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InSight à poste sur Mars

La sonde InSight de la NASA s’est posée sur Mars le lundi 26 novembre, dans les plaines volcaniques d’Elysium, avec deux appareils scientifiques en cours de déploiement sur la planète rouge : un capteur du flux thermique émanant du sous-sol martien (instrument HP3 de l’agence spatiale allemande), et un sismomètre français, conçu par le CNES et l’Institut de Physique du Globe de Paris, sous la houlette de Philippe Lognonné.

Le sismomètre SEIS vu en coupe, avec sa cloche extérieure qui protège l’instrument du vent (NASA)

On attend beaucoup de ce sismomètre SEIS, en cours de déploiement par le bras robotique sur le sol, à proximité de la sonde. Protégé du vent par une cloche, il devrait pouvoir déceler des séismes de magnitude 3,5 ou plus, à grande distance de la sonde (pour mémoire, un séisme de magnitude 3,5 sur l’échelle de Richter est tout juste décelable par un être humain s’il se déclenchait dans ses environs immédiats). On s’attend à ce qu’il y ait une cinquantaine de tels séismes sur Mars chaque année. Des séismes encore plus énergétiques, de magnitude 4,5 ou plus (sur Terre, de tels séismes font vibrer les maisons dans un rayon de plusieurs kilomètres autour de l’épicentre) devraient également survenir sur Mars une demi-douzaine de fois par an.

Modèle de l’intérieur de Mars, avec le manteau en brun et le noyau de fer en orange, dont on ignore encore s’il est solide ou liquide. (© IPGP/David Ducros)

Non seulement l’instrument français va nous donner une estimation précise du nombre de séismes sur Mars, mais en analysant les trains d’onde reçus—qui auront traversé en chemin l’intérieur de la planète—les planétologues devraient être capables d’estimer les épaisseurs respectives de la croûte, du manteau et du noyau. Les dimensions et l’état du noyau de fer au centre de la planète rouge les intéressent tout particulièrement. Comme ce noyau ne dégage plus de champ magnétique depuis très longtemps (environ 4 milliards d’années), la tentation est grande de penser que le fer autrefois liquide s’est solidifié, empêchant tout brassage générateur de champs électriques et magnétiques. Mais ce n’est pas si simple que cela : la partie supérieure du noyau peut encore être liquide, mais trop mince pour abriter de telles cellules de convection. Ou même être totalement liquide, mais pareillement « à l’arrêt », par manque de gradient thermique en son sein, car trop bien isolé du reste de la planète, et donc en état « isotherme ». On attend donc avec impatience les premiers tremblements… de Mars.

Pour en savoir plus : devenez membre de l’Association Planète Mars (APM). J’y consacre un article plus détaillé sur la sismologie martienne, qui paraîtra dans son prochain bulletin : planete-mars.com

Musk persiste et signe

Malgré ses déboires récents avec la commission boursière des Etats-Unis (pour déclarations frauduleuses quant aux actions de sa firme Tesla), Elon Musk poursuit la conception et la réalisation de sa super-fusée « martienne », la Big Falcon Rocket ou « BFR », capable de lancer 100 tonnes de charge utile vers la planète rouge.

“Relooking” du BFS—le second étage de style navette de la fusée géante BFR d’Elon Musk (© SpaceX)

Par rapport à la version précédente, le projet de lanceur qu’il a redéfini—dévoilé en octobre 2018 au Congrès International d’Astronautique—fait état d’un vaisseau spatial ou « navette » (BFS pour “Big Falcon Spaceship”) de 55 mètres de long, contre 48 mètres précédemment. Il sera équipé de sept moteurs Raptor à méthane et oxygène liquide (plutôt que six), l’idée étant de pouvoir transporter 100 astronautes d’un coup vers la Lune ou vers Mars, l’habitacle ne mesurant pas moins de 1000 mètres cubes, soit le volume habitable d’un Airbus A380. Et on notera l’apparition d’un troisième aileron à l’arrière—ailerons qui serviront également de pieds d’atterrissage, Elon Musk précisant qu’il avait été influencé dans ce choix par la belle symétrie de la fusée d’Hergé, dans l’Objectif Lune de Tintin : « J’adore le design de la fusée de Tintin », a avoué l’entrepreneur, « donc j’ai voulu me rapprocher de son concept. Si vous avez un doute, faites confiance à Tintin ! »

