Ce petit billet est issu de 3 questions qui m’ont été posées par Christophe Pébarthe, Maître de conférences en histoire grecque ancienne à l’Université Bordeaux Montaigne, pour un interview destinée au mensuel du SNESUP.
1) Comment définiriez-vous la vérité en sciences Pensez-vous qu’une vérité puisse être qualifiée de scientifiquement démontrée ?
Déjà, je me réjouis qu’on pose la question de la définition et qu’on prenne conscience qu’elle ne va pas d’elle-même. Le premier affront fait à la vérité consiste à la supposer transparente et évidente. En réalité, le concept a drastiquement évolué à travers le temps et, à un instant donné, est également très variable d’une culture à l’autre. Et même au sein d’une société et d’une époque, il n’est pas sans variations essentielles entre différents modes de création ou de découverte. Je viens de relire « Le temps scellé » du génial réalisateur Andreï Tarskovski – son Saltker en dit autant sur le monde qu’une équation de physique quantique. Le mot Vérité y revient sans cesse, presque obsessionnellement. Mais il est parfaitement évident qu’il ne signifie pas la même chose que pour un physicien évoquant son modèle.
Dans l’hystérie contemporaine où les censeurs – de tous bords – veulent interdire la pensée critique et nuancée, je crois qu’il est essentiel d’entrer en résistance. Non pour jouer de nihilisme et contester la pertinence de la vérité, ce serait aussi dangereux qu’inepte, mais pour la prendre au sérieux en ne la caricaturant pas.
Je dirais donc que la vérité, en science, est un concept à strates. Il réfère d’abord à une adéquation entre une proposition et un état de choses. Mais, naturellement, il repose aussi sur des paradigmes linguistique, épistémologique et ontologique qui sont eux-mêmes susceptibles d’être remis en cause par l’énoncé lui-même ou d’autres découvertes/inventions. La vérité en science est à la fois un régulateur non-négociable – rien n’est pire que le mensonge et le déni des faits – mais elle est aussi partiellement un produit de l’élaboration. Qu’on le veuille ou non, les choses sont complexes et l’honnêteté intellectuelle consiste à le reconnaître et à le travailler. Le procès en « pseudo-science » ou « imposture » fait à ceux qui osent penser la subtilité de la situation, qui aiment et respectent la science au point de tenter d’en comprendre en profondeur les rouages et les mécanismes, est ahurissant, disons tragi-comique. Il faut croire que le fameux slogan militaire “chercher à comprendre c’est commencer à désobéir” a encore de beaux jours devant lui.
Il est en effet impossible de démontrer une assertion en sciences de la Nature. Pour la simple raison de toutes les théories sont fausses : elles seront remplacées par de meilleures propositions. Qu’un modèle fonctionne aujourd’hui ne permet jamais de « prouver » qu’il ne sera pas demain infirmé par une nouvelle expérience. Et quand bien même nous disposerions d’un hypothétique modèle parfait, on ne pourrait de toutes façons pas mettre en œuvre l’infinité des mises à l’épreuves qui seraient nécessaires pour en établir la véridicité.
2) Comment est-il possible d’articuler vérité et progrès scientifique, ou avancée des connaissances ?
L’idée de progrès est assez ambiguë. Il y a évidemment une amélioration des capacités techniques et une accumulation des données empiriques. C’est indéniable. Cela constitue-t-il pour autant un progrès au sens fort ? Par certains aspects, la technologie peut aussi devenir une régression. La fuite en avant d’une sur-production matérielle qui se prend elle-même pour finalité – niant les aspirations humaines fondamentales autant que le respect du fonctionnement vital de notre planète – m’effraie plus qu’elle m’enthousiasme.
