Le problème immense de l’accélération de l’Univers est-il enfin résolu ?

En mathématiques, on utilise souvent ce qu’on nomme un développement limité. Cela consiste à approximer une fonction suffisamment régulière par une série de termes dont chacun fait intervenir une dérivé d’ordre plus élevée que le précédent (la dérivé renseigne sur la vitesse de variation de la fonction).

Si l’on considère le facteur d’échelle de l’Univers – que l’on peut intuitivement penser comme sa taille si la courbure est positive – et son évolution en fonction du temps, on peut là aussi mener un développement limité de cette fonction.
Le terme d’ordre zéro de ce développement est connu depuis toujours : c’est l’existence de l’Univers.
Le terme d’ordre un de ce développement est la grande découverte du début du vingtième siècle : l’Univers est en expansion.
Le terme d’ordre deux de ce développement est la grande découverte de la fin du vingtième siècle : l’expansion de l’Univers est accélérée.

Voila où nous en sommes. Est-ce problématique ?
Le terme d’orde zéro est peut-être problématique au niveau métaphysique (qu’on pense à Leibniz et Heidegger) mais n’est pas paradoxal du point de vue physique.
Le terme d’ordre un, l’expansion de l’Univers, est tout sauf problématique ! C’est exactement ce que prédit la grande théorie d’Einstein, la relativité générale.
Le troisième terme est plus contrariant. On dit parfois qu’il est incompréhensible car la gravitation étant attractive (les galaxies s’attirent les unes les autres), l’expansion de l’Univers devrait être décélérée. L’Univers devrait, contrairement aux observations donc, s’agrandir de moins en moins rapidement puisque la gravité le freine.

Les choses sont en réalité moins simples. La dynamique du cosmos est décrite par les équations d’Einstein. Or, dans les équations d’Einstein, il y a deux termes en face du tenseur énergie-impulsion : le tenseur d’Einstein et le tenseur métrique. Ces deux termes ont une raison d’être tout à fait claire mathématiquement, ils ne sont pas ajoutés arbitrairement. Il ne sont pas inventés de façon ad hoc. Or, le second est ce qu’on nomme une constante cosmologique. Elle est naturellement présente dans les équations de la gravitation. Et cette constante est capable d’expliquer l’accélération de l’accélération cosmologique. Pas de problème de principe, donc, à rendre compte d’un Univers en expansion de plus en plus rapide avec la théorie relativiste de la gravitation. Sans aucune physique nouvelle ou exotique.

Il semble ainsi n’y avoir plus aucun problème ! Mais c’est aller un peu vite. Il faudrait aborder la question de la valeur de cette constante lorsqu’il est tenu compte des corrections radiatives. En l’absence de symétrie protectrice nous faisons face à un problème analogue à celui de la masse du boson de Higgs : elle ne devrait pas être si petite.
Mais disons les choses plus simplement. Le vrai problème n’est pas l’accélération modérée de l’Univers qui peut être expliquée sans difficulté particulière par les équations d’Einstein, comme je viens de l’expliquer. Le vrai problème est que l’espace cosmologique est empli de fluctuations du vide émanant de la mécanique quantique. Or ces fluctuations devraient engendrer une accélération absolument gigantesque, démesurément plus élevées que celle observée ! Voila l’immense problème. Tout gravite, c’est le principe d’équivalence. Mais il semble que les fluctuations quantiques du vide ne gravitent pas – ou presque pas. Pourquoi ? C’est sans doute une des questions les plus essentielles et ardues de toute la physique théorique.

Fluctuations quantiques du vide.
JFC – lactamme.polytechnique.fr

Il y a des voies pour échapper à ce paradoxe. Par exemple la gravitation unimodulaire. Mais aucune n’est pleinement satisfaisante. Or, récemment, le très grand physicien théoricien Bill Unruh et deux de ses collègues, ont proposé une nouvelle explication très attrayante (voir ici). Selon cette étude, les fluctuations quantiques du vide gravitent bien ! Tout se passe normalement. Mais l’effet sur l’évolution de l’Univers ne serait pas du tout celui que nous pensions. Au lieu d’induire une accélération démesurée, c’est exactement la petite accélération observée qui est prévue.

Le point nodal de cette étude repose sur la prise en compte de ce que l’amplitudes des fluctuations est elle même très fluctuante ! Contrairement à ce que la vision « moyenne » laissait entendre, il semblerait qu’en chaque point l’espace alterne entre expansion et contraction. A priori les comportements (les phases) de points même très voisins peuvent être différents. Bien que l’effet des fluctuations quantiques du vide soit effectivement immense, comme escompté, il n’est immense qu’à très petite échelle et devient presque nul – comme nous l’observons – dans le macrocosme. De plus, à cause d’une couplage paramétrique faible, on s’attend à ce qu’une légère accélération l’emporte, conformément aux observations.

