Par son extraordinaire beauté bien sûr, celle d’un étincelant tombeau stellaire dont les éclats ensemenceront un jour des pouponnières d’étoiles en éléments chimiques lourds, ceux-là même qui forment nos chairs, nos os et nos sangs. Aussi par cette chaîne historique qui nous relie à un millénaire d’observation d’événements célestes exceptionnels, vus à travers le prisme de cultures et d’interprétations si divers. Mais encore et surtout par le pulsar que le phénomène a engendré, toupie magnétique au rythme implacable, gardien du temps dont le martèlement relie le cœur des hommes au cœur d’astres morts – pour ceux qui savent entendre le « noir de l’étoile ».
Très émouvante cette pulsation venue de si loin dans le noir de l’univers. Et cette image composite de la Nébuleuse du Crabe où un homme paraît porter un… métronome
Merci pour ces articles