Oui, il y a une avancée des connaissances. Au sein d’un « système du monde », les mesures et explorations théoriques permettent des améliorations. Il est évident que nous comprenons aujourd’hui mieux l’Univers qu’il y a un siècle. Mais il est délicat de comparer et d’ordonner les « systèmes du monde ». Je ne dis pas – je ne l’ai jamais suggéré – que tout se vaut. Contres les obscurantismes « à la Trump » qui menacent notre avenir et offensent l’intelligence la plus élémentaire, il faut évidemment convoquer les lumières de la science. Mais il est également important de comprendre que la lumière peut avoir plusieurs couleurs. De ne pas caricaturer pour contrer la caricature.
La vérité est souvent un critère d’évaluation pertinent. Il n’est pas question de s’en passer. Mais il n’est pas toujours suffisant. L’adéquation, par exemple, est un concept plus large qui doit être parfois convoqué. Tout ne se réduit pas à la supposé « véracité scientifique ». Il faut penser plus large. Non par laxisme mais par précision.
3) Si la science n’est qu’un mode d’accès au réel, faut-il considérer le créationnisme selon lequel une transcendance divine est à l’origine de tout ce qui est comme une vérité parmi d’autres ?
Je crois en effet qu’aussi magnifique soit-elle – je suis si fier et heureux d’être astrophysicien –, la science ne dit pas tout du monde. L’humilité élémentaire de cette posture suscite parfois l’irritation, pour ne pas dire la colère ou la haine. Comme si rendre hommage à la science consistait à dénigrer les autres modes de pensée ! Je ne céderai jamais à ce fascisme rampant et je maintiens que la science, d’ailleurs délicate à définir et évidemment protéiforme, partage avec les arts, la philosophie et la littérature le privilège de constituer une démarche nécessaire et remarquable, mais dans laquelle ne s’effondrent pas toutes les manières de comprendre ou d’appréhender le réel.
La science est trop belle pour qu’on lui fasse l’offense de la croire seule pertinente (être seul au monde c’est jamais désirable, même pour un monarque qui perd alors son empire). Les réductionnismes outranciers sont toujours naïfs (au mieux) ou malsains (au pire). La science est un ilot de sens et de modestie raisonnable dans le réseau de la pensée humaine. C’est immense. Elle doit être défendue et aimée pour cela. Mais elle n’est pas la totalité du rhizome. (J’empreinte, à dessein, disons par insoumission, le concept à Deleuze parce que la seule référence à un philosophe cette époque – dite postmoderne par ceux qui ne la comprenne pas, comme s’il s’agissait de l’insulte suprême ! – suffit à susciter d’hallucinantes mécompréhensions. Voir d’ailleurs ici ma défense de la déconstruction et quelques articles sur vérité et post-vérité ici et là).
Je pense effectivement que le créationnisme est une proposition stupide et dangereuse. Et, évidemment, scientifiquement intenable. Comment donc trancher si l’on dénie à la science la toute puissance hégémonique du savoir ? Au nom, me semble-t-il, de l’intention et de l’honnêteté. Soutenu par l’extrême droite et les lobbies du pétrole, le créationnisme n’est pas un doute digne et généreux. Il n’est qu’une projection de certains fantasmes de puissance. Il n’obéit à aucune éthique et c’est par là qu’il faut commencer à le combattre.
Le vrai n’est pas le réel, le vrai est un compromis entre le réel et l’idéal, disait Paul Eugène Louis Deschanel.
Le réel est un concept ontologique qui désigne ce qui existe en dehors et indépendamment de nous. Il se définit selon la thèse constructiviste, par rapport à celui d’une réalité empirique, et désigne ce qui existe pour nous, par et au travers de notre expérience. Supprimons par la pensée toute altérité avec le monde, il ne nous restera aucune réalité. Mais, il serait abusif d’en conclure que le monde ait disparu et que rien n’existe. La réalité doit, par conséquent, être différenciée de ce qui existe en soi. Ce qui existe en soi, indépendamment de nous, peut être nommé “réel”.
Cependant réalité et réel ne sont pas dissociables et sont les deux faces de notre monde, comme l’aigle à deux têtes de Jean Cocteau qui confronte une reine d’esprit anarchiste à un anarchiste d’esprit royal. A l’instar du dieu Romain Janus, dieu “des commencements” et “des fins”, des choix, du passage et des portes. Un véritable Multivers à lui tout seul.
