El Hierro : 35 % d’EnR jusqu’à la mi-2020 puis 92 % en juillet sur l’île durable

Sur l’île d’El Hierro aux Canaries, l’archipel atlantique espagnol, le mix électrique a comporté 35 % d’énergies renouvelables (EnR) jusqu’à la mi-2020 soit durant les 6 premiers mois de l’année : un résultat qui n’est pas satisfaisant, même si le début d’année est connu traditionnellement comme « la saison des calmes », tel un voilier encalminé par l’absence de des vents. Il est bon de souligner qu’aucun problème technique sérieux n’a été relevé, depuis 2014 l’année de sa mise en service, dans le fonctionnement de la centrale électrique hydro-éolienne (de la société Gorona del Viento). Cette centrale originale est l’unique source des EnR de l’île quant à son mix ou bouquet électrique (la vidéo suivante est en espagnol).

Déjà auparavant, lors des 6 premiers mois de 2019, il y avait déjà eu certainement un recul sensible de la part des EnR dans le mix électrique de l’île, par rapport à 2018, pour ce même semestre.

De façon anticipée, Tomás Padrón qui est le père de la centrale hydro-éolienne m’avait confié que les tout premiers mois de 2019 avaient été caractérisés par la faiblesse du vent, une chose normale à cette époque de l’an (pannes des alizés) mais qui fut bien plus sensible cette année-ci. Ensuite les chiffres officiels de la REE parlent de 53,8 % d’EnR du 1er janvier 2019 jusqu’au 9 août c’est-à-dire qu’ils incluent, à partir du 1er juillet, une période fort venteuse de près de 40 jours.

Ainsi, malgré ce biais, il est facile d’entendre que les 61 % d’EnR enregistrés lors du premier semestre 2108 n’ont pas été atteints en 2019 ni a fortiori en 2020 pendant laquelle les EnR n’auront pesé finalement que 35 % dans le mix énergétique, lors de la même période de début d’année. Ensuite, au printemps, l’alizé se leva progressivement, et, en juillet de cette année 2020, on obtint 92 % d’EnR dans le mix électrique. Aucun de ces chiffres n’est publié sur le site de Gorona del Viento. Néanmoins, Tomas Padrón me les a donnés gracieusement. De façon indirecte dans le discours des responsables actuels de la société Gorona del Viento, il est aisé de comprendre que la part des EnR sur El Hierro devrait être plus importante pour atteindre le but, initialement affiché, de 100 % d’EnR.

« Actuellement, grâce à la centrale hydro-éolienne, le pourcentage en énergies renouvelables de la demande électrique de l’île se rapproche [sur l’année] des 60 %, un chiffre qui augmentera progressivement en même temps que la maîtrise du mix énergétique innovant se développe, en tenant compte qu’il s’agit d’un projet pionnier dont il n’existait pas de précédent et que cela suppose de relever de [nombreux] défis, depuis la construction jusque aux tâches de manutention. […] Néanmoins pour arriver à une satisfaction totale de la demande par les énergies renouvelables, il nous faut envisager d’autres technologies et des actions  afin d’augmenter la capacité de la centrale, améliorer son efficacité et mettre en place de [nouvelles] stratégies de manutention ou bien diminuer la demande électrique à long terme », affirme Santiago González, nouvel administrateur délégué de la société Gorona del Viento (propriétaire de la centrale hydro-éolienne).

La date limite pour la présentation des propositions d’amélioration de la part des énergies renouvelables sur l’île est d’un mois à partir du jour, le 21 juillet 2020, de sa publication sur le portail de passation des marchés  publics. Ainsi, l’appel d’offres est publié en ligne et il est facile d’y accéder, par un lien actif, sur le portail de Gorona del Viento.

Santiago González, nouvel administrateur délégué, depuis 2019, de la société Gorona del Viento qui possède la centrale électrique hydro-éolienne d’El Hierro. Canaries, Espagne. @ Gorona del Viento.

