Année spatiale cruciale 2019–2020

Le Crew dragon de SpaceX devrait emporter ses premiers astronautes fin 2019 ou début 2020 (crédit Hiyu Space)

La nouvelle saison spatiale 2019–2020 nous promet bien des émotions, à commencer par les vols inauguraux de la nouvelle armada américaine : les vaisseaux pilotés de nouvelle génération Crew Dragon de SpaceX (propulsé par le lanceur Falcon 9) et Starliner de Boeing (propulsé par Atlas 5), destinés à desservir la Station Spatiale Internationale. Ces lancements avec équipage sont attendus pour novembre 2019 depuis Cap Canaveral, sauf nouveau glissement du calendrier.
A déjà glissé en 2020, pour sa part, le vol inaugural du nouveau lanceur poids lourd de la NASA : la fusée SLS (Space Launch System) dont les retards et les dépassements budgétaires deviennent de plus en plus inquiétants. Reprenant les moteurs à hydrogène et les boosters à poudre de la Navette Spatiale, ce lanceur de classe Saturn V sera la pièce maîtresse d’un retour à la Lune des Américains, avec à son sommet la nouvelle cabine Orion, un « Super-Apollo » qui fera un simple vol sur une orbite haute, en attendant d’emporter des astronautes autour de la Lune en 2022. Tout nouveau retard ou échec pourrait sonner le glas d’une fusée qui a déjà englouti des milliards de dollars et sur laquelle comptent la NASA et le gouvernement Trump pour poser leurs astronautes sur la Lune en 2024.

La start-up Blue Origin de Jeff Bezos (Amazon) proposera un concept d’alunisseur à la NASA cette année.

Annoncé en mars de cette année, ce projet Artemis de retour « précipité » des Américains sur la Lune –le Pôle Sud étant visé– doit faire usage d’une petite station spatiale à proximité de la Lune, dont l’intérêt et la fonction sont par ailleurs très contestés, et d’un nouveau module lunaire dont les études préliminaires ont été lancées. L’appel d’offres pour cet alunisseur devrait être lancé cet automne, pas moins de 11 constructeurs étant sur les rangs pour emporter le marché, parmi lesquels les traditionnels Northrop Grumman, Lockheed Martin, Boeing, et Aerospace Rocketdyne, mais aussi les « start-up » SpaceX d’Elon Musk et Blue Origin de Jeff Bezos.
L’autre aventure à suivre de près en cette année cruciale est le développement de la fusée géante de SpaceX : la « Big Fucking Rocket », renommée Heavy Weight (pour son premier étage à 51 moteurs) et Starship pour le second étage qui pourrait en principe emporter plusieurs dizaines d’astronautes à la fois, et une centaine de tonnes de fret, vers la Lune ou Mars, après ravitaillement en carburant en orbite terrestre. Un prototype du Starship est actuellement en cours d’essais sur la base texane de SpaceX pour des séquences de décollage et d’atterrissage –car tant le premier étage que le Starship reviendront de poser sur Terre et seront réutilisables– et Elon Musk entrevoit un premier vol orbital de l’ensemble en 2020. Rappelons que si tout va bien, la nouvelle fusée emportera un client japonais, Yuasaku Maezawa, autour de la Lune en 2023. On connaît les calendriers optimistes d’Elon Musk, appelés à glisser substantiellement. Mais si la NASA continue de s’empêtrer de son côté avec sa fusée SLS, Elon Musk pourrait bien se poser au terme de l’année 2019–2020 comme le seul pourvoyeur crédible de vols pilotés interplanétaires, et arracher au passage le leadership du programme lunaire des mains de la NASA…