Le modèle n’est pas sans faiblesses. Ces dernières sont d’ailleurs mentionnées – et en partie traitées – par les auteurs eux-même. D’abord, une « coupure » est implémentée dans les calculs. Or cette coupure n’est pas invariante de Lorentz : un observateur en mouvement verrait une autre coupure ! (Il proposent une solution à ce problème mais elle comporte elle-même des faiblesses théoriques, des « fantômes ».) Ensuite, le modèle est « singulier » : le facteur d’échelle local passe constamment par zéro. Il y a fort à parier que c’est ici la gravitation quantique qui apportera ses solutions.

Cette belle étude doit maintenant être passée au crible. Mais elle apporte un éclairage remarquable sur cette vieille question que je considère comme l’une des plus importantes de toute la physique.

14 réflexions sur “ Le problème immense de l’accélération de l’Univers est-il enfin résolu ? ”

  1. Merci pour cette explication lumineuse de l’article très ardu de William Unruh. C’est de la belle physique qui nous change les idées en cette période où les actualités nous inciteraient plutôt à nous retirer sur une île déserte.

  2. Bonjour,

    Cet article éveille ma curiosité, et des questions auxquelles je n’ai pas trouvé réponse sur internet :

    ? – L’accélération de l’expansion de l’Univers est-elle uniforme dans toutes les directions, et l’accélération est-elle linéaire ou fluctuante ?
    -> Avec cette théorie, il semble compliqué d’imaginer une accélération homogène et linéaire résultant des sommes de fluctuations quantiques du vide qui sont chaotiques et différentes en chaque point de l’Univers.

    Quelqu’un peut-il m’aider à comprendre ?
    Merci d’avance.

  3. Bonjour
    Quid de l’univers en expansion (rapide ou lent), ne peut-on imaginer un univers en contraction de l’autre coté du trou de ver du Big Bang ? Lui-même étant un gigantesque trou noir ?… D’autres parts comme tout gravite autour de tout dans l’univers, les 4 forces fondamentales à l,’œuvre ne seraient-elles pas simplement les forces centrifuges et centripètes qui les animent et interagissent entres-elles ? Et enfin ne peut-on imaginer des particules forcement invisibles à la masse quasi nulle voyageant plus vite que C ? D’où l’énergie noire ( informationnelle ? ) tant recherchée ? … Mais peut-être suis je hors sujet…

  4. Bonjour à tous
    Jacques
    La matière quantifier ce mécanise dans la forme d’une expansion
    Suivant une métrique ordonnée de deux formes de calcul opposer
    C’est sur ce référentiel que l’expansion à ce mouvement d’inflation
    Dans une autre métrique de x dimension la stabilité n’est pas quantique
    Elle est matière en une dualité de cause à effet.

  5. L’unification des théories quantique et de la relativité:

    L’univers dans son entier n’a pas de référentiel donc ,l’univers est soumis au même lois qu’il soit de la taille d’un atome ou du diamètre actuel car en application du principe de relativité rien n’a changé pour l’univers depuis le big bang. Le big bang est historique pour les habitant et le contenu de l’univers , pas pour l’univers.

    Bergson l’a déjà démontré : quelle est la durée du présent?Pour nous humain 1s ou 1mn mais pour un objet infini son présent est infini.

    De même pour la distance:Quand vous aviez un an vous atteigniez votre genou a la même vitesse qu’aujourd’hui.La distance est plus grande la vitesse la même mais vous avez grandi proportionnellement .

    Distance et temps sont des concepts qui n’existent pas pour la matière constituant l’architecture de l’univers.

    Les paradoxes de la théorie quantique ( dualité onde particule) sont ils la conséquence de la relativité de l’univers ?

  6. Si l’on pouvait créer mathématiquement une hyperbole comme le lien ci-dessous imbriquée dans une sphère. L’espace la plus étroite de l’hyperbole serait le mur de Planck, ensuite il y aurait expansion avec accélération, ensuite stabilisation dans les lignes tangentielles de la sphère, ensuite contraction dans l’autre sens pour en arriver au mur de Planck et on recommence. Ce ne serait pas du “bouncing” mais plutôt un cycle continue sans singularité. Tout ce cycle serait à l’intérieure de la grande sphère.
    https://www.google.ca/search?biw=1440&bih=769&tbm=isch&sa=1&q=hyperboloide+sph%C3%A9rique&oq=hyperboloide+sph%C3%A9rique&gs_l=psy-ab.3…66964.77074.0.77334.22.22.0.0.0.0.301.3814.0j17j4j1.22.0….0…1.1.64.psy-ab..0.13.2015…0j0i67k1j0i10i67k1j0i10k1j0i30k1.0.edTyK4j2Xco#imgrc=5Hi2lgJ26Ei50M:

  7. La gravitation est comme l’accélaration. L’univers est en expansion accélérée… se pourrait-il que la gravitation soit due à l’expansion de l’univers?
    Comment se fait il que je ne ressente pas l’accélération de l’univers?