Depuis septembre 2019, un nouveau conseil d’administration (CA) est en place chez Gorona del Viento avec, comme président, Alpidio Armas qui dirige politiquement l’île, en tant que grand élu, et Santiago González, administrateur délégué. Le nouveau CA défendra les intérêts des 65,82 % des actions que le Cabildo insulaire – un canton qui aurait beaucoup de pouvoirs, au travers de ses élus – possède dans la société. La part restante des actions se subdivise ainsi : 23,21 % pour l’entreprise électrique Endesa qui elle-même appartient à la multinationale italienne Enel ; 7,74 % pour l’Instituto Tecnológico de Canarias (le concepteur scientifique et technique régional de la centrale) ; et 3,23 % pour le Gobierno Regional de Canarias. Ce vent nouveau vise à combler le manque d’investissements depuis la fin du mandat de Tomas Padrón en 2011.  Cette faille est aisément compréhensible : la crise économique de 2007-2012 est passée par là, étant particulièrement forte aux Canaries et donc encore plus sur El Hierro, son île la plus éloignée de la métropole espagnole ; puis un second effondrement correspondit en 2011-2012 à la crise sismique liée à l’éruption sous-marine, à très faible profondeur, du volcan Tagoro (en espagnol).

Le volcan sous-marin Tagoro en éruption en 2011-2012, à quelques encablures de la côte sud de l’île d’El Hierro. Au loin, la marque blanche du village de pêcheurs de La Restinga qui, pendant plusieurs longs mois, sera déserté car sa population fut évacuée par précaution. El Hierro, Canaries. © Universidad de Barcelona.

Maintenant mais en fait déjà depuis fin 2018, les prêts contractés, notamment par le Cabildo, pour la construction de la centrale ont été remboursés. Ainsi, la somme – de l’ordre de la dizaine de millions d’euros de bénéfices annuels – que la centrale dégage, pour la société Gorona del Viento et donc pour la communauté insulaire sachant le bon prix de rachat de l’électricité produite, permet de voir plus loin. D’autres actions, plus récentes, pour la collectivité seront aussi toujours soutenues : El Hierro 100 % recyclable et l’appui à la mobilité électrique. Cet ensemble de réalisations et d’actions constitue un package – mais je préfère de loin le mot de bouquet – écologique qui continue de séduire notamment les navigateurs à la voile, surtout les jeunes, y compris les français pour qui l’île d’El Hierro constitue une escale incontournable dans la transatlantique.

La vidéo tournée, en décembre 2019, sur et autour d’ El Hierro par l’équipage du voilier Oceanis 40, Les 4 Matelots (2 filles et 2 garçons, des élèves ingénieurs pleins d’énergie… renouvelable), est disponible en cliquant sur ce lien actif.

Toutefois, bien auparavant, El Hierro avait une riche histoire de conservation de son patrimoine naturel et humain ; l’île est, à la fois agricole et pastorale tout en restant traditionnelle, des traits rares aux Canaries, un archipel essentiellement exploité par un tourisme de masse. A ces titres, elle est, en sa totalité, Réserve de la biosphère de l’Unesco, depuis l’an 2000, et même ses fonds sont en partie exploités, de manière durable, par la pêche locale côtière basée au port de La Restinga, là où mouillent aussi les voiliers avant la traversée de l’Océan Atlantique. Bref, un modèle du développement durable, un chemin que trop peu ont emprunté avec décision au-delà des paroles, dès à la fin du XXème siècle (voir la vidéo suivante en espagnol).

La photographie mise en avant a été prise sur la rive du réservoir supérieur de la centrale hydro-éolienne d’El Hierro, lors d’un voyage scolaire en 2016 des lycéens de Jean Monnet de Montpellier et du Club Jeunes IRD. El Hierro, Canaries. @ M. Tapiau, IRD.

 

 

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