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El Hierro 24/02/2014 : nouveau site de la Réserve de la biosphère

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Leoncio Morales Rodriguez (fondateur  de Radio Garoé), un homme de médias qui fit beaucoup pour faire connaître et apprécier El Hierro y compris au-delà des mers.

Le 24/02/2014, le nouveau site Internet de la Réserve de la biosphère, se couplant à un observatoire, est en place (en espagnol).
A ce côté institutionnel, se somment les trois journaux numériques suivants qui montre la vitalité d’une île de seulement quelque 10 000 habitants :
– El Diario El Hierro qui a repris la suite du journal papier homonyme;
– El Hierro Digital;
– El Bimbache.

Il ne faut pas oublier Radio Garoé qui émet depuis 1992 et dont le responsable et fondateur Leoncio Morales vient de nous quitter.  Sa photo est mise en avant dans cet article en son hommage.

El Hierro le 17/02/2014 : essais de la centrale hydraulique

El Hierro le 17/02/2014 : début des essais de la centrale électrique hydraulique qui est une STEP (Station de Transfert d’Energie par Pompage) avec deux réservoirs et une haute chute d’eau de plus de 600 mètres utilisée pour le turbinage, en cas de panne de vent. Les réservoirs sont alimentés en eau de mer dessalée par l’énergie éolienne qui assure aussi toute la phase de pompage.
Le 17 février, la centrale hydraulique d’El Hierro passe en phase d’essai avec ses 4 turbines Pelton fournies par le groupe suisso-suédois ABB (en anglais).

Cette phase d’essais durera jusqu’à cet été (en espagnol).

Détail de la salle des machines. Partie électro-mécanique liée à une Pelton horizontale dont les caractéristiques sont les suivantes : puissance 2.86 MW; chute 650 m; diamètre turbine 1 m. Photo début 2013. © A. Gioda, IRD.
Détail de la salle des machines. Partie électro-mécanique liée à une turbine Pelton horizontale. Centrale hydraulique Gorona del Viento. Photo janvier 2013. © A. Gioda, IRD.
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Encore emballées, les machines dans leur salle : les carénages bleus correspondent à la partie électro-mécanique dont les pompes de l’autrichien Andritz Hydro ; et ceux rouges abritent les turbines hydrauliques d’ABB. Pour chacune de ces 4 turbines, les caractéristiques sont les suivantes : diamètre 1 m; puissance 2.86 MW après une chute d’eau de 650 m .  Centrale hydraulique de Gorona del Viento, El Hierro, photo janvier 2013. © A. Gioda, IRD.

La transition énergétique et la quête de l’eau cachée filmées

Autour d’El Hierro aux Canaries et de ses avancées en développement durable (DD), en énergies renouvelables (ENR) et en nouvelles technologies environnementales (NTE), il y a une série de films et de vidéos de qualité professionnelle dont j’ai choisi 6 exemples. Cette série tourne autour de la transition énergétique et écologique et la recherche de l’eau cachée dans un milieu insulaire et globalement aride.

1) Extrait du documentaire “Les maîtres de l’eau” (1ère diffusion 22 mars 2013 sur la chaîne Encyclo) par Jean-Paul Llamazares pour Gédéon Programmes et AB Productions.  En se promenant sur la page d’accueil, on le voit bien.
http://www.guilaindepardieu.fr/scienceenmarche.html

2) Documentaire “Les pionniers de la transition énergétique“, émission “Avenue de l’Europe”, France 3, diffusion 6 avril 2013. Le dernier exemple présenté est celui d’El Hierro.

3) Tout comme Pierre Rabhi, j’ai participé, en tant qu’invité par Thierry Salomon le président de négaWatt,  au Festival éco-responsable de l’Etang de Thau. Conférence le 21 juillet 2013 à la capitainerie du port de Mèze (Hérault) filmée par Serge Tostain.
http://www.youtube.com/watch?v=WARHXtv2fhQ

4) “Le Blogueur“, Arte et El Hierro (20 octobre 2013) mais ce n’est pas facile à revoir sachant que les vidéos TV sur ce support sont fugaces.
http://www.arte.tv/guide/fr/049475-012/le-blogueur
Il en reste un résumé en ligne.
http://www.programme.tv/c3000066-le-blogueur/habiter-durable-69290712/

5) “Eau du brouillard, forêts de nuages et développement durable“, Canal IRD par Luc Markiw (2005).