Ce Janus qu’Ovide dans les fastes rapprochait de Chaos.
Dieu à double visage, c’est de toi que part l’année pour s’écouler sans bruit; toi qui, sans tourner la tête, vois ce que nul autre dieu ne peut voir, …., , et, d’un signe, ouvre-nous les portes de ton magnifique sanctuaire.
Bonsoir, j ai une question sur vos convictions écologiques. Vous faites un bilan de la catastrophe écologique et ce bilan est indiscutable. Les dinosaures ont disparu. Est ce que la catastrophe qui nous menace et qui est indiscutable n est pas finalement inévitable ? N est ce pas un nouveau pas dans l évolution de la vie ?
Vous dites que vous aimez les animaux et qu il faut moins consommer de viande… mais que donnez vous à manger à votre chat ? Est ce que le problème ce ne serait pas plutôt la souffrance annimale et l ethique dans les abattoirs plutôt que les moeurs alimentaires des uns et des autres… ? Vous avez accusé l alimentation carnée d etre responsable du coronavirus ne pensez vous pas qu il s agit de suppositions et non de faits ? Cele ne merite t il pas plus de prudence ? Je vous rappel qu on a abattu des milliers d animaux juste parce qu ils ont detecté le covid 19 c très triste que nos peurs et nos illusions entrainent la mort de ces innocents a cause de nos préjugés.
Vous opposez souvent la mecanique quantique a la relativité dans vos conférence et vous defendez la relativité alors qu elle est horrible… en effet les relativistes defendent une idee de la physique qui doit pouvoir tout predire … sans laisser de place a la liberté… alors que la mecanique quantique est venu foutre en l air cette conception liberticide ou tout est tracé a l avance et predictible … on sait maintenant grace a cette mecanique qu il est impossible de prevoir le futur… si tel est le cas comment pouvez vous prevoir le destin ecologique de l humanité ? Peut etre que la catastrophe qui vient est pire que ce que vous prevoyez ! Personne ne peut le savoir ou le dire… cela ne merite t il pas plus d humilité face aux climato sceptique ?
Enfin vous ne faites aucune proposition radicale ou structurelle pour sortir de la crise vous ne cessez de dire que des mesures liberticides sont necessaires et saluez les mesures contre le covid 19 mais ces mesures liberticides contre le covid 19 justement non seulement n ont servi a rien mais pire elles vont propablement entrainer la pire catastrophe de l humanite en terme economique. Mais quand est ce que vous allez arretez d opposer l ecologie a la liberté ? C complètement absurde sans liberté il n y a pas de vie et entre la liberté et la vie ou l ecologie c la liberté qui sera tjrs première… n est ce pas la lecon que vous tirez de la crise du covid 19 ? Moi j ai une proposition structurelle a vous faire et j aimerai votre avis sincere. Pour moi la crise ecologique que nous traversons est du a notre mode de vie sédentaire qui entraine un droit de propriété expansionniste et pas du tout ethique. La solution ne serait elle pas dans le fait de changer de mode de vie et de devenir tout simplement nomades ! Imaginez en hiver migrer dans le sud et en ete migrer dans le nord … en faite la solution c de faire tout l invrrse de ce qu on fait : ne pas fermer les frontieres aux migrants ne pas annuler les avions … au contraire il faut plus de flux on doit tous devenir des migrants c n est que comme cela qu on peut faire face aux changements climatiques qui nous menacent… mieux comme on a pas de droit de propriété vu qu on bouge tout le temps si on devient tous des nomades alors on aura plus de deforestation ou d exploitation animale. On mange ce qu on trouve… bref je propose le contraire de ce que vous proposez vous proposez de faire du local moi je propose de faire du cosmopolite du transnationale. Et de toute facon si on s habitue a bouger migrer on pourra plus facilement quitter cette terre si on developpe un programme spatiale pour coloniser l espace. Non ?
Tres cordialement
J’apprends vraiment beaucoup ici,