Quant au premier étage qui lancera l’engin, équipé de 31 moteurs Raptor, il développera une poussée de 5400 tonnes au décollage, soit presque deux fois la poussée de la Saturn V des vols Apollo. Musk estime le coup de développement de l’engin entre 5 et 10 milliards de dollars, et les tests de la partie Navette doivent commencer dès l’an prochain, courant 2019.

Le BFS a désormais pour toile d’arrière-fond la Lune, nouvel objectif affiché pour la nouvelle fusée. (©SpaceX)

La grande nouvelle est que le premier exemplaire de la fusée complète devrait voler dès 2023 autour de la Lune avec à son bord le mécène japonais Yuasaku Maezawa qui a pré-acheté le premier exemplaire de l’appareil.

Volontaire pour un premier vol autour de la Lune avec le BFS, Yuasaku Maezawa pose avec Elon Musk.

Quant à des vols habités vers Mars, Elon Musk avait autrefois fait état de dates similaires : 2022 pour un premier vol automatique ; 2024 pour un premier vol piloté ; il a aussi désormais annoncé la date de 2028 pour le début de la construction d’une base martienne. Musk est coutumier des effets d’annonce et de calendriers très optimistes. Affaire à suivre, car avec le génial entrepreneur, on n’a en tout cas pas le temps de s’ennuyer…

Lac sous-glaciaire sur Mars

L’annonce dans la revue Science de la découverte d’un lac souterrain sur Mars a fait grand bruit. Elle est l’œuvre de l’équipe italienne en charge de l’exploitation du radar de la sonde européenne Mars Express, avec à sa tête Roberto Orosei.

Un radar a la capacité de détecter de l’eau liquide en profondeur, car celle-ci (ou plus exactement l’interface de celle-ci avec les couches encaissantes, comme le roc ou la glace) réfléchit les ondes de façon particulièrement nette. Le problème a longtemps été la résolution du radar en question, incapable de détecter les petits détails : un « pixel » ou unité de mesure du radar de Mars Express représente environ 5 kilomètres et en outre, le logiciel du radar comprime les données avant de les envoyer vers la Terre, faisant une moyenne de plusieurs pixels et effaçant de fait tout point anormal—et donc intéressant—des données.

Les données du radar (à gauche) montrant les couches de glace et la lentille présumée d’eau saumâtre.

Les auteurs de l’étude ont feinté en ordonnant au radar de ne plus comprimer les données lors des survols de la calotte du Pôle Sud où ils soupçonnaient la présence de plans d’eau souterrains. Et c’est bien une tache de haute réflectivité de 20 km de diamètre qu’ils pensent ainsi avoir isolée, sous 1500 mètres de glace.

Une vue spéculative de à quoi pourrait ressembler le lac martien si on ôtait les 1500 mètres de glace qui le recouvrent : sans doute des flaques d’eau saumâtre chargées en sel, comme ici à Spotted Lake en Alaska.

Cela étant, ce n’est pas le Pérou : il faut bien comprendre qu’il s’agirait d’une lentille d’eau extrêmement mince—quelques dizaines de centimètres, sans doute—et surtout extrêmement froide. D’après les calculs, sa température devrait tourner autour de —70 °C (200 K), où un état liquide n’est possible que si l’eau est saturée en sels, notamment des perchlorates de magnésium et de calcium. Cette saumure frigorifique n’est pas exactement une oasis pour la vie. L’étude confirme en outre que l’eau liquide souterraine est très difficile à détecter avec les moyens actuels, et notamment que pour trouver de l’eau liquide plus chaude et moins saturée en sels, il faudra chercher plus profondément dans le sous-sol où le flux thermique de l’intérieur de Mars permettrait de plus hautes températures.