Pour celles et ceux pratiquant l’espagnol et l’anglais, nous continuons avec une vidéo d’Endesa, l’EDF privatisée espagnole et filiale de l’ENEL, puis une autre de Gorona del Viento, la SEM qui a construit et qui gère la centrale hydro-éolienne d’El Hierro

6) Proyecto El Hierro: 7 compromisos para un desarrollo sostenible“.
Pour les anglophones, c’est ici “Business Lines: El Hierro” :

7) Seulement en espagnol, La central hidroeolica de El Hierro“.

8) toujours en espagnol, le projet Géoparc-Unesco déposé en 2013.

Bonne vision!
Alain

 

 

 

El Hierro : Réserve de la biosphère

Prises des miradors construits par Don Zósimo, sous les conseils de César Manrique dans les années 80 (une œuvre poursuivie ensuite), ces photographies sont faciles à faire sans danger. Ces miradors incarneraient, s’il n’étaient point des objets, la réserve de la biosphère car insérant l’homme dans le monde minéral et vivant.

L’an 2000,  toute l’île a été déclarée Réserve de la biosphère par l’Unesco, dans le cadre du programme MAB (Man and Biosphere), après avoir déposé, par ses élus, sa candidature.

Mes voyages et missions cette année

Voilà mes missions et les évènements auxquels j’assisterai et où j’interviendrai les mois suivants en espérant en ajouter beaucoup d’autres.

2 février, 18 heures. Conférence au sujet de la transition énergétique, Aquaforum, en bordure de la Garonne, Rives d’Arsins, Bègles (Gironde), organisée par « Terre & Océan » de Bordeaux.

2-12 mars. Mission de terrain,  El Hierro et Tenerife (Canaries).

29 avril-10 mai. Terrain : géoparc Unesco de Sardaigne (Italie).
Dans le cadre de la préparation du COP 21 (Paris Climat 2015), l’Ambassade de France à Berlin, organise un symposium franco-allemand, en liaison avec l’INRA, sur le thème “Changement Climatique, Agriculture et Forêt” le 7 mai 2014 à Berlin. Invité début avril, je serai toutefois à cette époque en Sardaigne pour visiter, une seconde fois, le grand Géoparc multi-sites de cette île qui tourne autour de l’histoire et de l’archéologie industrielle. Pourquoi ? Afin d’étudier car l’île d’El Hierro a déposé aussi, auprès de l’Unesco, sa candidature en 2013 à cette classification de Géoparc pour relancer son tourisme choisi. Ce dernier est, de nos jours, réduit à la suite à la crise sismique et volcanique de 2011-2012. Cette crise deviendrait alors une chance pour El Hierro.

Début juillet.  Congrès PAGES (PAst Global chanGES) Amérique du Sud, Medellin, Andes de Colombie, organisé par l’IGBP (International Geosphere and Biosphere Programme).

Mobilité électrique et la mienne avec une moto superéthanol

La mobilité électrique est encouragée sur El Hierro par un partenariat avec Renault-Nissan et l’implantation de bornes de recharge rapide par Endesa, l’équivalent en Espagne d’ EDF mais qui a été privatisée et qui est une société par actions, filiale de l’ENEL italienne.
Toutefois, en France le nombre de bornes est notoirement insuffisant. L’électricité fournie est aussi non tracée. Logiquement, la majorité doit venir de l’énergie nucléaire dont le gouvernement, dans le cadre de la future loi-programme sur la transition énergétique, veut voir sa part baisser dans la production nationale : à terme de 75% à 50%. De plus, ce n’est pas une énergie renouvelable (l’objectif affiché, et la France s’est engagée vis-à-vis de Bruxelles, est 23% de ENR en 2020). Enfin,  le minerai qui l’alimente est à 100% importé. Le déficit commercial de la France était en 2013 de 61,2 milliards d’euros dont l’énergie représente 83% du trou total (Le Figaro, 9 février 2014, Economie, p. 20). Continuer la lecture

El Hierro : l’arbre, l’astrophysicien et le musicien

La sabina d’El Hierro est un très ancien genévrier de Phénicie (Juniperus phoenicea) dont le vent a façonné le tronc, telle la Vénus de Samothrace, et la couronne de feuillage, telle une chevelure de dame préraphaélique.
Sabine d'El Hierro, un des symboles de l'île. Photographie de 1991.
Sabine d’El Hierro, un des symboles de l’île.
Photographie ancienne de 1991. © A. Gioda, IRD.
La conservation de la sabina était mise en péril à la suite à des déprédations de touristes anglais, sans doute involontairement attirés par la photographie de cet arbre caractéristique de l’île sur la pochette d’un disque de Brian May, le guitariste du groupe pop Queen mondialement connu depuis les années 70. Ce disque de Brian May, sorti en 1998, s’appelle un « Another World ». Sa chanson-titre homonyme (dont il a écrit les paroles très simples alors qu’il passait un moment personnel difficile) est dédiée à El Hierro. L’île est présentée telle une alternative au monde actuel et il y a avec un autre paysage insulaire, celui de la Roque de la Bonanza, sur le verso de la pochette.

Allez donc l’écouter sur Youtube comme vous verrez la sabina au recto de la pochette telle qu’elle était vers 1998.

Pourquoi le guitariste rock Brian May s’intéresse-t-il durablement à la sabina et à El Hierro ?

Parce qu’il connut les Canaries à la fin des années 60, avant de devenir un rockeur professionnel de grand succès, en tant qu’étudiant avancé en astrophysique de l’Imperial College de Londres. Le groupe Queen trouve ses racines universitaires à Londres avec un autre ancien étudiant de l’Imperial College Roger Taylor, son batteur et multi-instrumentiste, et donc Brian May.  D’autre part, l’archipel des Canaries compte l’ensemble d’observatoires astronomiques les plus performants d’Europe sur les îles de Tenerife (dont celui d’Izaňa sur le volcan Teide où étudia Brian May) et de La Palma, à plus de 2 500 mètres, au-dessus de la mer de nuages qui correspond à l’étage biogéographique des forêts du brouillard ou bien de la brume ou encore des formations végétales nébuleuses. Dans les années 90, lors de sa carrière solo qui se développa après le décès de Freddy Mercury des Queen, Brain May grava et publia « Another World ». C’est un album très rock mais aussi dans lequel, par touches lors des passages lents, son intérêt pour la préservation de la nature apparaît clairement ; un  titre de morceau porte le nom évocateur de “Wilderness” soit le mot fétiche de John Muir.

L’âge venu, son intérêt pour le rock s’éloignant quelque peu, Brian May reprit ses études pour les conclure par un doctorat en astrophysique finalement obtenu en 2007, quelque 37 années (!) après son début de thèse. Cela toujours auprès du prestigieux Imperial College de Londres où le Dr. Brian Harold May (CBE, PhD, FRAS)  a depuis le statut de chercheur visitant. Sa publication scientifique la plus notable est la suivante  : Hicks, T., May, B., & Reay, N. (1972). MgI Emission in the Night Sky Spectrum, Nature, 240 (5381), 401-402. Ses conclusions sont expliquées ici (en anglais).

A côté de la science, Brian May est aussi connu en Grande-Bretagne depuis longtemps comme un défenseur de la nature et donc des animaux sauvages, tels les renards, les hérissons et les blaireaux, notamment grâce à son blog. Ici, est présentée la partie de son blog datée de décembre 2011, et en allant au 7 précisément, en déroulant le menu, vous liriez la mésaventure subie par la sabina de El Hierro lors de cette année.

Sabina tree
La sabina, un genévrier de Phénicie pluricentennaire, montée par un touriste se faisant immortaliser sur l’arbre. © Miguel Piñar du Service de l’Environnement d’El Hierro.

Emu par les déprédations subies par l’arbre, Brian May s’excusa sur son blog de l’avoir mis en vedette sur son disque de 1998. Le service de l’Environnement d’El Hierro prit les choses en main et protégea début 2012 son autre arbre symbole, avec le Garoé, par un cordon pour éviter aussi tout piétinement au-dessus de ses racines, mit un beau panneau en xylogravure et l’équipa d’un code-barres QR pour rendre son histoire accessible par l’Internet y compris sur le terrain.

Protection de la sabina après l’épisode des holigans, fans des Queen et de Brian May.
Protection de la sabina après le vandalisme des fans des Queen et de Brian May. © A. Gioda, IRD.

Maintenant si “We will Rock You” résonnait ou encore si vous voyiez le guitariste sur le toit de Buckingham Palace jouer à la manière de Jimmy Hendrix “God save the Queen”, vous connaîtriez les autres facettes de la personnalité de Brian May.

El Hierro : le fait de la transition écologique et énergétique

Laissés de côté depuis les années 1970 par le boom touristique de l’archipel canarien, les représentants élus de l’île d’El Hierro (270 km, 10 000 habitants aujourd’hui) se trouvèrent, 20 ans plus tard, face à la volonté expansionniste de l’armée espagnole . Cette dernière cherchait d’y agrandir son emprise foncière afin d’installer des radars, profitant de sa position géographique la plus avancée dans l’Atlantique de l’archipel et de la clarté de ses ciels , conséquence de la faiblesse de sa population et des activités humaines.

