Volcans : Vénus éclipse Mars !

éruption sur Vénus (vue d'artiste)
éruption sur Vénus (vue d’artiste)

Mars contre Vénus : le match était lancé depuis longtemps dans le coeur des planétologues, quant à qui, de la planète rouge ou de l’étoile du berger, nous livrerait les premières images d’une éruption volcanique en direct, autre part que sur Terre.  (Io, lune de Jupiter, est hors concours : elle est en éruption permanente sous l’influence marémotrice de la planète géante, ce qui est un sacré phénomène en soi).

Olympus Mons sur Mars deviendrait-il le premier volcan extraterrestre à nous émerveiller ainsi ? Or il semblerait que Vénus soit sur le point de remporter ce duel de titans, du moins si l’on en croit les dernières études infrarouges de la sonde européenne Venus Express.

 

Olympus Mons est le volcan martien soupçonné d'avoir abrité les éruptions les plus récentes sur la planète rouge. (NASA/JPL)
Olympus Mons est le volcan martien soupçonné d’avoir abrité les éruptions les plus récentes sur la planète rouge. (NASA/JPL)

Mars possède de magnifiques volcans, considérés très vieux pour la plupart, mais dont certaines coulées de lave paraissent dater de quelques deux ou trois millions d’années “seulement”—un clin d’oeil à l’échelle géologique, mais qui ne sont pas exactement contemporaines ! À ce rythme d’activité—sur le déclin car la petite planète rouge se refroidit très vit— les chances que notre génération observe une éruption sur Mars sont de l’ordre de 1 sur 20 000, à peu près la même probabilité que la Terre se fasse frapper par un astéroïde d’un kilomètre de taille, ou de gagner plus de 1000 € au Loto en ne jouant qu’une fois dans sa vie. C’est peu, et les planétologues avaient donc enterré leur espoir d’assister à une éruption martienne de leur vivant.

Le volcan Maat Mons, survolé par la sonde Venus Express (ESA/vue d'artiste)
Le volcan Maat Mons, survolé par la sonde Venus Express (ESA/vue d’artiste)

Pour Vénus, les espoirs n’étaient guère plus élevés. Malgré la plus grande taille de la planète soeur et la chaleur interne beaucoup plus conséquente, se traduisant par un très grand nombre de volcans à la surface de la planète, l’abondance de gros cratères d’impact n’ayant pas été renseveli par les laves faisaient craindre que tout neufs qu’ils paraissaient, les volcans de Vénus n’avaient pas fait éruption depuis des dizaines ou des centaines de millions d’années. L’espoir paraissait donc encore plus ténu de surprendre une éruption aujourd’hui sur Vénus, malgré quelques indices intriguants, comme une bouffée de dioxyde de soufre grimpant dans la haute atmosphère lors du survol de la planète par la sonde américaine Pioneer dans les années 1980, et plus récemment la détection d’une autre bouffée par la sonde européenne Venus Express en 2006.

Venus map with rift location (mid-res)Le site des bouffées de chaleur : Ganiki Chasma au nord de Sapas Mons

Ce sont les données de Vénus-Express, sonde de l’ESA, et notamment celles de sa caméra VMC (Venus Monitoring Camera) qui ont permis aux chercheurs Eugene Shalygin, du Max-Planck Institute de Göttingen, et Alexander Bazilevski et Jim Head de Brown University (USA) de détecter en infrarouge quatre anomalies thermiques dans le rift de Ganika (Ganiki Chasma) dans la zone volcanique d’Atla Regio, au nord des volcans Sapas, Maat et Ozza Montes (voir carte ci-dessous).
Ganiki Chasma
Trois des anomalies thermiques détectées dans Ganiki Chasma: à gauche, la carte thermique de Vénus-Express, à droite les objets chauds reportés sur la carte radar de Magellan, où apparaissent rifts et volcans.

Les anomalies montrent une émission thermique les 22 et 24 juin 2008. Lorsque la sonde a survolé la même région en octobre, les anomalies avaient disparu (ci-dessous).

Ganiki Chasma IR mapLes anomalies thermiques détectées par Vénus-Express et publiées dans l’article de Shalygin E. et al., Geophysical Research Letters, Mai 2015

Il est difficile d’estimer la surface de la coulée de lave responsable de cette émission thermique et sa température, les deux étant mélangées dans les données. Pour un kilomètre carré, les modèles annoncent 830 °C, loin au-dessus de la moyenne de 450 °C que le sol rayonne en permanence à cause du puissant effet de serre sur Vénus. Si on suppose une surface émettrice plus petite, la température pourrait même friser les 1400 °C. En tout état de cause, il s’agit d’une éruption de lave prise sur le fait, et qui serait vraisemblablement basaltique, sinon plus métallique et plus chaude encore (si les 1400 °C étaient avérés).

Vénus vient donc de voler la politesse à Mars et de se positionner comme la seconde planète volcaniquement active aujourd’hui, après la Terre. Félicitations à l’étoile du berger !

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