Molécules organiques sur Mars

La NASA vient d’annoncer la publication, dans le numéro de Science du 8 juin, de deux articles résumant les dernières découvertes de la sonde Curiosity qui explore le cratère Gale et ses sédiments lacustres depuis août 2012. Avec la mise en scène médiatique qu’elle aime bien utiliser pour attirer l’attention, l’agence spatiale claironne que ses chercheurs ont identifié, à partir des instruments à bord de la sonde et en particulier son spectromètre français SAM (Sample Analysis at Mars), des molécules organiques complexes et variées dans le sol martien. Un article parallèle confirme aussi la présence d’une molécule organique simple, le méthane (CH4), dans l’atmosphère de la planète rouge.

L’instrument d’analyse SAM, avant embarquement sur la sonde.

La sonde Curiosity avait déjà détecté des molécules organiques en début de mission, ou du moins les fragments de ce qu’il en restait après vaporisation d’échantillons et analyse. Les nouvelles données sont beaucoup plus précises et identifient les molécules : propane et butène, et surtout des molécules plus complexes, de type thiophène, benzène et toluène.
La NASA souligne bien que ces molécules organiques n’ont pas nécessairement—loin s’en faut—été produites par des organismes vivants. Mais leur concentration conséquente—10 parts par million, soit 0,001 %—prouve une fois pour toute que malgré les conditions adverses (oxydants, ultraviolet) à la surface de Mars, des molécules organiques existent sous deux à trois centimètres de sol.
Nous reviendrons ce weekend sur ces découvertes, après analyse des articles publiés dans Science.

Un “géologue” en route pour Mars

La NASA a lancé avec succès, le 5 mai dernier depuis la base de Vandenberg en Californie (belle photo de Andy Fortson), la sonde Insight qui a pris la route de Mars pour s’y poser le 26 novembre, dans la région volcanique d’Elysium Planitia.

Le site d’atterrissage d’Insight, près du massif Elysium.

Son objectif est de déployer au sol, grâce à un bras robotique, un sismomètre pour mesurer les séismes martiens et une sonde thermique qui devrait s’enfoncer plusieurs mètres dans le sol (avec deux mètres, on serait déjà satisfait) pour mesurer le flux de chaleur qui monte du sous-sol—un flux non pas géothermique, car on est sur Mars, mais « aréothermique », « aréo » étant l’adjectif consacré à Mars en grec, comme « geo » l’est pour la Terre. Ondes sismiques et flux de chaleur devraient permettre d’affiner notre modèle de l’intérieur de Mars, une planète qui devrait révéler un gros noyau de fer, enrobé d’un manteau pierreux et d’une croûte de laves assez épaisse.

La sonde Insight, son sismomètre sous cloche et sa “taupe” foreuse pour l’emplacement du thermomètre.

On se souvient que le lancement de la sonde devait avoir lieu en 2016 et avait été reporté en raison d’un problème avec l’un des deux instruments : le sismomètre construit par les laboratoires français avait développé un problème d’étanchéité. Ce problème résolu et la phase critique du lancement ayant réussi, il faut maintenant espérer que l’atterrissage sur Mars, toujours critique, se passera sans encombre…

Philippe Lognonné de Paris VII Diderot, et son “bébé” : le sismomètre français.

La NASA patine, Musk affine

Depuis l’élection de Donald Trump, la NASA fait du surplace. Le candidat de l’administration à la présidence de la NASA, le républicain Jim Bridenstine, a été rejeté par les démocrates, et c’est ainsi un président par intérim, Robert Lightfoot, qui est en poste depuis plus de 400 jours… et qui part à la retraite. On s’avance vers un nouveau président par intérim. Et pendant ce temps-là, la NASA continue à plancher sur son projet de nouvelle station spatiale quelque part autour de la Lune, qui ne sert à rien.

Robert Zubrin propose toujours des solutions pratiques à moindre coût (© J. Lee/Staff)

De leur côté, les critiques se font entendre. Robert Zubrin, président de la Mars Society, souligne l’absurdité de ce Lunar Orbital Platform qui sert à justifier, entre autres, la poursuite du coûteux programme de fusée géante SLS de la NASA. Or, Zubrin précise qu’une fusée bien moins coûteuse est aujourd’hui opérationnelle : la Heavy Falcon de SpaceX (Elon Musk). Elle pourrait d’ores et déjà poser 12 tonnes de charge utile sur la Lune (pour rappel, le LEM Apollo transportait l’équivalent de 5 tonnes : son étage de remontée). Un premier Heavy Falcon poserait sur la Lune du cargo (panneaux solaires, automobiles, système de télécom) ; le second un habitat avec vivres et outils ; et le troisième poserait l’équipage avec son étage de retour sur Terre. Le tout pour moins d’un milliard d’euros par an, contre l’équivalent de 100 milliards (sur dix ans) pour le programme Apollo.

La stratégie lunaire de Robert Zubrin, basée sur les fusées Heavy Falcon de SpaceX


Quant à Elon Musk lui-même, il consacre désormais toute son énergie, son argent et son staff au développement de sa nouvelle fusée BFR de 4400 tonnes (106 m de haut, 9 m de diamètre, 31 moteurs-fusées à la base), pouvant satelliser jusqu’à 100 astronautes d’un coup, dans un habitacle plus grand qu’un Airbus A380. Une fois ce vaisseau en orbite, d’autres tirs de fusées identiques, en mode « tanker », viendraient faire le plein de ses réservoirs pour un élancement soit vers la Lune, soit vers Mars (150 tonnes de charge utile, astronautes compris). C’est cette versatilité, y compris la desserte de la Station Spatiale Internationale et le convoiement de gros satellites, qui financerait l’engin.

Le BFR s’auto-financerait en lançant des satellites

Les agences nationales veulent-elles reconquérir la Lune ? La fusée BFR s’y prêtera de bonne grâce. Mais c’est l’exploration de Mars qu’Elon Musk a en ligne de mire, et il confirme 2022 comme première date pour un atterrissage sur la planète rouge de deux vaisseaux-cargos, sans équipages dans un premier temps ; et 2024 pour deux nouveaux vaisseaux-cargos ET deux vaisseaux avec équipages !

L’entrepreneur annonce des progrès en ce sens, notamment la mise au point de son nouveau moteur Raptor à méthane et oxygène liquide, déjà tiré au banc d’essai pour des périodes dépassant 100 secondes. Musk précise que 40 secondes de combustion suffiront pour un atterrissage sur Mars : pour ce faire, un seul moteur serait nécessaire, alors que l’astronef du concept BFR en possèdera six.

Fusée BFR sur Mars. Un équipage dès 2024 ?

Pour le retour depuis Mars, il faut fabriquer le propergol sur place—tous les scénarios martiens y font appel, depuis le révolutionnaire Mars Direct de Robert Zubrin—et la charge utile que le BFR pourra rapporter sur Terre sera comprise entre 20 et 50 tonnes.

De beaux projets ? Les machines-outils ont déjà été commandées et la construction du BFR commence cette année…

La Tesla de Musk en route pour Mars !

Lancement de la Heavy Falcon de SpaceX, le 6 février 2018

Elon Musk a tenu son pari. Mardi 6 février à 15h45 heure de Cap Canaveral, sa nouvelle fusée Heavy Falcon a fait rugir le feu par ses 27 moteurs et effectué avec brio son vol de qualification, devenant le plus puissant lanceur américain depuis la regrettée Saturn V des missions Apollo. Comme une horloge, le lanceur—constitué de trois fusées Falcon accolées—a gagné une altitude de 50 kilomètres et Mach 7, avant que ne se détachent les deux boosters latéraux, et 90 kilomètres avant la séparation du dernier bloc propulseur du premier étage et l’allumage du second étage. Ce dernier, propulsé par un seul moteur, a continué la mise en orbite, avec éjection de la coiffe à 115 kilomètres d’altitude et 4 minutes de vol : la décapotable Tesla d’Elon Musk, avec un mannequin d’astronaute (Starman) casqué au volant, est alors apparu sur l’écran du centre de contrôle avec la Terre en arrière-plan, sa radio de bord jouant Space Oddity, le tube de David Bowie, sous les acclamations de la foule au centre de contrôle.