  8. Et le prochain terme d’ordre trois pour ce début du 21ème siècle, c’est qu’il existe un contre-univers d’ordre 1/racine de 1 qui isole l’expansion et lui permet son accélération, à partir d’une transitivité commune d’ordre zéro: d’où la possibilité d’existence de l’anti-matière, mais pas dans le même ensemble espace-temps.
    C’est pourquoi on ne peut pas observer l’horizon futur de l’Univers, car l’ensemble négatif radicalaire provoque une contre-courbure et donc un virage: plutôt qu’un “rivage” infini de l’expansion et opposé à la direction vers l’instant singulier du big-bang.
    En fait, il suffit de dérouler la “chaussette” dans l’autre sens co-axial ou connexe: on parlera de théorie “connexe” de facteur 2/3 et 1/3.
    D’où l’émergence d’un quantisme cosmologique à l’échelle de l’Univers: on ne peut pas observer les champs 1/3 et 2/3 de particules en “même temps”.
    On évoque alors le concept “d’entre-temps” plutôt que d’espace-temps: et c’est à partir de ce moment “entre-temps”
    que la capacité consciente accède à l’information comme une possibilité de réflexion cérébrale: c’est-à-dire une “contre-résonance” que l’on définira comme un effet Tcherenkov cérébral qui permet de faire naître et de conserver l’amplitude de l’abstraction mathématique vécue comme un état résolutif et corporel lié au champ cognitif. On entre alors en “réduction” quantique par abstraction.
    En d’autres termes, on “cogne” sur la réalisation de l’Univers mais pas sur sa véritable réalité: d’où l’illusion bien réelle.
    La nouvelle notion à prendre n’invoque plus les termes d’espace ni de temps mais celui de “télescopage”.
    D’où l’impossibilité de donner un jour une définition infinie de “notre” Univers.

    1. je crois que tu te masturbes le cerveau, la moitié des phrases écrites ne veulent absolument rien dire.notamment l ‘avant dernière, un assemblage de mots sans queue ni tête, mon pauvre garçon sais tu qu’il existe quelques bons psys?

  9. En bref, il existe deux univers: la “cloche” et la “caisse”.
    Le professeur Tournesol dirait dans “Tintin et les musiciens du cosmos”: “n’entendez-vous pas l’aspect sonore de la forme de l’expansion? N’entendez-vous pas l’aspect sonore de la forme de l’expansion??”
    Il est vrai qu’il était un peu sourd, et que contrairement à Einstein qui fumait la pipe, de son côté, il utilisait un cornet pour “compenser” sa faiblesse au niveau de l’Ouïe.
    Juste un regard en bande dessinée: ça fait aussi du bien les petits dessins ludiques!

  10. Pourquoi projeter que l’Univers accélère?
    Il pourrait tout simplement s’effondrer sur lui-même à travers le jeu d’une double vitesse.
    En effet, le rayonnement du big-bang peut laisser penser que la matière est en expansion, alors que la “focale” du big-bang évolue en sens inverse.

  11. Bonjour.

    J’ai quelques questions qui me viennent sachant que je ne suis rien d’autre qu’un ignorant dans les domaines que vous traitez. M’accorderez-vous tout de même le droit de les poser et surtout d’y répondre?
    Si oui, en voici quelques unes.
    Si l’univers connu, fini et en expansion ne semble pas être homogène dans sa forme, comme semble l’indiquer les représentations que l’on s’en fait (différences de densité, de températures et représentation chaotique de l’éventuelle matière noire) peut-on imaginer que les forces qui entraînent cette expansion de plus en plus rapide puissent être extérieures à cet univers ? Peut-on imaginer que d’autres univers puissent interagir avec le notre? J’ai en tête l’exemple d’une pierre jetée à la surface parfaitement lisse d’un lac, cette pierre entraîne des ondes cylindriques parfaites. Pourquoi, si il y a eu un big bang ou un rebond de notre univers, celui-ci ne nous paraît pas homogène comme les ondes de ce lac? Serait-il envisageable que d’autres univers soient en interaction avec le notre ? Si je jette une deuxieme pierre dans ce lac, mes ondes parfaires créées par la première s’entrecroiseront. Enfin, si j’imagine qu’il n’y a pas qu’un seul univers mais une infinité, ce qui me semble envisageable, peut-on alors penser notre univers de la même façon que si il était unique? Enfin, si on parle de rebonds successifs ou même unique (une seule expansion après un seul big bang) comment imaginer que, dans un vide infini, cette expansion puisse cesser sans penser à une rive ou à des limites, représentées par des interférences de forces avec ces autres univers ? Merci

  12. Bonjour, je sais que vous travaillez avec Carlo Rovelli, j’ai regardé une de ses conférences où il explique que l’espace temps sont des granules formés à partir d’un champs. Ma question est donc, l’expansion de l’univers est il dû à une dilatation et donc un grossissement de ces granules ou bien se multiplient ils ? Merci par avance de votre réponse.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *