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Tenerife et El Hierro : les jeunes, le développement durable et les EnR

Ce mois d’octobre, la mission des jeunes, issus du Lycée Jean Monnet de Montpellier, sur les îles de Tenerife et d’El Hierro aux Canaries a bénéficié de l’éclairage de National Geographic Kids, grâce au journaliste et photographe Raphaël Baldos qui était déjà venu sur place travailler en 2012.
Dans l’ordre chronologique, le départ du bateau à voile Luna Blu de Planète en commun, escorté de Kaora, de Tanger au Maroc vers l’archipel des Canaries, l’Outre-Mer espagnol, a eu le lundi 15 octobre. L’ultime réunion générale le 18, avant la mission aux Canaries, s’est tenue au Lycée Jean Monnet de Montpellier entre les élèves, leurs parents, les professeures et moi-même qui, à l’IRD,  étudie le développement durable et le déploiement des énergies renouvelables (EnR). La date de mon départ fut le 19 octobre afin préparer sur place la mission sur El  Hierro et, d’abord, sa partie maritime en liaison avec la capitainerie du port de La Restinga et la petite compagnie de plongée Taxi Diver alors que le festival de photographies sous-marines (le 22ème Photosub) y battait son plein. Les jeunes et leurs professeures se mettront en route de Montpellier le 25 octobre, très tôt, pour rejoindre Tenerife aux Canaries en soirée.

Port de La Restinga et bateau de pêche côtière de la Cofradia de Nuestra Señora de Los Reyes. El Pinar de El Hierro, Canaries. © A. Gioda, IRD.

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El Hierro : Réserve de la biosphère

Prises des miradors construits par Don Zósimo, sous les conseils de César Manrique dans les années 80 (une œuvre poursuivie ensuite), ces photographies sont faciles à faire sans danger. Ces miradors incarneraient, s’il n’étaient point des objets, la réserve de la biosphère car insérant l’homme dans le monde minéral et vivant.

L’an 2000,  toute l’île a été déclarée Réserve de la biosphère par l’Unesco, dans le cadre du programme MAB (Man and Biosphere), après avoir déposé, par ses élus, sa candidature.

El Hierro : le fait de la transition écologique et énergétique

Laissés de côté depuis les années 1970 par le boom touristique de l’archipel canarien, les représentants élus de l’île d’El Hierro (270 km, 10 000 habitants aujourd’hui) se trouvèrent, 20 ans plus tard, face à la volonté expansionniste de l’armée espagnole . Cette dernière cherchait d’y agrandir son emprise foncière afin d’installer des radars, profitant de sa position géographique la plus avancée dans l’Atlantique de l’archipel et de la clarté de ses ciels , conséquence de la faiblesse de sa population et des activités humaines.

Prendre son destin en main ou devenir autonome signifièrent pour la population faire le choix de l’indépendance énergétique. Un parti insulaire appelé Agrupacion Herrena Independiente (AHI), membre de la Coalition Canarienne qui gouverne la région autonome de l’archipel, avait pris par la voie électorale le pouvoir sur El Hierro dès 1987 et le conserva, sauf de courtes interruptions, jusqu’en 2011 . Ce parti présentait la particularité d’être animé, jusqu’à 2012, par le responsable de l’unique centrale énergétique de l’île, alors propriété de l’Etat, et fonctionnant au fioul. Cette conjonction technico-politique favorisa la transition énergétique qui prit plus de 30 ans nécessaires pour concevoir, financer et construire l’originale centrale hydro-éolienne à 100% alimentée par les énergies renouvelables. Toutefois le terrain avait été préparé par la transition écologique, déjà en route depuis les années 1940, qui fut un effort collectif consacré par le classement en 2000 de toute l’île en Réserve de la biosphère par l’Unesco pour les succès suivants : fortification des activités agro-pastorales avec les coopératives fruitière (bananes et ananas), laitière , fromagère, apicole et de pêche; reforestation avec des espèces locales ; plantation d’arbres fontaines  et pose de filets attrape-brouillard ; redécouverte, sauvegarde et réintroduction d’un rarissime lézard géant endémique…

Ensuite, pour réussir la transition énergétique , il fallut implanter 5 éoliennes de 2,1 MW chacune, réaliser le dessalement de l’eau de mer en utilisant leur énergie, bâtir une centrale hydraulique de 11 MW avec 4 turbines Pelton prenant leur relais en cas de panne de vent et donc construire deux réservoirs, à des altitudes différentes, fonctionnant en STEP (Station de Transfert d’Energie par Pompage).

D'un volume de 500 000 m3 et installé dans l'étage du brouillard près de l'arbre fontaine, le réservoir supérieur permet une chute d'eau de plus de 600 mètres vers la centrale hydraulique
D’un volume de 500 000 m3 et installé dans l’étage du brouillard près de l’arbre fontaine, le réservoir supérieur permet une chute d’eau de plus de 600 mètres vers la centrale hydraulique. Février 2012. © A. Gioda, IRD.

Néanmoins tout cela ne veut pas dire mettre sous un cocon voire démonter l’ancienne centrale thermique au fioul, d’ailleurs installée sur un site très proche. L’objectif est un mix ou bouquet énergétique parce qu’il faut sécuriser l’approvisionnement de l’île.

Depuis plusieurs décennies, les îliens ont par conséquent considérablement changé leurs comportements avec des démarches concrètes et avant-gardistes de développement durable. De nos jours, la mobilité électrique et la fabrication de biodiesel commencent à se développer. Sur une île où par tradition les coopératives et les mouvements politiques et citoyens sont très actifs, il ne faut pas oublier la wifi gratuite partout dans les lieux de réunion tandis que l’éclairage public led se diffuse. Enfin, les sports au contact de la nature se développent y compris chez les îliens : trekking, chasse photographique sous-marine, parapente, voile .