Prendre son destin en main ou devenir autonome signifièrent pour la population faire le choix de l’indépendance énergétique. Un parti insulaire appelé Agrupacion Herrena Independiente (AHI), membre de la Coalition Canarienne qui gouverne la région autonome de l’archipel, avait pris par la voie électorale le pouvoir sur El Hierro dès 1987 et le conserva, sauf de courtes interruptions, jusqu’en 2011 . Ce parti présentait la particularité d’être animé, jusqu’à 2012, par le responsable de l’unique centrale énergétique de l’île, alors propriété de l’Etat, et fonctionnant au fioul. Cette conjonction technico-politique favorisa la transition énergétique qui prit plus de 30 ans nécessaires pour concevoir, financer et construire l’originale centrale hydro-éolienne à 100% alimentée par les énergies renouvelables. Toutefois le terrain avait été préparé par la transition écologique, déjà en route depuis les années 1940, qui fut un effort collectif consacré par le classement en 2000 de toute l’île en Réserve de la biosphère par l’Unesco pour les succès suivants : fortification des activités agro-pastorales avec les coopératives fruitière (bananes et ananas), laitière , fromagère, apicole et de pêche; reforestation avec des espèces locales ; plantation d’arbres fontaines  et pose de filets attrape-brouillard ; redécouverte, sauvegarde et réintroduction d’un rarissime lézard géant endémique…

Ensuite, pour réussir la transition énergétique , il fallut implanter 5 éoliennes de 2,1 MW chacune, réaliser le dessalement de l’eau de mer en utilisant leur énergie, bâtir une centrale hydraulique de 11 MW avec 4 turbines Pelton prenant leur relais en cas de panne de vent et donc construire deux réservoirs, à des altitudes différentes, fonctionnant en STEP (Station de Transfert d’Energie par Pompage).

D'un volume de 500 000 m3 et installé dans l'étage du brouillard près de l'arbre fontaine, le réservoir supérieur permet une chute d'eau de plus de 600 mètres vers la centrale hydraulique
D’un volume de 500 000 m3 et installé dans l’étage du brouillard près de l’arbre fontaine, le réservoir supérieur permet une chute d’eau de plus de 600 mètres vers la centrale hydraulique. Février 2012. © A. Gioda, IRD.

Néanmoins tout cela ne veut pas dire mettre sous un cocon voire démonter l’ancienne centrale thermique au fioul, d’ailleurs installée sur un site très proche. L’objectif est un mix ou bouquet énergétique parce qu’il faut sécuriser l’approvisionnement de l’île.

Depuis plusieurs décennies, les îliens ont par conséquent considérablement changé leurs comportements avec des démarches concrètes et avant-gardistes de développement durable. De nos jours, la mobilité électrique et la fabrication de biodiesel commencent à se développer. Sur une île où par tradition les coopératives et les mouvements politiques et citoyens sont très actifs, il ne faut pas oublier la wifi gratuite partout dans les lieux de réunion tandis que l’éclairage public led se diffuse. Enfin, les sports au contact de la nature se développent y compris chez les îliens : trekking, chasse photographique sous-marine, parapente, voile .

El Hierro : l’homme qui plantait des arbres fontaines

La science est aussi une histoire d’amitiés. C’est parce que j’avais connu un ingénieur spécialisé dans le développement des zones arides au Niger en 1985 qui travaillait alors dans un pays voisin encore plus pauvre, le Tchad après une guerre civile, que je suis allé quelques années plus tard sur l’île d’El Hierro.
Andrés Acosta Baladón, c’était son nom – un homme petit mais vaillant aux jambes arquées peut-être la marque d’une jeunesse passée en partie à cheval dans son lointain Uruguay natal où les animaux sont bien plus nombreux que les hommes -, m’avait intrigué puis passionné avec ses filets attrape-brouillard et son histoire des usages traditionnels pour capturer l’eau de la brume dans les déserts côtiers grâce aux agaves et d’autres plantes. Entre autres, Andrés m’avait parlé de l’arbre fontaine ou arbre saint d’El Hierro aux Canaries qui avait existait là-bas jusqu’en 1610 et qui était utilisé comme source d’eau par les aborigènes berbères, les Guanches, avant la conquête espagnole au XVème siècle et encore au-delà. Continuer la lecture