À 115 km d’altitude, la coiffe de la fusée se détache, exposant la décapotable Tesla d’Elon Musk et  son mannequin au vide du cosmos.

Au bout de 7 minutes, la phase de propulsion était achevée, le second étage et son insolite charge utile ayant atteint 170 kilomètres d’altitude et la vitesse de mise en orbite.
Entre temps, les trois corps cylindriques du premier étage retombaient vers la Terre : les deux boosters latéraux vers le point de départ à Cap Canaveral, et le corps central vers une péniche dans l’océan Atlantique. Les deux premiers mettaient à feu trois de leurs moteurs pour freiner leur descente et de façon synchronisée, tel un ballet de l’espace, se posaient comme des fleurs sur le pas de tir 14, huit minutes après leur décollage. Seul le corps principal qui devait se poser sur la barge a raté son approche (un seul moteur sur trois s’est allumé) et s’est écrasé en mer.

Le retour triomphal des deux boosters sur le pas de tir de Cap Canaveral.

Et ce n’était pas fini : après six heures en orbite terrestre, le second étage s’est rallumé, envoyant la décapotable et son mannequin en direction de la planète Mars. Le propulseur en a même fait de trop, et il est fort à parier que l’engin passera Mars en trombe pour s’enfoncer dans la ceinture des astéroïdes et y diffuser le tube de David Bowie.
Nous reviendrons dans un prochain blog sur le sens et la portée de ce premier test réussi, avec sa pointe d’humour et de poésie, de la nouvelle fusée Heavy Falcon…

Elon Musk vise Mars !

La nouvelle fusée Falcon Heavy de SpaceX—société spatiale dirigée par le fantasque et génial Elon Musk—est sur son pas de tir de Cap Canaveral, prêt à partir dans une semaine… pour Mars !
Pour ce test inaugural de la plus puissante fusée jamais construite depuis la légendaire Saturn V des vols Apollo et la Navette, le milliardaire vise en effet la planète rouge. Il en a les moyens, puisque le lanceur développe une poussée de 2.300 tonnes (pour une masse au décollage de 1.400 tonnes) soit 3/4 de la poussée de la Saturn V ou de la Navette Spatiale. Le Falcon Heavy peut donc mettre 64 tonnes en orbite basse, ou lancer 17 tonnes vers Mars (ou poser environ 3 tonnes à la surface de la planète rouge).

Test sur le pas de tir, le 24 janvier, des 27 moteurs du Falcon Heavy.

Pour ce vol inaugural, rien n’est dit que ce complexe assemblage de 27 moteurs Merlin (3 fusées Falcon liées ensemble, avec 9 moteurs chacun) fonctionnera. Le 24 janvier, l’impressionnante grappe de moteurs fut mise à feu sur le pas de tir durant 10 secondes, le temps de voir si tout fonctionnait, et le Falcon Heavy passa ce premier test avec succès. Désormais, le lancement est officiellement sur les tablettes pour le mardi 6 février.

Elon Musk lui-même a averti journalistes et public que c’est un premier vol d’essai et qu’il y a un fort risque qu’il échoue: c’est la règle du jeu. En tout cas il espère que le décollage se passera bien, et a mis sur pied plusieurs événements pour observer le lancement: 195 $ par personne (buffet et champagne inclus) pour assister au lancement depuis l’ancien centre de contrôle des vols Apollo, à cinq kilomètres du pas de tir, ou bien 115 $ depuis le centre des visiteurs avec DJ et jeux de plage. Comptez sur Elon Musk pour mettre l’ambiance.

La décapotable privée d’Elon Musk (une Tesla) en cours de montage sur le second étage de la fusée.

