Le paradoxe de Fermi revisité

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Même si les détails anecdotiques n’en sont pas tous avérés, il semble que ce soit Enrico Fermi qui ait initié le paradoxe portant désormais son nom. De quoi s’agit-il ?

Lors d’une discussion informelle vers 1950, Fermi s’est étonné que compte tenu de la très probable existence de civilisations extraterrestres, nous ne retrouvions sur Terre aucune trace de leur passage.

La question de l’existence de civilisations extraterrestres est évidemment un préalable qu’il est en toute rigueur impossible de trancher mais au sujet de laquelle une opinion peut être forgée sur la base d’un raisonnement probabiliste. Sachant qu’il y a environ 200 milliards d’étoiles dans notre galaxie, et que près de 2000 exoplanètes ont été découvertes depuis l’interrogation de Fermi, il n’est pas illégitime d’admettre que de telles civilisations existent et même qu’elles sont en très grand nombre.

Cette hypothèse étant retenue, et compte tenu de l’âge de l’univers (environ 14 milliards d’années) et de la (petite !) taille de notre galaxie (quelques dizaines de milliers d’années-lumière), la Terre aurait due en effet être déjà visitée, et même de fort nombreuses fois. Pourtant, aucune trace de ces extraterrestres, d’où l’interrogation apocryphe de Fermi : “Où sont-ils ?”

Ce paradoxe de Fermi, ainsi que Carl Sagan a proposé de l’appeler, a donné lieu à de très nombreuses discussions (on l’imagine aisément !), et même à des modélisations s’inspirant de concepts familiers dans l’étude du mouvement brownien ou des systèmes désordonnés ; l’une d’entre elles s’appuie sur la notion de seuil de percolation — concentration critique de liens établis au hasard entre deux points voisins, et permettant finalement d’explorer un grand système d’un bout à l’autre (voir http://www.geoffreylandis.com/percolation).

Une nouvelle explication vient d’être proposée par Gabriel Chardin (https://lejournal.cnrs.fr/billets/le-paradoxe-de-fermi-et-les-extraterrestres-invisibles), cosmologiste et spécialiste de la matière sombre, fondée sur le fait que toute civilisation se développant sur la croissance (même faible) épuise toutes ses ressources en un temps relativement court, que Gabriel Chardin estime à quelques milliers d’années. Allant un cran plus loin, il affirme que la survie d’une civilisation est ainsi trop brève pour lui permettre de développer la technologie donnant au voyage interstellaire la banalité d’un vol transatlantique à la découverte de nouvelles Amériques situées à des centaines d’années-lumière.

Au-delà des disputes sur les chiffres et les estimations — forcément hasardeuses —, le fait est que quiconque ayant précisément tracé un morceau d’exponentielle comprend vite que, dans un système clos comme la Terre ou ses lointaines cousines, la survie à (très) long terme n’est possible que si le taux de croissance est proche de zéro… la limite de la croissance nulle étant une condition nécessaire (mais pas suffisante !) pour une durée de vie éternelle.

On pourrait bien sûr objecter que ce sont les progrès scientifiques et techniques qui nous ont permis d’atteindre le stade de développement actuel en dépit des prévisions des Cassandre de tout poil et de tous horizons, et qu’il en ira toujours ainsi. Sauf que, pour ne parler que d’énergie, le rendement d’une machine ou d’un dispositif ne peut croître exponentiellement, lui ! Et que jusqu’à preuve du contraire, l’énergie se conserve… Des exemples montrent que dans certains domaines (Gabriel Chardin cite le cas des LED, dont l’efficacité et presque égale à 1), nous savons déjà être près de la perfection (!?), tout progrès encore envisageable étant ainsi destiné à n’avoir qu’une conséquence très marginale.

Cette nouvelle explication, venant après beaucoup d’autres, a manifestement des implications économiques, et c’est pourquoi le lecteur est invité à consulter un débat entre Gabriel Chardin et l’économiste Alexandre Delaigne, disponible à l’adresse http://rue89.nouvelobs.com/2015/02/28/croissance-a-quelle-distance-est-limites-257868

L’interrogation de Fermi n’a pas que des présupposés relevant des sciences naturelles ou humaines, elle soulève des questions d’une tout autre nature.  Philosophiques d’abord, car teintée d’anthropocentrisme, idéologiques aussi (l’expansionisme est-il la règle ?) et enfin religieuses. C’est dire que, ayant déjà été l’objet d’une vaste littérature, elle continuera d’alimenter des réflexions forcément spéculatives tout en sollicitant l’imagination débordante et débridée des auteurs de science-fiction.

 

 

 

 

Une réflexion sur “ Le paradoxe de Fermi revisité ”

  1. Personnellement,
    sans être physicien, je me suis intéressé au voyage dans le temps de manière subliminale, c’est-à-dire relatif au facteur de Cérébralité qui me semble incontournable en parallèle de la Célérité relativiste d’Albert Einstein: avec ce fameux temps du Sujet philosophique qu’Einstein a un peu galvaudé pour fonder sa théorie de la Relativité au début du XXème siècle.
    Il est donc normal qu’aujourd’hui on ne puisse pas envisager la durabilité d’une civilisation si on interprète tout en terme de matière pure sans lui laisser une place cérébrale, c’est-à-dire impliquée à travers la sorte de réduction d’onde émanent de la physique quantique.
    Je pense que si le phénomène extra-terrestre existe, il se traduit de manière subliminale: “exit” le vaisseau trans-galactique capable de franchir un trou de ver ou l’espace-temps à la vitesse de la lumière avec à son bord des humains seulement capables de supporter 9G d’accélération.
    Enfin, la Nature existe aussi à travers des cycles et notamment celui des périodes glaciaires: on peut donc envisager qu’à chaque fois la nature humaine évolutive puisse gagner un coefficient de conscience capable de redéfinir l’horizon universel; ça voudrait donc aussi dire qu’on ne puisse pas retrouver ce Passé au niveau du Cosmos ni de la Terre dans le fait que notre “fréquence” ou “impédance ” cérébrale ne peut plus mesurer de manière cérébrale cette nouvelle harmonie avec la Matière. Bien entendu, dans un imaginaire exotique assez élevé, le Big-bang se voit sans cesse renouvelé car le facteur de la masse cérébrale qui n’entre toujours pas dans le cadre “réfléchie” de la Relativité, se comporte comme une retenue différentielle qui donne à l’observateur un moment de conscience éphémère mais bien réelle: sauf toutefois illusoire pour un temps mais malgré tout inscrite dans un libre-arbitre avec la Matière …

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