Archives pour la catégorie Dossiers

Volcanisme encore actif sur Mars

Les analyses convergent depuis deux ans – basées à la fois sur les images prises depuis orbite et sur la surveillance sismique au sol de la sonde InSight – pour suggérer que le volcanisme sur Mars est encore bien vivant.
L’essentiel du volcanisme sur la planète rouge a eu lieu lors du premier tiers de son histoire, entre 4,5 et 3 milliards d’années, avec les volcans de l’hémisphère Sud autour du bassin d’Hellas, le bombement volcanique de Tharsis et ses boucliers de lave géants dans l’hémisphère Nord, et ceux du bombement d’Elysium plus à l’est, dont l’activité principale a perduré jusqu’à quelques centaines de millions d’années seulement avant l’époque actuelle (et quelques millions d’années seulement pour quelques ultimes coulées de lave à leur pied).
Or, une ultime province volcanique s’est ajoutée à cette histoire, il y a environ 350 millions d’années, au sud-est d’Elysium, représentée par des plaines volcaniques et des fissures d’extension : la zone de Cerberus Fossae. L’aspect exceptionnellement jeune de cette province suggère là aussi une activité inachevée, avec des coulées de lave, voire des fontes de glace et des inondations, vieilles de deux à trois millions d’années seulement. Le choix de cette région comme site d’atterrissage de la sonde InSight de la NASA, porteuse d’un sismomètre français, n’y a pas été étranger.

La région de Cerberus Fossae, avec l’emplacement de la sonde InSight à gauche et le rectangle blanc correspondant à l’image de l’évent volcanique ci-dessous.


Non seulement la sonde InSight a détecté que l’activité sismique de Mars est actuellement focalisée sous Cerberus Fossae, mais les images orbitales de Mars Global Surveyor ont mis en évidence des fissures entourées d’un halo de cendres noires qui témoignent de récentes éruptions explosives : les chercheurs pensent que l’âge des éruptions est inférieur à 200 000 ans, voire autour de 50 000 ans seulement (la marge d’erreur étant encore assez large dans ce genre de photo-interprétation).

La fissure éruptive et son halo de cendres noires en forme de lèvre, photographiée par l’orbiteur Mars Global Surveyor (NASA/JPL/MSSS/The Murray Lab)


Dans un article publié le 20 octobre de cette année (2022), Jeffrey Andrews-Hanna et le Français Adrien Broquet, de l’université de l’Arizona, ont modélisé l’environnement géologique de Cerberus Fossae, en se basant notamment sur le champ de gravité qui permet de deviner la structure de la croûte et du manteau sous-jacent, et proposent un panache mantellique de type point chaud à l’œuvre sous la région, s’étendant sous la croûte en une galette de roche chaude de près de 4 000 kilomètres de large, fissurant la croûte et alimentant le volcanisme en surface.

Modélisation du panache (point chaud) sous Cerberus Fossae (©-ADRIEN-BROQUET-AUDREY-LASBORDES)

Amateurs d’éruptions insolites, mettez vos casques : vous savez maintenant où aller…

La Lune dans FUTURA

La Lune est à l’honneur dans le premier numéro du magazine FUTURA, en vente actuellement. Plus de 200 pages sur des sujets aussi variés que l’exploration de notre satellite, dont je décris l’histoire géologique ; l’ADN et les manipulations génétiques; l’agriculture mondiale, ses problèmes et ses solutions; et l’intelligence artificielle. À consommer sans modération!

Les nuages de Mars

Mars a des nuages. Cela pourrait étonner, dans la mesure où les media répètent à tort qu’il n’y a pas d’eau ou très peu d’eau sur Mars, et que l’atmosphère est quasi inexistante. Mais ce sont des propos tout relatifs. L’atmosphère martienne est bel et bien là : en regard de nos 1000 hectopascals (millibars), ses 7 ou 8 hectopascals paraissent insignifiants, mais ils sont suffisants pour porter et échanger de nombreuses molécules gazeuses à travers la planète, engendrer des vents, soulever des poussières et soutenir des nuages, aussi ténus soient-ils. Quant à l’eau, on sait qu’il en existe de grandes quantités sur Mars sous forme de glace, notamment aux deux pôles. Elle contribue une fraction minime, presque « symbolique » à l’atmosphère sous forme de gaz : cette vapeur d’eau représente une infime proportion de l’atmosphère (0,03 % en moyenne, contre 95 % pour le dioxyde de carbone, 2,8 % pour l’azote et 2 % pour l’argon), mais dans une atmosphère aussi raréfiée, c’est suffisant pour atteindre souvent un niveau de saturation et constituer des particules visibles que sont les nuages. Continuer la lecture

Achetez votre billet pour l’espace

À l’heure où le tourisme spatial va prendre son essor en 2020 –si aucun retard n’est pris dans les projets de vols suborbitaux de Virgin Galactic et Blue Origin– il est intéressant de spéculer sur l’évolution du prix du billet pour voler dans l’espace au cours des prochaines années et de l’évolution du marché potentiel.

Le vol suborbital

La cabine New Shepard de Blue Origin vous emmènera à 100 km d’altitude pour  250.000 $

Pour un vol suborbital d’un quart d’heure jusqu’à 100 kilomètres d’altitude, le prix du billet se négocie actuellement autour de 250.000 $ : autant dire qu’il faut vendre sa maison pour éprouver cinq minutes d’impesanteur et recevoir ses galons d’astronaute (attribués pour tout vol au-delà de 100 km). Il y a déjà 600 réservations fermes à ce prix, pour un marché estimé à 2 millions de personnes intéressées et assez fortunées. Si tout se passe bien, il faudra attendre une dizaine d’années pour que le prix se mette à chuter pour atteindre l’objectif avoué de 50.000 $ par personne, niveau où le marché est estimé à 40 millions de clients potentiels. Continuer la lecture

Cuisine martienne

Serre martienne (low res)

Dans tout vol piloté vers Mars—deux ans et demi aller-retour selon les scénarios les plus en vue—l’alimentation de l’équipage occupera une place importante. Nous avons vu dans un autre dossier l’approvisionnement en eau. Pour ce qui est de la nourriture, c’est 1,5 kg d’aliments secs (déshydratés) qu’il faut embarquer par astronaute et par jour, soit environ 7 tonnes de vivres pour un équipage de 5 astronautes sur une mission de 900 jours. Hormis l’aspect quantitatif, se posent des considérations d’ordre nutritionnel et psychologique. Enfin, l’installation d’une serre sur Mars est à l’étude, afin d’assurer une fraction non négligeable de cette alimentation.

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De l’eau pour Mars

De l’eau pour Mars

L’un des problèmes critiques dans les projets de vols pilotés vers Mars concerne le fret et les vivres à emporter pour la survie des astronautes—une masse qui atteint de hautes valeurs, vu la longueur de la mission—et notamment les réserves d’eau liquide. On parle beaucoup, en science, du sujet de « l’eau sur Mars ».  Dans ce dossier, nous allons au contraire nous pencher sur le problème de « l’eau pour Mars ».

Ravitaillement en eau dans la Station Spatiale Internationale (NASA)
Ravitaillement en eau dans la Station Spatiale Internationale (NASA)

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