Mais le véritable clou du spectacle, si tout le vol se déroule à la perfection, consistera en un second allumage du second étage qui mettra alors le cap sur Mars, avec pour charge utile… la propre voiture décapotable d’Elon Musk, diffusant par radio, tout au long du chemin, le tube de David Bowie, Space Oddity. Comme quoi on ne s’ennuie pas avec l’excentrique milliardaire…

Regardez cette image et passez en même temps la chanson Space Oddity de David Bowie…

 

Quitter enfin l’orbite terrestre !

Robert Lightfoot, président par interim de la NASA, vient d’annoncer la fin programmée de l’ISS (photo CNN)

La nouvelle est tombée en cette fin janvier : la NASA est décidée à mettre fin à la longue aventure de la Station Spatiale Internationale (ISS) en 2025. Cela laisse encore sept ans aux ingénieurs et aux scientifiques pour faire fructifier la Station, mais met un terme aux rallonges à répétition du programme. La motivation principale, c’est de transférer le gros du budget des vols pilotés vers le nouvel objectif américain : une petite station d’exploration à proximité de la Lune (Deep Space Gateway) dont l’assemblage pourrait commencer dès 2022, avec le retour d’astronautes américains autour de l’astre des nuits. Pour les supporters d’une exploration interplanétaire, humaine, c’est un bon signal, quoique la planète Mars n’est pas encore officiellement sur les tablettes. Mais il fallait d’abord prendre la courageuse décision d’arrêter l’ISS. C’est désormais chose faite.

Encore sept ans de service, puis au-revoir l’ISS…

Encore de la glace sur Mars

De l’eau sur Mars : ce n’est un secret pour personne qu’il y en a à la pelle, sous forme de glace, aux deux pôles—suffisamment, si elle fondait, pour couvrir toute la planète rouge (si elle était une boule lisse sans relief) d’une mer profonde de plusieurs dizaines de mètres. En l’état, vue la topographie martienne, cet océan se rassemblerait dans le grand bassin de l’hémisphère nord.

Falaises de glace aux moyennes latitudes photographiées par le satellite martien MRO. (MRO, Colin M. Dundas et al.)

Ce qu’un nouveau travail de recherche, dirigé par Colin Dundas de la US Geological Survey et ses co-auteurs, vient de mettre en évidence, c’est qu’il y a énormément de glace également aux latitudes moyennes de la planète, centrée vers 55° nord et sud, c’est-à-dire aux latitudes correspondant sur Terre à l’Écosse et au Danemark. L’étude a été conduite sur des images à haute résolution, prises par le satellite martien MRO, sur huit sites où le terrain a été érodé en falaises qui montrent une vue en coupe du sous-sol. Or y apparaît, sous moins d’un mètre de sol, une couche de glace épaisse de plus de 100 mètres. Il s’agirait de neige compactée, à l’époque où le changement climatique martien, bien modélisé d’après les calculs des « cycles de Milanković » de la planète rouge, aurait favorisé les précipitations neigeuses sur les hautes à moyennes latitudes plutôt que directement aux pôles.

L’une des falaises de glace, dues au changement climatique, a été observée dans le cratère Milankovic—quel à propos!—à proximité du volcan Olympus Mons. Installer une base à mi-chemin serait une aubaine pour les futurs explorateurs…

C’est une aubaine pour l’exploration humaine de Mars. L’accès à des ressources en eau pour la base serait automatique et facile près des pôles, mais gâché par la nuit hivernale très longue à ces endroits. Que des ressources similaires existent par 55° de latitude rend la colonisation beaucoup plus facile, avec des heures d’insolation satisfaisantes en toutes saisons. Même pas besoin de moyens sophistiqués pour atteindre la glace : il n’y a qu’à creuser quelques décimètres seulement. Quant à l’intérêt scientifique, il est tout aussi important, car carotter cette centaine de mètres de glace donnera un aperçu du climat martien sur le dernier million d’années—l’âge à laquelle cette glace a dû se former…

Test de forage martien en Islande, conduite par la doctorante Ali Bramson (université de l’Arizona).